Une pétition lancée le 19 janvier et un appel à mobilisation pour le 6 février prochain. Le collectif des associations de prévention spécialisée du Nord, qui réunit les 11 clubs du territoire ainsi que le centre de ressources APSN, organise sa réplique face à ce qu’il considère être « une annonce brutale et non concertée ».
Le mois dernier, quelques jours avant les fêtes de fin d’année, le département recevait lors d’une visioconférence les directeurs de chaque structure pour leur faire part de sa décision d’amputer le budget 2025 de 3 millions d’euros.
>>> A lire aussi : Dans la Vienne, la prév’ affaiblie, les éducs mobilisés
Johnny Herbin, directeur de l’APSN, a fait les comptes : « Cela représente 25 % des 12 millions d’euros que le département verse chaque année à la prévention spécialisée. » Sachant que l’Etat, pour sa part, finance près de 5 millions d’euros supplémentaires dans le cadre du pacte des solidarités.
« Si cette décision [qui devrait être présentée au vote lors d’une prochaine session budgétaire, ndlr] est maintenue, elle compromettrait des actions de terrain qui permettent non seulement de prévenir des situations individuelles critiques, mais aussi de maintenir la cohésion sociale dans des quartiers fragilisés », défend le collectif. Lequel l’assure : « L’investissement dans la prévention est non seulement plus efficace mais également moins coûteux que des politiques répressives ou curatives. »
>>> A lire aussi : Prévention spécialisée : « En avant toute » avec Sadek
Chaque année, quelque 300 travailleurs sociaux accompagnent plus de 10 000 jeunes et leurs familles sur l’ensemble du département. Réduire le budget de 3 millions d’euros aurait pour impact, selon les estimations de Johnny Herbin, le licenciement de 60 professionnels et la disparition de trois associations. Notamment les plus petites et fragiles.
Car ces baisses de budget interviennent dans un contexte financier déjà délicat pour les associations. Inflation, surcoût du recours à l’intérim, sous-financement chronique… Ces derniers mois, c’est l’extension du Ségur, après l’accord du 4 juin dernier, qui a pesé sur les comptes des associations. « On l’a mis en paiement. Sauf que le département n’a pas le budget pour nous financer », explique Sabrina Casier, directrice de l’association Itinéraires, à Lille.
>>> Sur le même sujet : « Les jeunes cohabitent avec ces réseaux dont l’emprise est de plus en plus forte » (Véronique Le Goaziou)
Pour compenser la baisse de financement, le département entend faire appel aux communes. « La méthode de calcul pour déterminer le montant sollicité prend en compte la richesse de la ville, le quotient de pauvreté des populations, etc. Elle est bancale et on a du mal à s’y retrouver », juge Sabrina Casier.
Les communes sont censées faire un retour d’ici au 31 janvier. « S’ensuivront des réajustements, mais, pour le moment, nous n’avons aucune information », regrette Sabrina Casier, qui sait d’ores et déjà que certaines communes ne suivront pas.
Compétence obligatoire
Et quand bien même certaines communes décideraient de compenser les pertes, le collectif redoute un détricotage des fondamentaux de la prévention spécialisée. « C’est une compétence obligatoire du département, qui relève de la protection de l’enfance », rappelle Johnny Herbin. Le directeur de l’APSN redoute que les villes demandent une contrepartie à cette participation : « Le risque est de voir les fonds fléchés vers la lutte contre la délinquance. »
Le collectif demande au département qu’il « reconsidère sa position et engage un dialogue constructif avec les associations et partenaires concernés ». Il appelle « les élus locaux », « les habitants », « les partenaires » à se mobiliser le 6 février à Lille (lieu et heure à préciser).
"Pas de désengagement"
Dans un communiqué, le département souligne qu’il « ne se désengage pas ». Confronté à « des dépenses supplémentaires imposées par l’Etat sans compensation », « il ne peut plus garantir seul le financement de la mission de prévention spécialisée », explique la collectivité. Qui sollicite le soutien des communes bénéficiant des interventions pour « préserver le niveau d’intervention actuel ».
Souhaitant « garantir l’équité de l’effort communal », elle a mis en place « une analyse territoriale basée sur des indices de fragilité sociale de la jeunesse associée au potentiel financier des communes ». En moyenne, la contribution communale est sollicitée à hauteur de 21%.