Face à une société encore trop peu adaptée à leurs besoins, les millions de personnes en situation de handicap habitant en France sont particulièrement isolées vis-à-vis du monde numérique. Les principales raisons ?
- Les difficultés d’accès à l’équipement et à la connexion internet en raison du coût engendré, ou encore du manque d’accessibilité du matériel.
- L’acquisition compliquée des compétences et usages du numérique.
- Le manque d’adaptation des outils numériques, initialement imaginés pour des personnes valides.
>>> A lire aussi Handicap : l’accès à l’emploi est contrasté pour l’Agefiph
Pour alerter face à cette situation, un rapport conjoint d'Emmaüs et de la Croix-Rouge a été publié le 23 septembre 2024. Il souligne notamment que, même si plusieurs outils existent déjà en direction des handicaps moteurs et/ou sensoriels, pour d'autres déficiences, l'utilisation reste encore trop complexe.
Afin de remédier à ce problème, les associations formulent pas moins de 11 recommandations détaillées.
1. Donner envie d’utiliser le numérique. Le premier point développé par le rapport est de laisser avant tout la personne s’investir.
- Si elle cherche, d’elle-même, à utiliser les outils numériques, il lui sera alors plus facile de se motiver et d’apprendre.
- Dès qu’elle en aura manifesté l’envie, il est également important qu’elle puisse avoir du matériel adapté à ses besoins.
- En ce qui concerne l’acquisition des compétences, il faut que les intéressés puissent disposer de l’ensemble des ressources nécessaires en vue d’étudier le numérique.
2. Intégrer le numérique dans le suivi des personnes en situation de handicap. « Il ne s’agit pas de faire du numérique pour le numérique, mais bien plutôt de l’envisager comme une des briques de l’accompagnement global », indique le rapport. Pour ce faire, il est notamment conseillé de s’appuyer sur des méthodes employées par les professionnels du handicap.
3. Favoriser l’autodétermination. Les intéressés doivent avoir le choix de décider de ce qu’ils souhaitent faire avec le numérique. Pour les accompagner, il est indispensable de présenter les opportunités que ce dernier peut offrir, et les risques qu’il peut comporter.
4. Utiliser le numérique pour avoir confiance en soi. Savoir que l’on est capable d’accomplir quelque chose est décisif pour gagner en assurance. Ici, l’objectif est d’aider la personne en situation de handicap à se valoriser, et à exploiter ses compétences.
5. Sensibiliser et outiller les accompagnants. Cet objectif doit être mis en œuvre à trois niveaux :
- la formation des médiateurs et conseillers numériques, en les sensibilisant afin de mieux comprendre le handicap, d'adopter les bons gestes, d'adapter leur suivi, et d'accompagner les personnes en situation de handicap sur leurs besoins spécifiques ;
- la formation des professionnels du handicap, afin d’attirer leur attention sur les enjeux de l’inclusion numérique, et les aider à s’adapter aux situations particulières ;
- guider les proches aidants de façon à ce qu’ils puissent s’approprier la problématique de l’accès au numérique.
6. Prendre en compte l’exclusion du numérique chez les accompagnants. Ceux-ci n’étant pas tous égaux face au numérique, il peut être nécessaire d’orienter les proches aidants et les professionnels du handicap vers des médiateurs numériques spécialistes du handicap.
7. Etablir une analyse complète des situations. Cet examen doit se faire autour de cinq axes principaux :
- le niveau d’équipement et de connexion de l’intéressé ;
- ses compétences et usages numériques ;
- ses capacités ;
- son environnement et ses contraintes ;
- ses envies.
>>> A lire aussi Qui sont les nouveaux ministres du secteur ?
8. Personnaliser les accompagnements. Cette étape passe par la prise en compte des souhaits de la personne accompagnée. De là, il lui est proposé du matériel informatique adapté, et des exercices différents sur une thématique commune en fonction des besoins rencontrés (difficultés de lecture et d’écriture, de concentration, de mémorisation, ou d’abstraction et de conceptualisation).
9. Favoriser le travail collaboratif. L’objectif de cette recommandation est de permettre le dialogue entre les professionnels du handicap et du numérique, de façon à mettre en commun les expertises de chacun.
- Il est notamment conseillé d’implanter des instances pluridisciplinaires afin de développer les échanges.
- Il est estimé nécessaire d’inclure les personnes accompagnées, ainsi que leurs proches, afin que puissent être recueillis leurs besoins et envies pour la mise en place de ces ateliers.
10. Encourager la pair-aidance dans le domaine du numérique. Ce système a un double avantage : que la personne aidée se sente mieux comprise et gagne en autonomie, et que la personne aidante voie sa confiance en elle augmenter.
- Mais que ce soit pour l’une ou pour l’autre, cela permet également de créer du lien social.
- Le rapport préconise d’étendre ce système aux aidants, pour qu’ils échangent entre eux sur la manière dont ils peuvent accompagner leurs proches sur la question du numérique.
- De même, il précise l’intérêt qu’il y aurait à développer ces espaces d’échange entre les professionnels.
11. Encourager la participation des intéressés et de leurs proches. Afin de ne pas limiter l’accès du numérique au temps passé en établissements, le rapport propose d’inclure les aidants et les personnes aidées dans les dispositifs. Objectif annoncé : les aider à s’équiper personnellement, et les sensibiliser sur les approches à avoir pour « laisser un accès libre, autonome mais responsable au numérique ».