Votée au Sénat en décembre, puis remanié en profondeur par la commission des lois, la proposition de loi de la sénatrice Annick Billon (UDI) contre les violences sexuelles sur mineurs et l’inceste fixe aujourd’hui à 15 ans (et à 18 ans en cas d’inceste) l’âge en dessous duquel des actes sexuels commis par un adulte sur un mineur seront qualifiés de viol, sans devoir prouver qu’ils ont été imposés par la violence, la contrainte, la menace ou la surprise.
Toutefois, pour prendre en compte « les amours adolescentes », la loi ne s’applique que si la différence d’âge entre le mineur et le majeur est d’au moins 5 ans. De plus, le délai de prescription reste de 30 ans à partir des 18 ans de la victime, mais elle devient « glissante ou renforcée », c’est-à-dire qu’en cas de nouveaux faits commis par l’auteur sur un autre mineur, le délai de prescription de la première victime est prolongé jusqu’à la date de prescription du nouveau crime.
Des associations telles que Mémoire traumatologique et Victimologie, présidée par Muriel Salmona, soulignent des problèmes importants qui « réduisent la portée protectrice de cette loi ». Selon elles, « la restriction de la différence d’âge d’au moins 5 ans entraîne une protection moindre des mineurs de 13 et 14 ans, instituant de facto un seuil d’âge de 13 ans pour les majeurs de 18 ans et de 14 ans pour ceux de 19 ans. »
De plus, alors que 25 % des violences sexuelles sur enfants sont commises par des mineurs, aucun seuil d’âge de non-consentement n’est prévu pour les mineurs qui commettent des actes sexuels sur d’autres mineurs. En ce cas, si la contrainte n’est pas prouvée, l’enfant peut être considéré comme ayant consenti et il n’y a pas d’infraction.
Autre problème, pointé par l’Association francophone de femmes autistes (Affa) : la situation de handicap mental n’est pas prise en compte dans le seuil d’âge de 15 ans, alors même qu’un enfant concerné a cinq fois plus de risques de subir des violences sexuelles qu’un autre. Il est donc essentiel, pour l’association, qu’une personne « dont il est reconnu qu’elle a un retard mental ou une immaturité équivalant à un enfant de moins de 15 ans bénéficie de la même protection accordée aux enfants de moins de 15 ans ».
En plus de ces points, les associations réclament l’abrogation de la possibilité de déqualifier les viols en agression sexuelle, la suspension des droits de garde et de visite en cas d’allégation de violences commises par le père, la protection renforcée des professionnels de santé soumis au secret médical qui signalent des violences sur enfant, la formation de tous les experts et des professionnels « aux psychotraumatismes et à la déconstruction des stéréotypes sexistes », et une meilleure prise en compte de ces psychotraumatismes « comme éléments de preuves médico-légales lors des enquêtes.