Dans ce texte - remis au chef du gouvernement en présence de la ministre déléguée aux personnes handicapées, Marie-Arlette Carlotti, qui lui avait confié cette mission en septembre dernier -, l'élue pointe en effet "un défaut de portage politique, des lenteurs dans le processus de production règlementaire, une absence d'évaluation des impacts techniques et économiques de la loi, la complexité des règles ou encore le manque d'harmonisation des pratiques des commissions consultatives départementales de sécurité et d'accessibilité", résume Matignon.
Un plan d'action validé cet été
A partir d'un état des lieux issu "de très nombreuses auditions", Claire-Lise Campion ouvre donc "plusieurs pistes de travail pour relancer la dynamique de mise en accessibilité de la société et 'réussir 2015'", et "ses propositions seront étudiées par le gouvernement avec la plus grande attention", assurent ainsi les services de Jean-Marc Ayrault, qui invite l'ensemble des ministres concernés à "participer activement, sur la base de ce rapport, à l'élaboration d'un plan d'actions gouvernemental qui sera validé lors du prochain comité interministériel du handicap, à la fin du premier semestre de cette année".
Il ne saurait en effet être question de se satisfaire de ce "constat mitigé", mais de proposer des solutions "pour répondre au mieux aux défis posés par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées", ce que fait la sénatrice de l'Essonne à travers une quarantaine de recommandations, qui laissent l'APF sur sa faim, ainsi que la FNATH dans une moindre mesure (voir encadré).
Enjamber l'échéance de 2015
"Afin de respecter au mieux les délais voulus par les parlementaires, mais sachant que les travaux seront loin d'être achevés d'ici deux ans, il est proposé un dispositif qui permette d'enjamber 2015 et de poursuivre l'élan", indique-t-elle ainsi, en avançant une mesure-phare, à lancer sans tarder, pour les établissements recevant du public (ERP) existants : les agendas d'accessibilité programmée (AdAP).
Ces documents de programmation et de financement seraient élaborés par les gestionnaires ou propriétaires des ERP publics ou privés, en application d'un processus différencié selon la nature et la taille du maître d'ouvrage. Ils feraient l'objet, après passage en commission départementale de sécurité et d'accessibilité (CCDSA), soit d'une délibération s'il s'agit d'une collectivité publique, soit d'une décision de l'instance de gouvernance du maître d'ouvrage, selon son statut. Ces agendas pourraient "également inclure la ou les demandes de dérogation souhaitées pour certains établissements", et "leur durée de mise en oeuvre s'inscrirait dans une fourchette de l'ordre de trois ou quatre ans, pouvant être reconduite de deux ou trois ans".
Pour ce qui est des transports, les schémas directeurs d'accessibilité (SDA) pourraient faire l'objet d'un processus comparable, suggère encore Claire-Lise Campion, qui estime enfin que la réussite de ces AdAP repose "sur deux conditions : une impulsion politique forte et l'ajustement de celles des règles qui après application, se révèlent peu opérationnelles ou entraînent des coûts de mise en oeuvre excessifs".
Vers la conception universelle
Pour mieux mobiliser les acteurs dont l'implication est nécessaire dans la réussite de ce projet, le rapport Campion propose quatre orientations :
- l'organisation d'une table ronde nationale des acteurs de l'accessibilité pour faire partager la démarche,
- des états régionaux destinés aux collectivités territoriales et aux différents secteurs d'activité sur la préparation des AdAP ;
- l'octroi du label "grande cause nationale 2014" à l'accessibilité, juste avant l'échéance de la loi ;
- l'adoption d'un plan d'ensemble pour assurer la formation des acteurs.
Il va aussi falloir en passer, entre autres, par le renforcement des organismes censés opérer dans ce domaine, comme l'Observatoire interministériel de l'accessibilité et de la conception universelle, et des moyens permettant de conforter le volet financier incitatif à la mise aux normes des ERP privés.
Du point de vue de la réglementation, enfin, certaines dispositions "méritent d'être revues, ne serait-ce que parce que leur rapport accessibilité-prix est inapproprié", juge le rapport, qui propose d'engager, dans le domaine du logement et des transports en particulier, une démarche concertée privilégiant la qualité d'usage et la conception universelle.
A cet égard, et "pour tenir compte de toutes les formes de handicap, les lieux publics, les transports, les gares doivent résolument s'adapter pour mieux accueillir le handicap sensoriel, mental ou psychique", par le biais d'informations sonores adaptées, de bandes pododactiles, de dispositifs télécommandés de repérage, de signalétique simple et lisible, de boucles magnétiques, et de formation des personnels.
Réussir 2015 - Accessibilité des personnes handicapées au logement, aux établissements recevant du public, aux transports, à la voirie et aux espaces publics, rapport de Claire-Lise Campion, à télécharger sur le site de Matignon.
A.S.