Elle n’a fait aucune annonce particulière mais l’essentiel était ailleurs. En déplacement vendredi 3 janvier, dans un centre parental d’Angers (Maine-et-Loire), la ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles, Catherine Vautrin, a voulu montrer qu’elle était bel et bien mobilisée sur le sujet.
« L’enfance est une priorité », a-t-elle martelé, vantant la transversalité d’un ministère « où nous sommes capables de parler d’enfance, de famille, de travail et de santé ». Un déplacement symbolique, dans un territoire qui l’est tout autant : la présidente du département de Maine-et-Loire, Florence Dabin, est également présidente du groupement d’intérêt protégé (GIP) France enfance protégée.
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Catherine Vautrin a tenu à rappeler qu'elle avait déjà échangé avec elle à l’occasion des Assises de Départements de France en novembre, puis, après sa nomination, avec Anne Devreese, la présidente du conseil national de la protection de l’enfance (CNPE).
Rassurer, donc, pour étouffer les critiques nées au lendemain de la nomination du gouvernement Bayrou.
L’absence d’un ministère de plein exercice
Car si Agnès Canayer, ministre déléguée du 21 septembre au 13 décembre 2024, était chargée de la Famille et de la petite enfance – un intitulé qui avait suscité bien des critiques –, la mention de l’enfance a cette fois disparu de tout portefeuille.
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« Une fois de plus, l’enfance est la grande oubliée du gouvernement », avait dénoncé le 26 décembre La Dynamique des droits de l’enfant, qui rassemble 29 organisations et collectifs, condamnant l’absence de ministère de plein exercice.
« Seule la création d’un ministère de l’Enfance, avec une place centrale au sein du gouvernement et des moyens humains et financiers dédiés, pourra assoir une politique interministérielle en faveur des enfants et des jeunes qui soit transversale, cohérente et intégrée », estime le collectif.
Un haut-commissariat aux contours flous
Emmanuel Macron a-t-il voulu étouffer les critiques ? Toujours est-il que le 28 décembre, il annonçait sur X la création d’un haut-commissariat dédié. Une décision accueillie de manière très mitigée.
La Voix de l’enfant, qui réclamait une telle instance, salue, par l’intermédiaire de sa présidente Martine Brousse, le « gage d’une politique cohérente, stable et pérenne en faveur de la protection des enfants ».
L’Unicef craint « une mesure cosmétique, sans effet concret sur la situation des enfants en France ». « Pour que ce haut-commissariat puisse avoir un impact réel, il devra disposer des moyens humains et financiers nécessaires, être pleinement autonome et s’inscrire dans une dynamique interministérielle ambitieuse », estime sa présidente Adeline Hazan.
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On ne sait pour l’heure pas grand-chose de ce haut-commissariat à l’enfance. D’abord, qui sera nommé à sa tête. L’association Protéger l’enfant plaide pour la nomination d’Edouard Durand, l’ex-co-président de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise). « Nous redoutons que le nouveau gouvernement nomme une personne qui n’ait pas une connaissance approfondie des dossiers », explique-t-elle sur X.
Bien d’autres questions demeurent. A quoi servira ce haut-commissariat ? Sera-t-il rattaché au président de la République ou à la ministre des Solidarités ? De quels moyens sera-t-il doté ? Ses compétences seront-elles de nature politiques ou administratives – ce qui lui garantirait plus de stabilité en cas d’une nouvelle censure du gouvernement ?
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Interrogée lors de son déplacement à Angers, Catherine Vautrin n’a apporté aucune précision, indiquant que le sujet faisait « partie des travaux organisés entre les services de l’Elysée et ceux du Premier ministre », ajoutant : « Il doit être opérationnel courant janvier mais nous ne sommes que le 3 et il y a 31 jours. »
Ce mardi 7 janvier, la ministre aux multiples portefeuilles sera à nouveau mobilisée sur la thématique. En présence de Florence Dabin, le directeur général de la Caisse des Dépôts, Olivier Sichel, lui remettra un rapport intitulé « Des solutions innovantes pour les acteurs de l’enfance protégée : une approche écosystémique qui peut changer la donne ».