Les travailleurs sociaux ne sont pas supposés être des spécialistes de la psychologie et du développement de l’enfant. Pourtant, en s’appuyant sur une posture sécurisante, ils ont la capacité d’apporter une « expérience émotionnelle correctrice » aux enfants placés, explique l’Institut de la parentalité, qui énonce dix choses pour mieux les sensibiliser aux spécificités des bébés et jeunes enfants.
Fondé en 2017 par Anne Raynaud, l’Institut de la parentalité accompagne les familles au travers de consultations dédiées et de groupes, et soutient les acteurs de la protection de l’enfance, de la petite enfance ou encore de l’éducation via son organisme de formation dédié.
- Chaque expérience vécue par l’enfant crée des synapses (connexions de neurones). Elles commencent à se former dans le ventre de la mère puis augmentent très rapidement après la naissance. 700 à 1 000 connexions par seconde s’effectuent pendant les cinq premières années de la vie. A l’âge adulte, le cerveau perd deux tiers des connexions. Cet élagage synaptique ne signifie pas que l’on devient moins intelligent en grandissant : on devient expert des connexions les plus utilisées (la langue, la culture, les comportements).
- Les maltraitances psychologiques et/ou physiques durant l’enfance ont des conséquences graves sur le développement du cerveau. Elles se manifestent par une hypotrophie du cortex préfrontal, visible à l’imagerie médicale.
- L’affection est une « nourriture psychiquement vitale ». Certains bébés recevant des soins « automatisés » (repas, changes, etc.) mais privés de relation affective se laissent mourir. C’est ce qu’a observé le psychiatre René Spitz en étudiant, dans les années 1940, des enfants placés ou abandonnés en institution. Il a, à partir de ce constat, élaboré la notion d’« hospitalisme » ou la maladie de la séparation.
- Un bébé s’attache à ses parents, qu’ils répondent ou non à ses besoins. De la qualité de la sécurité affective reçue dépendra son développement. Comme une feuille de route, elle influencera la vision qu’il a de lui et des autres, sa confiance en lui, son estime ainsi que ses relations durant sa vie entière.
- Le développement de l’enfant (affectif, social, moteur, cognitif) est entravé lorsque ce dernier n’a pas éprouvé de relations suffisamment sécurisantes. Avant d’envisager un diagnostic médical, « réparer les relations » peut permettre à l’enfant de reprendre un développement plus optimal.
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- Plus l’enfant vit des expériences négatives durant l’enfance, plus il risque de développer des pathologies physiques ou mentales au cours de sa vie, et un terrain addictif.
- Après un événement traumatisant, on peut le revivre en pensée et éprouver un sentiment de menace permanent. C’est le TSPT : trouble du stress post-traumatique. Bien que difficilement évaluable, il concernerait 24,8 % des enfants de moins de 6 ans exposés à des traumatismes.
- Les problèmes de santé mentale à l’âge adulte ont souvent commencé pendant l’enfance ou l’adolescence. On estime qu’un enfant sur sept dans le monde souffre d’un problème de santé mentale. Les problèmes d’internalisation (détresse émotionnelle tournée vers l’intérieur) entravent le fonctionnement et le développement du jeune enfant.
- Un bébé ne fait pas de caprice à 18 mois. Son cerveau est tout simplement immature pour réussir une telle prouesse cognitive.
- En milieu collectif ou scolaire, un enfant considéré « insupportable » est perçu comme tel car il vit des situations insupportables. C’est sa façon d’appeler à l’aide. De la même manière, derrière un comportement qualifié de « dérangeant » se cache souvent, chez les jeunes enfants, une émotion enfouie et un besoin profond non satisfait.
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