La faute de la personne accueillie dans l’exécution du contrat d’accueil peut-être le fait soit de la personne accueillie elle-même, soit de son représentant. Dans la jurisprudence, cette faute a principalement pour objet le non-respect du délai de prévenance au moment du départ de la personne accueillie du domicile de l’accueillant familial.
A. La faute personnelle
La dégradation des conditions d’accueil, notamment au regard du non-respect des capacités d’accueil fixées dans l’arrêté d’agrément et des conditions d’hébergement en chambre de passage, ne peut justifier un départ sans préavis de la personne accueillie qui, par suite, est condamnée au paiement du préavis réclamé(1).
À l’inverse, le moyen tiré de l’exception d’inexécution de ses obligations contractuelles par l’accueillant familial a été admis dans une espèce où l’accueillante s’était absentée durant 44 jours, alors que dans le respect des dispositions contractuelles elle ne pouvait s’absenter que 10 jours, laissant pour la remplacer deux personnes non qualifiées sans que le président du Conseil départemental puisse exercer à leur égard le contrôle prévu par l’art. L. 441-2 du CASF ni que leur présence constante auprès des personnes accueillies ne puisse être vérifiées – ces dernières, qui présentaient pour l’une, des lésions cutanées au visage et pour l’autre un début d’escarre, ayant par ailleurs fait l’objet d’un transfert en urgence en EHPAD durant cette absence(2).
Le délai de préavis contractuel doit être respecté par la personne accueillie à moins d’un non renouvellement de l’agrément délivré à l’accueillant familial ou de son retrait ou d’un cas de force majeure.
Dans une affaire où un médecin avait estimé que l’hébergement en accueil familial de son patient n’était plus adapté face à ses troubles cognitifs de sorte qu’il devrait être placé en EHPAD, le juge a considéré que rien n’établissait que le délai de prévenance ne pouvait pas être respecté, dès lors qu’aucune urgence n’était signalée ni aucun délai à très court terme imposé pour ce changement de structure d’accueil. Plus précisément, le juge a estimé que le diagnostic de troubles cognitifs établi par le médecin ne permettait pas, à lui seul, de caractériser un événement de force majeure, le diagnostic ne permettant pas de considérer que l’état de santé de la personne âgée accueillie exigeait que des soins soient immédiatement et impérativement dispensés dans un établissement adapté(3).
Cette faute dans l’appréciation de la définition juridique de la force majeure peut également être le fait du représentant de la personne accueillie.
B. La faute du représentant
La force majeure ne peut s’apprécier au sens de l’art. 1218 du Code civil que dans la personne du débiteur, soit le majeur protégé uniquement et non son représentant. En ce sens, une UDAF, à laquelle avait été confié l’exercice du mandat de tutelle de la personne accueillie, n’a pu valablement faire valoir la fugue de cette dernière comme un cas de force majeure pour faire échec au versement d’une indemnité compensatrice à la suite de la rupture sans préavis du contrat d’accueil. En l’espèce, le juge avait également rappelé que la personne accueillie – qui était le cocontractant de l’accueillant familial – pouvait exercer un recours récursoire contre son tuteur qui l’avait engagée dans une procédure de rupture contractuelle hasardeuse et préjudiciable(4).
Dans un autre registre, le refus du curateur de signer le contrat d’accueil familial correspondant à la situation de sa protégée est constitutif d’une faute engageant sa responsabilité à l’égard de l’accueillante familiale(5).
L’inexécution de ses obligations par la personne accueillie fait l’objet d’une appréciation objective par le juge. Il s’ensuit que le fait qu’elle ait eu un ressenti négatif et que cela ait eu une incidence sur son état psychologique, lequel avait été constaté par son médecin, ne justifie pas qu’elle rompe le contrat d’accueil sans respecter le délai de prévenance, quoiqu’elle ait formulé des doléances auprès du cabinet infirmier et que les infirmiers aient constaté sa tristesse. En l’espèce, pour le juge, la dégradation de l’état psychologique de la personne accueillie a pu avoir des causes diverses qui n’étaient pas nécessairement imputables à une attitude fautive de l’accueillant familial. Elles pouvaient ainsi provenir du litige qui existait entre les parties sur la tarification et qui aurait été mal ressenti, d’une incompatibilité d’humeur entre les parties ou de tout autre cause sur laquelle les parties ne se seraient pas expliquées(6).
L’inexécution suffisamment grave de ses obligations contractuelles par l’une des parties permet à l’autre de résilier(7) unilatéralement le contrat d’accueil par voie de notification. Cette résiliation s’opère cependant à ses risques et périls(8) dans la mesure où, en cas de contestation judiciaire de cette résiliation, le juge pourrait considérer que la gravité du comportement reproché au cocontractant n’était pas d’une gravité suffisante pour justifier qu’il soit mis fin de façon unilatérale au contrat d’accueil. Aussi, en cas de litige entre l’accueillant familial et la personne accueillie, le recours à une personne qualifiée ou au tiers régulateur pour assurer une médiation devrait être privilégié à l’action individuelle de l’une ou l’autre des parties.
(1)
CA de Paris – Pôle 04 chambre 09, 24 mars 2022, n° 19/09406.
(2)
CA de Paris – Pôle 04 chambre 09, 15 janvier 2015, n° 12/13788.
(3)
CA de Toulouse – chambre 01 section 01, 25 mai 2020, n° 18/02484.
(4)
CA de Lyon – chambre 08, 24 novembre 2020, n° 20/06935.
(5)
CA de Bordeaux – chambre civile 01 section B, 14 mars 2013, n° 10/05944.
(6)
CA de Bordeaux – chambre civile 01, 23 novembre 2017, n° 16/04807.
(7)
Art. 1229 al. 3 du Code civil.
(8)
Art. 1226 al. 1 du Code civil.