A quelques jours du congrès de l’Uniopss (3 et 4 avril à Lyon), où seront présentes les ministres Catherine Vautrin (Santé, Travail et Solidarités) et Fadila Khattabi (Personnes âgées et personnes handicapées), son président Daniel Goldberg défend l’action des 25 000 établissements sociaux et médico-sociaux de cette union interfédérale. Il réaffirme en outre leurs besoins criants en termes de moyens financiers et humains.
ASH : Que vous inspire le reportage diffusé dimanche soir par M6 consacré aux maltraitances en matière de handicap ?
Daniel Goldberg : Nous avons bien évidemment été choqués par un certain nombre de situations. Mais j’ai aussi été gêné par l’angle de ce reportage qui semble affirmer que tout ce qui se passe en France en termes d’accueil des personnes en situation de handicap est sujet à caution et que la seule solution serait d’aller en Belgique. Même si certains faits de maltraitances sont indéfendables, un minimum d’objectivité aurait sans doute permis de dire que dans la quasi-unanimité des cas ça se passe bien.
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Ce sujet a surtout permis de montrer que la première des maltraitances reste, pour de nombreux parents, de ne pas avoir de places d’accompagnement. A l’instar de cette maman qui veut s’enchaîner devant l’ARS pour qu’on s’occupe de son fils. Le tout inclusif à l’Education nationale est un mirage, on voit bien que ça ne fonctionne pas.
Pensez-vous que le renforcement des contrôles soit la solution ?
D. G. : Il y a effectivement des situations condamnables dans un certain nombre d’endroits méritant d’être inspectés. Nous y sommes favorables, nous avions d’ailleurs participé à l’élaboration des états généraux sur cette question. Mais lorsque les établissements sont massivement en sous-réponses par rapport à leurs besoins, il ne suffit pas de les contrôler pour stopper tous les types de maltraitances. Un parallèle a été fait avec Orpea (ndlr : aujourd’hui Emeis) qui me gêne beaucoup : dans le champ du handicap, il n’y a pratiquement que des structures non lucratives. Nous ne sommes pas dans un fonctionnement institutionnel où, pour dégager des bénéfices, on rationne les encadrants ou l’alimentation des personnes. Ces situations, aussi indéfendables soient-elles, ne sont pas liées à une recherche de rentabilité. S’il n’y avait pas d’associations en France, il n’y aurait pas de politique du handicap. Les pouvoirs publics et en particulier l’Etat se reposent entièrement sur elles pour répondre aux besoins d’accompagnement des personnes en situation de handicap.
De quoi auraient besoin ces structures associatives pour améliorer leur accueil ?
D. G. : Il y a tout d’abord un manque évident de financements, à la fois pour créer les places nécessaires et pour équilibrer leur modèle économique. Les budgets ne suivent pas, notamment en ce moment avec la hausse des coûts liée à l’inflation, ce qui veut dire qu’en euros constants, les associations ont moins d’argent pour faire ce pourquoi on leur demande d’agir. On ne leur permet pas de se développer, ni même de fonctionner correctement. Sauf à dire " on ferme ! ", elles sont obligées de jouer sur leur budget. Etant des entreprises de l’économie sociale et solidaire, il n’y a pas d’actionnaires pour apporter de l’argent frais. Moi, j’accepte toutes les inspections, mais je voudrais bien aussi que l’on contrôle l’action des autorités publiques quant aux moyens qui sont donnés aux associations pour accueillir dignement.
L’autre problème majeur concerne la pénurie de personnels…
D. G. : Si on fait tous les six mois des reportages spectaculaires pour dire que tous les professionnels sont maltraitants, ça n’engage pas à venir dans ces métiers-là. D’autant qu’ils ne sont pas correctement rémunérés. Là encore, nos associations les emploient mais ce sont les autorités publiques qui donnent les ressources pour les payer. Si davantage d’argent était fléché vers la masse salariale, nous pourrions plus embaucher, à de meilleurs salaires et ainsi avoir un meilleur taux d’encadrement. Je suis d’accord avec tout ce qu’a développé la ministre Fadila Khattabi sur les contrôles, les antécédents judiciaires et le fait de faciliter la parole des victimes, mais à la seule condition de prendre également en compte le modèle économique et la pénurie des métiers. Sinon, cela revient à mettre en accusation les associations et les professionnels, à insinuer que nous serions structurellement dysfonctionnels et maltraitants.
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