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Santé mentale : « Porter une attention aux enfants les plus vulnérables » (Unicef)

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Sarah Ben Smida (Unicef)

Sarah Ben Smida est chargée de plaidoyer et programme de santé mentale à l'Unicef France. 

Unicef France plaide pour l’élaboration d’une stratégie nationale sur la santé mentale des enfants, qui permette d’apporter des réponses aux plus fragiles, en particulier les jeunes filles. Une cause qu'elle a prévu de défendre à l’occasion de la journée mondiale de la santé mentale, jeudi 10 octobre, et qui sera abordée lors d'un colloque qu'elle organise le même jour à l’Assemblée nationale.  

Sarah Ben Smida est chargée de plaidoyer et programme santé mentale à l’antenne française de l’association Unicef. L'experte explique pourquoi il est urgent de développer des politiques publiques plus inclusives pour les enfants les plus vulnérables. Argumentaire qui sera déployé le 10 octobre par les différents intervenants au colloque.  

Quel message souhaitez-vous porter ?

L’Unicef reçoit régulièrement des interpellations de professionnels de santé, des pédopsychiatres, psychologues, psychomotriciens, orthophonistes, qui relatent des difficultés d’accès aux soins de santé mentale de certains publics.

Même constat sur la qualité des soins : les besoins des plus vulnérables sont mal pris en compte, qu’il s’agisse des enfants en situation de grande exclusion, des enfants hébergés, des migrants, ou encore des filles. L’approche universelle et très globale les met de côté. Nous appelons donc à élaborer une stratégie nationale sur la santé mentale des jeunes et à porter une attention particulière à ces enfants vulnérables.

Lire aussi : ASE : l’urgence de revoir l’approche en santé mentale, selon Terra Nova

Quelles seraient les grandes lignes de cette stratégie nationale ?

Une bonne promotion de la santé mentale doit passer par trois axes : l’information du grand public, la prévention des troubles – la moitié d’entre eux apparaissant avant l’âge de 14 ans – et l’accès aux soins pour tous les enfants. Ce qui nécessite de penser des réponses adaptées à chaque public – des dispositifs mobiles, d’aller vers, la garantie d’un interprétariat quand c’est nécessaire, etc. – et de lever les barrières d’accès aux soins.

Quelles sont ces barrières ?

Elles sont financières mais pas seulement. Les difficultés d’accès aux soins sont aussi liées au manque de professionnels ou à des problématiques de ruptures de soin qui peuvent concerner des enfants en protection de l’enfance ou en situation de précarité. L’enjeu, comme l’exprime l’intitulé du colloque, est de développer des politiques publiques plus inclusives pour les enfants les plus vulnérables.

En particulier pour les enfants placés ?

Les enfants confiés à l’aide sociale à l’enfance ont un risque cinq fois plus élevé de développer un trouble de santé mentale. D’où la nécessité de renforcer la prévention : plus on agit tôt, mieux on les accompagnera. Il faut aussi penser une vision globale, en agissant sur le cadre et les conditions de vie qui sont des facteurs de vulnérabilité importants.

La santé mentale en protection de l’enfance est un sujet assez connu des pouvoirs publics. Un autre, en revanche, l’est beaucoup moins, c’est le lien avec les discriminations de genre. Les consultations aux urgences pédopsychiatriques explosent chez les filles.

En quoi le genre intervient-il dans les questions de santé mentale ?

Les indicateurs de santé mentale concernant les filles sont très mauvais :

  • Entre 2018 et 2022, la prévalence du risque de dépression chez les collégiens et lycéens est passée de 5,2% à 6,9% chez les garçons et de 13,4 à 21,4% chez les filles (Santé publique France, 2022).
  • Une fille sur quatre au collège (25,5 %) ou au lycée (23,1 %) déclare avoir déjà eu envie de mourir contre respectivement 10,5 % et 9,9 % des garçons (Enclass, 2022) ;
  • Entre 2021 et 2022, les hospitalisations pour gestes auto-infligés ont augmenté de 63% chez les filles de 10 à 14 ans ; de 42% chez les adolescentes de 15 à 19 ans ; de 32% chez les femmes de 20 à 24 ans. (DREES, février 2024).

Pourquoi de tels écarts avec les garçons ?

Elles n’ont pas de prédispositions particulières, mais des facteurs de risques plus importants. On constate un croisement des vulnérabilités : la précarité en est une, mais aussi le genre. Les filles sont exposées très jeunes à des risques de violences, y compris sexistes ou sexuelles, de cyberharcèlement.

Toutes ces perceptions et représentations stéréotypées, amplifiées par des représentations médiatiques qui renforcent l’injonction à la féminité idéalisée, sont sources de stress et mal être. Et ont des conséquences sur l’estime de soi. Résultat, le taux de tentative de suicide des adolescentes de 15 à 19 ans, faisant partie des 25% les plus pauvres, s’établit à 8 fois le taux observé pour les adolescents du même âge faisant partie des 25% les plus riches.

Sur le même sujet : Une pétition pour hisser la santé mentale au rang de grande cause nationale

Que pensez-vous de consacrer la Grande cause 2025 à la santé mentale ?

C’est un élément encourageant. Et on peut saluer la priorité accordée à cette thématique globale. Reste à savoir dans quelles mesures ce label répondra à des enjeux opérationnels sur l’enfance. A ce jour, la Feuille de route santé mentale et psychiatrie, instaurée en 2018, concerne tous les âges. On est dans l’attente de mesures fortes pour l’enfance. Cela nécessite des moyens, en partant du principe que chaque champ d’expertise a son rôle à jouer pour mêler les enjeux d’accompagnement social, médical et éducatif.

Télécharger le programme du colloque.   

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