▸ Isabelle Claude est éducatrice spécialisée. Pendant vingt ans, elle a travaillé auprès d’enfants polyhandicapés, autistes, atteints de déficience visuelle, malmenés par la vie. « J’ai grandi grâce à eux. Et un jour, pour m’aider à les aider, j’ai eu l’idée de les amener vers mes chevaux. Il faut dire que j’ai toujours fait du cheval, et que j’ai passé toute mon enfance à observer de près deux espèces animales : les chevaux et les fourmis ! »
A. Observer les interactions avec les chevaux
▸ Au début des années 80, on commençait à oser sortir des institutions pour personnes en situation de handicap, c’était le tout début de pratiques nouvelles qui allaient se généraliser par la suite. « Le directeur me disait qu’il ne voyait pas trop à quoi ça allait servir, mais il m’a laissé faire. Je ne voulais absolument pas faire de l’équitation avec les enfants. Mon idée, c’était de les mettre en contact avec les chevaux et d’observer quelles interactions se mettent en place. Je laissais les chevaux en liberté et je prenais des notes, beaucoup de notes. J’essayais d’établir des passerelles entre émotions humaines et émotions animales, ce qui a abouti à un premier livre : Le Cheval miroir de nos émotions. »(1)
Isabelle Claude continue à travailler en institution pendant quelque temps mais elle sent que la vie l’appelle ailleurs. « L’activité avec les chevaux occupait l’essentiel de mon temps et de mon énergie. J’ai rejoint la Fédération Handi’Cheval, qui existait depuis les années 70 et avait mis en place un petit module de formation intitulé « Cheval Handicap ». Mon travail intéressait les bénévoles d’Handi’Cheval. C’était une époque très effervescente, des projets étaient en germe partout. Pour avancer, nous (Etienne Albert, mon co-équipier, et moi) avons créé en 1997 Equit’aide, une association loi 1901, qui me donnait un cadre pour développer et facturer des prestations. J’avais des chevaux, du terrain, de l’enthousiasme. J’ai reçu des demandes de partout, des particuliers, des institutions... tout est sorti de terre en même temps ! »
B. Une nouvelle discipline
L’équicie se fonde sur l’idée qu’à partir d’une relation positive entre l’humain et l’animal, l’humain peut se dépasser et développer des potentialités insoupçonnées. Le cheval se prête particulièrement bien à ce processus. C’est un animal que l’on n’a pas chez soi, il faut aller vers lui. Son univers sensoriel particulier ouvre sur d’infinis possibles. Bien sûr, c’est aux professionnels de trouver les chevaux adaptéss, capables d’une certaine complicité ou empathie. Pour que la relation soit productive, le cheval ne doit pas être enfermé dans un box, il doit vivre dans des conditions correspondant à ses besoins, donc dans des conditions naturelles pour lui.
Il fallait définir avec précisions les compétences nécessaires et réfléchir au moyen de les acquérir. L’équicie est transdisciplinaire, un peu comme une marguerite : on prend des compétences à droite à gauche et on bâtit une nouvelle compétence. L’intervenant doit avoir des connaissances en éthologie humaine et animale, en psychologie, en physiologie et en biologie. Il doit être apte à comprendre le fonctionnement humain comme celui de l’animal. Comme prérequis, les candidats doivent avoir au minimum le Bac et le Galop 4, sachant que nous les amenons par la suite vers le Galop 6 sur le plat (nous utilisons cette référence des Galops parce qu’elle est bien identifiée). La formation en équicie peut se faire en formation initiale (3 ans, avec de nombreux stages), ou conti nue (2 ans) ou en VAE (Validation des acquis). Quelques dizaines d’intervenants diplômés sont en exercice. « Certains, qui ont des chevaux chez eux, créent leur propre structure. D’autres rejoignent des établissements du secteur médico-social qui ont déjà des chevaux et ont besoin de spécialistespour mettre en place et développer des actions de médiation équine. D’autres sont embauchés sur les bases d’un éducateur spécialisé, leur formation en équicie constituant un atout supplémentaire. »
C. Obtenir l’inscription dans la certification professionnelle
Le terme d’équicie est bien trouvé, il correspond à une pratique éprouvée. Mais de nouvelles étapes restent à franchir. « Je voulais former les autres à ce nouveau métier. Mais pas n’importe comment. Je voulais obtenir l’inscription dans la certification professionnelle, pour que la formation soit reconnue et utilisable. Ce fut le début d’un long parcours. Mais je suis pugnace ! »
Isabelle Claude prend contact avec la Commission Nationale de la Certification Professionnelle.
