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Enfance délinquante : notification du droit au silence et valeur du rapport des services éducatifs (Cour de cassation)

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FRA-PARIS-ILLUSTRATION

Le palais de justice de l'île de la Cité, à Paris

Crédit photo Riccardo Milani / Hans Lucas via AFP
Protection judiciaire de la jeunesse  Dans un arrêt rendu le 10 novembre, et avec une gymnastique juridique intéressante, la Cour de cassation rappelle que l’absence de notification au mineur de son droit au silence doit conduire à l’annulation partielle du rapport établi par les services.

L’absence de notification au mineur de son droit au silence par les services éducatif emporte l’annulation partielle du rapport correspondant, juge la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 10 novembre 2021 (n° 20-84.861).

En mai 2019, le juge des enfants met en examen un enfant de 15 ans pour vol par effraction. Quelques semaines plus tôt, un service de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) a établi un recueil de renseignements socio-éducatifs (RRSE).

Lors de ce RRSE, le mineur est interrogé sur les faits qui lui sont reprochés, mais sans que son droit de garder le silence ne lui soit notifié. Le rapport conclut finalement à l’absence de nécessité d’une mesure éducative. En novembre 2019, la chambre de l’instruction est saisie pour obtenir la nullité de la procédure, mais celle-ci rejette la demande.

La Cour de cassation juge d’abord que la chambre de l’instruction avait raison de dire que l’absence d’assistance du mineur par un avocat lors de son audition par l’agence des services de la PJJ ne pouvait pas entraîner l’annulation du RRSE. « En effet, poursuit la haute juridiction, le mineur peut être entendu hors la présence de son avocat, et sans que ce dernier ait été appelé, lorsqu’il est interrogé par l’éducateur chargé d’élaborer ce rapport, lequel n’a pas pour objet de recueillir des éléments de preuve portant sur la matérialité des faits qui lui sont reprochés. »

La haute juridiction juge cependant que la chambre de l’instruction, après avoir constaté l’absence de notification faite au mineur de son droit au silence, aurait dû « prononcer l’annulation partielle du rapport établi par les services éducatifs en cancellant les passages relatifs aux déclarations et aux réponses faites par le mineur aux questions portant sur les faits ». La chambre de l’instruction avait refusé de prononcer une irrégularité complète du RRSE pour ce motif. La Cour de cassation dit qu’elle n’a pas complètement eu tort, mais qu’elle aurait dû aller dans le détail du rapport pour en supprimer les passages litigieux. Une décision prise grâce à une gymnastique juridique.

Contraire aux intérêts du mineur

Dans une décision du 9 avril 2021, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution les dispositions de l’ordonnance du 2 février 1945, qui ne prévoyaient pas l’information donnée au mineur de son droit de se taire, par l’agent de la PJJ, lors de l’établissement du RRSE. Cette déclaration d’inconstitutionnalité a été reportée au 30 septembre 2021, et ne pouvait pas s’appliquer au RRSE élaboré dans cette affaire, le 24 avril 2019. C’est notamment sur le fondement de cette décision du Conseil constitutionnel que l’avocat de l’enfant avait pourtant établi son moyen de droit. En toute logique, la Cour de cassation devait simplement le rejeter.

Mais la haute juridiction s’est directement basée sur la Convention européenne des droits de l’homme et le code de procédure pénale, comme en témoigne son visa. Deux articles du code sont visés.

D’une part, l’article 171 du CPP qui prévoit qu’il y a nullité lorsque la méconnaissance d’une formalité prévue par le code a porté atteinte aux intérêts de la partie qu’elle concerne. D’autre part, l’article 174 du même code précise que si la chambre de l’instruction décide d’une annulation limitée, les actes ou pièces concernés doivent être cancellés.

Pour contourner l’impossibilité d’appliquer la décision du Conseil constitutionnel, la Cour de cassation s’en est donc remise à ces dispositions de procédure pénale, en écartant complètement l’application de l’ordonnance de 1945, encore en vigueur au moment des faits.

Aujourd’hui, le recueil de renseignements est encadré par les articles L. 322-1 et suivants du code de la justice pénale des mineurs (CJPM). Malgré la décision du Conseil constitutionnel, le législateur n’a toujours pas précisé que dans ce cadre, le mineur a effectivement le droit de se taire. Ce droit ne lui est notifié, dans les textes, que lors d’une audience devant le procureur de la République (CJPM, art. L. 423-6).

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