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PJJ : "Une coupe loin d’être neutre", selon Jean-Pierre Rosenczveig

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Soulignant les augmentations successives du budget du ministère de la Justice ces quatre dernières années, Jean-Pierre Rosenczveig se demande en quoi la PJJ en a tiré profit.    

Crédit photo D.R.
La protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) n’a pas les moyens de fonctionner correctement, estime le magistrat honoraire Jean-Pierre Rosenczveig. La suppression de postes de contractuels, annoncée fin juillet par la direction de la PJJ, risque de conforter des enfants dans des attitudes de réitération.

Figure de la protection de l’enfance, Jean-Pierre Rosenczveig a présidé le tribunal pour enfants de Bobigny de 1992 à 2014. Il préside aujourd’hui, entre autres fonctions, l’association Espoir-CFDJ.

ASH : Comment réagissez-vous à cette annonce ?

Jean-Pierre Rosenczveig : Supprimer 500 postes, ce n’est pas expédier les affaires courantes [comme devrait le faire un gouvernement démissionnaire, ndlr]. C’est une option politique, dont les raisons m’échappent. Une décision surprenante, qui tombe comme un couperet, en plein été. Et qui est loin d’être neutre : 500 contractuels sur 8 000 à 9 000 employés, cela représente plus de 5 % des effectifs.

Lire aussi : Grève de la PJJ : "1 500 jeunes se retrouveront privés d’éducateurs dès le 1er septembre"

Sur le fond, en l’état, la PJJ avait-elle les moyens d’assumer ses missions ? Un éducateur de PJJ assure 25 mesures, ce qui est déjà beaucoup. Il aurait plutôt fallu augmenter les moyens. Ces enfants en carence d’humanité ont besoin justement qu’on s’occupe d’eux, qu’on vive avec eux.

S’agit-il d’une remise en cause du bien-fondé de la PJJ et de ses missions ?

Je ne pense pas. Il y a quelques années, on pouvait s’en inquiéter. Cette fois, la mesure s’apparente à une coupe bête et méchante. Pendant 364 jours, on affiche une PJJ qui agit fermement et rapidement. Et on se prive des moyens nécessaires pour la faire fonctionner. La PJJ est surmédiatisée comme le symbole de la justice des mineurs qui fonctionne bien. On sait tous que c’est faux. L’exécution des mesures, lorsqu’elles le sont, accuse beaucoup de retard. Et il n’y a pas le personnel suffisant pour accompagner les enfants.

Une mesure éducative doit être exercée. Elle doit l’être le jour même, contrairement à la loi qui prévoit un délai de cinq jours. Et enfin, elle doit être efficace. Or la qualité de la mesure s’évalue sur la durée, avec les mêmes éducateurs, et non pas du personnel en rotation permanente. A l’évidence, supprimer des postes n’améliorera pas l’effectivité des mesures, ni la réactivité et la qualité de leur exécution.

Quelles conséquences sur ces jeunes ?

On risque de les conforter dans des attitudes de réitération. L’enjeu, pourtant, est bien de rompre le plus vite possible la spirale négative dans laquelle un jeune se trouve. Il s’agit de s’attaquer à son mode de vie, et donc de le comprendre à travers un travail d’investigation, d’avoir un projet et de le mettre en œuvre. Cela suppose du savoir-faire, des compétences et de la disponibilité.

Sur le même sujet : Grève à la PJJ : ce que dénoncent les syndicats, ce que répond le ministère

La suppression de ces postes de contractuels pose un problème de fond : les usagers trouvent-ils leur compte dans le fait d’avoir des éducateurs pour quelques mois ? La grande question du travail social, c’est le continuum. Comment peut-on imaginer qu’un jeune va s’extirper de la délinquance, si on ne s’inscrit pas dans la durée ?

Malgré les difficultés, les budgets du ministère de la Justice ont connu des augmentations historiques ces dernières années…

C’est toute la question : en quoi la justice des mineurs a-t-elle été impactée par ces augmentations, qui représentent 35 % en cumulé ces quatre dernières années ? On a mis de l’argent sur une réponse coercitive, pour financer des centres éducatifs fermés très coûteux, mais pas sur la prise en charge au quotidien de ces jeunes. Il faut les deux, pour éviter que des jeunes en grande délinquance ne deviennent criminels. Et il faut aussi investir dans la prévention primaire, pour que des jeunes en danger ne basculent dans la délinquance. Or, ces dernières années, près de 18 conseils départementaux ont supprimé la prévention spécialisée sous prétexte qu’elle coûte trop cher et qu’elle ne fait pas la preuve de son efficacité.

 

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