« J’avais déjà pas mal de pratique et d’expérience, cela m’a beaucoup aidée. J’ai construit pas à pas la formation, rangeant et structurant toutes les connaissances acquises au fil des années, ne conservant que ce qui me semblait utile pour l’exercice du métier. Il fallait définir avec précisions les compétences nécessaires et réfléchir au moyen de les acquérir. Le métier d’équicien est transdisciplinaire, c’est comme une marguerite : on prend des compétences à droite à gauche et on bâtit une nouvelle compétence. L’équicien doit avoir des connaissances en éthologie humaine et animale, en psychologie, en physiologie et en biologie. Il doit être apte à comprendre le fonctionnement humain comme celui de l’animal. Comme pré-requis, les candidats doivent avoir au minimum le Bac et le Galop 4, sachant que nous les amenons par la suite vers le Galop 6 sur le plat (nous utilisons cette référence des Galops parce qu’elle est bien identifiée). »
D. Le contenu des enseignements
Objectifs :
Préparer des futurs professionnels de l’équicie à :
▸ Accueillir les publics en situation de handicap et ou de fragilité
▸ Accompagner des actions individualisées dans le champ de la médiation animale
▸ Réaliser des projets et évaluations
▸ Préparer, comprendre et assurer le bien-être des équidés
▸ Gérer une équipe
▸ Créer et gérer une structure d’équicie
Contenus :
L’enseignement est rythmé par des cours théoriques, des travaux dirigés et des travaux pratiques, la réalisation de protocoles, l’analyse et la mise en situation pédagogique, à cheval et à côté du cheval, et l’observation d’ateliers.
▸ Pratiques avec le cheval : les fonctions du pansage - la sécurité à cheval – les interactions avec le cheval et entre chevaux...
▸ L’accompagnement individuel : le rôle du cheval, de l’accompagnant, de l’équicien - responsabilité, sécurité, cadre – abord du cheval avec une personne à mobilité réduite, les montoirs, le matériel.
▸ Approches des pathologies : le développement de la personne - situations de déficiences, psychopathologies, handicap social, moteur, polyhandicap...
▸ Mise en situation pédagogique : les fonctions du cheval – le rôle du cheval en équicie
▸ Les bases de l’éthologie équine : mode de vie, alimentation, relations sociales du cheval - la perception et le tempérament du cheval - la relation homme/cheval
▸ Éthologie et apprentissages : éthogramme – la relation mère/poulain – élevage, apprentissages, renforcements, bien être/mal être – la locomotion et la biomécanique
▸ Communication humaine et animale : les fondements de la communication - la communication inter espèce – la dynamique de groupe, l’analyse transactionnelle, la relation d’aide
▸ Approfondissement de pathologies : psychopathologies, handicaps moteurs, déficiences sensorielles, handicap social et le cheval - le développement de la personne handicapée
▸ Accompagnement collectif et pédagogies : méthodologie de projet - la médiation et la relation d’aide - l’adaptation pédagogique en fonction des handicaps - le concept « cheval miroir »
▸ Législation et administration : la méthodologie administrative - cadres juridiques, droits et obligations budget - étude de faisabilité
(1)
CLAUDE, Isabelle, Le cheval, miroir de nos émotions, Éditions D.F.R, 2010