La Chabraque est un lieu de vie et d’accueil (LVA) situé à Saint-Sever dans l’Aveyron. Il a été fondé en 1985 par Patrick et Marie-France Ardon, psychomotriciens puis psychothérapeutes pour enfants. La Chabraque accueille des adolescents en difficultés sociales ou familiales – des « cas sociaux » comme on dit – et les forment aux métiers du cheval.
La Chabraque, c’est aussi une belle histoire de famille, puisque Patrick et Marie-France ont transmis l’établissement à l’un de leurs fils et que leurs deux autres enfants restent très proches de ce lieu où ils ont grandi, au milieu d’adolescents qui étaient aussi leurs copains. Une inspectrice de l’Aide Sociale à l’Enfance l’a ainsi formulé un jour « Une expérience comme la vôtre n’est pas reproductible, encore moins si ce sont vos enfants qui la poursuivent. Dans l’industrie, il est normal qu’il y ait de la transmission, mais dans le social, ça ne s’est jamais vu ! ».
L’École de la Chabraque accueille des jeunes en déshérence (les chabraqueux) qui acceptent de suivre une formation : ils s’occupent de chevaux sans forcément les monter toute la journée. Au bout de deux ans, ils passent un CAP de soigneur d’équidés qu’ils obtiennent presque tous. « Être chabraqueux, explique Patrick, c’est arriver mal dans ses baskets et repartir droit. L’adolescent arrive clopin-clopant et nous allons tenter de lui expliquer la meilleure façon de marcher. Il arrive sur deux jambes qui le tiennent à peu près : l’une est un rêve de cheval, l’autre une famille désarticulée. En ce qui concerne sa jambe-cheval, il va très vite passer du rêve à la réalité, et parfois durement puisque, à Sever, on ne monte pas à cheval en randonnée, les cheveux au vent, mais sous le contrôle d’un moniteur, dans une carrière découverte et avec une bombe sur la tête. L’effet cheval va aider l’adolescent à grandir. Outre l’équitation, un puissant lien va se nouer entre le cheval et le chabraqueux. »
À la Chabraque, les adolescents se posent, tissent des liens, découvrent le cheval et se découvrent eux-mêmes. Ils sont dans « un espace intermédiaire où se trouve une famille qui n’est pas la leur mais dans laquelle ils vont rejouer leurs peines ; un centre équestre qui n’en est pas un, mais où les chevaux seront les leurs, auprès de qui ils vont se reconstruire. Un lieu magique hors du temps, hors de l’espace et d’une beauté à couper le souffle... Une transition d’un an ou de trois ans ; une transition qui fait du bien avant de repartir. »
Les 450 jeunes reçus à la Chabraque depuis 25 ans ont tous reçu un bagage en phase avec la demande du marché. Une série de stages détermine l’implication de chaque postulant. Les admis reçoivent une formation adaptée à l’école de la Chabraque, animée par 6 intervenants. Ils ont à leur portée un enseignement pratique poussé (Galop 7). L’idée est de leur permettre d’acquérir le diplôme de groom équestre qui leur permettra de soigner les montures d’un cavalier sportif de haut niveau. C’est aussi pour cela que les jeunes peuvent quitter la Chabraque avec en poche le permis poids lourd, afin de conduire en camion les chevaux de leur patron sur le lieu d’une compétition. Enfin, une plongée rapide dans l’univers professionnel : 5 mois après son arrivée, le pensionnaire participe à ses premiers concours d’équitation. Il découvre les grandes manifestations, Jumping de Cannes ou Semaine de Fontainebleau, auxquelles il « prête ses bras ». En 2e et 3e année, il travaille en alternance sous le contrôle de 15 maîtres de stage, dont le dernier sera son premier employeur. Pour l’instant le volume des offres d’emploi excède celui des demandes. Le nombre des postulants au cursus de La Chabraque s’élève en moyenne à 5 ou 6 par semaine.
NB : Les citations sont extraites de l’ouvrage de Patrick et Marie-France Ardon, La Chabraque : l’effet cheval pour aider à grandir (Éditions Eres, 2018).