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DROIT ET PROTECTION DU MINEUR

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A. Droits du mineur



1. – LE MINEUR : SUJET DE DROIT

Comme précisé ci-avant, la naissance a pour effet de conférer la personnalité juridique à la personne. Néanmoins, pour le mineur, cette personnalité n’est pas entière puisqu’il est en état d’incapacité : « incapacité d’exercice » – il dispose de droits et prérogatives propres et théoriques puisque sujet de droit depuis la naissance, mais il ne peut les exercer lui-même (ex. : signer un contrat de bail, rédiger un testament avant 16 ans...) – et « incapacité de jouissance » – il ne dispose pas encore de certains droits légaux du fait de son âge (ex. : droit de vote...). Seule l’atteinte légale de la majorité rassemble capacité de jouissance et capacité d’exercice.
En tout état de cause, même avec une capacité réduite, des conséquences civiles découlent de la personnalité juridique et de la qualité de sujet de droit : création d’un patrimoine propre et unique, rassemblant droits et obligations, établissement d’une filiation, bénéfice d’une vocation successorale, acquisition du droit au nom, au domicile, et vis-à-vis de ses parents, droit à être éduqué, nourri, soigné, scolarisé, de voir sa sécurité, sa moralité et sa dignité protégées, droit, sous la surveillance de ses représentants légaux, à la liberté d’expression, de pensée, de conscience, droit d’avoir un compte bancaire ou un livret d’épargne, quand bien même l’usage qu’il peut en faire est limité mais connaît une progression au fur et à mesure de son avancée en âge, droits spécifiques lors de procédures judiciaires le concernant...
Le droit pénal lui octroie des droits spécifiques, axés vers sa protection qu’il soit victime ou agent d’une infraction (v. ci-après).
Mais d’autres codes manifestent également leur prise en compte. Ainsi du Code du travail, qui réglemente le travail du mineur, le statut de l’apprentissage.... Ainsi du Code de la sécurité sociale, qui régit la qualité d’ayant droit en matière de protection sociale vis-à-vis des parents, c’est-à-dire qu’il bénéficie du régime d’assurance maladie de ces derniers jusqu’à au moins l’âge de seize ans... (v. sur l’enfant en général, F. Dekeuwer-Défossez, Les droits de l’enfant, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2018).


2. – LA CONVENTION INTERNATIONALE SUR LES DROITS DE L’ENFANT (CIDE)

Adoptée le 20 novembre 1989, ratifiée par la France et entrée en vigueur dans notre ordre juridique un an après, la CIDE a une portée considérable.

a. Contenu des droits reconnus

Le texte s’articule autour des principes de non-discrimination, d’intérêt supérieur de l’enfant, de droit inhérent à la vie, à la survie et au développement et du respect des opinions de l’enfant. Doté de 54 articles, des droits d’ordre civil, politique, économique, social et culturel sont applicables aux enfants, notamment :
  • le droit d’avoir un nom, une nationalité, une identité ;
  • le droit de vivre en famille, d’être entouré et aimé ;
  • le droit d’être soigné, protégé des maladies et d’avoir une alimentation suffisante et équilibrée ;
  • le droit à l’éducation ;
  • le droit d’être protégé de la violence, de la maltraitance et de toute forme d’abus et d’exploitation ;
  • le droit de ne pas faire la guerre, ni de la subir ;
  • le droit d’avoir un refuge et d’être secouru, et d’avoir des conditions de vie décentes ;
  • le droit de jouer et d’avoir des loisirs ;
  • le droit à la liberté d’information, d’expression et de participation.
La CIDE est un texte international contraignant pour les États l’ayant ratifié ; ils sont directement responsables du respect effectif des droits contenus dans le texte.
Les Hautes juridictions françaises que sont le Conseil d’État, en 1993, puis la Cour de cassation, après 2005, ont estimé que plusieurs dispositions de la CIDE étaient directement applicables devant les juridictions et que les particuliers pouvaient les invoquer. En outre, le Conseil constitutionnel a érigé l’exigence d’intérêt supérieur de l’enfant au rang de principe constitutionnel en mai 2013, et plus encore en mars 2019 : « La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. Elle garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Il en résulte une exigence de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant » (Cons. const., 21 mars 2019, n° 2018-768 QPC), contribuant à la sacraliser un peu plus dans l’ordre juridique.

b. Inspiration de la loi française tirée de la CIDE

La France a adopté une attitude de respect général des dispositions de la CIDE, en légiférant régulièrement à la lumière de ses prescriptions.
Ainsi la loi n° 93-22 du 8 janvier 1993 sur la famille et les droits de l’enfant a-t-elle doté le mineur capable de discernement de droits propres, notamment dans l’expression de sa parole lors de procédures le concernant, des droits placés sous l’autorité de la notion d’« intérêt de l’enfant », dont l’expression est récurrente dans la loi, dans le droit fil de la CIDE et du principe susvisé de respect des opinions de l’enfant. Dans le même esprit, la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale a intégré expressément l’intérêt de l’enfant dans la définition même de l’autorité parentale : « L’autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant » (C. civ., art. 371-1).


B. Protection juridique du mineur d’un point de vue civil



1. – MÉCANISMES CIVILS GARANTISSANT LA PROTECTION DU MINEUR DANS SES INTÉRÊTS (MORAUX, MATÉRIELS...)

a. Protection du mineur et règles d’incapacité

Comme déjà souligné, le mineur est en état d’incapacité : incapacité d’exercice et incapacité de jouissance, et ce, jusqu’à la majorité. L’explication réside dans le souhait légal de le protéger, car non censé détenir un discernement suffisamment mûr et solide. Relevons quelques nuances.
Une incapacité générale du jeune enfant. – L’activité juridique du jeune enfant est quasi nulle. Le non-discernement justifie cette incapacité générale. Il est estimé qu’il ne saurait prendre la mesure d’actes qu’il serait amené à prendre par lui-même. Seuls les représentants légaux ont compétence pour accomplir les actes le concernant, donner les autorisations et accords nécessaires (ex. : s’inscrire dans un établissement scolaire, demande d’établissement de pièces d’identité ...). En pratique, un enfant de 5 ans est autorisé à acheter des produits de consommation courante, et pour un prix modique, au profit de ses parents, sauf exceptions telles que l’impossibilité d’acheter du tabac chez un buraliste... La notion d’« actes de la vie courante » n’étant pas définie par le droit, il revient au juge de se livrer à des appréciations au cas par cas. Les actes passés malgré tout en méconnaissance des règles de l’incapacité absolue sont sanctionnés par la nullité absolue.
À noter. Le mineur peut à tout âge et seul porter plainte, demander à obtenir l’aide juridictionnelle – délaissé ou non –, demander à être entendu par un juge lors d’une procédure civile – JAF, juge des enfants s’il est en danger... –, témoigner ou être entendu lors d’une procédure pénale, saisir le Défenseur des droits d’une réclamation, adhérer à une association...
Une capacité progressive au profit de l’adolescent. – Bien que demeurant atteint d’incapacité juridique, le jeune – pré-ado... – peut, à partir d’un certain âge, multiplier les actes. Il est considéré que l’adolescent est conscient de certains de ceux-ci. La loi l’autorise à accomplir seul certains actes, dans une logique de gradation des responsabilités, l’âge de 16 ans étant un point fixe prévu par la loi. Sans être exhaustif, on relèvera : l’opération du recensement citoyen, la participation à la création d’une association et être chargé de son administration, à la direction d’une maison des lycéens, les actes de maîtrise de grossesse non désirée – moyens de contraception, accouchement sous X, les actes liés à la santé et à la protection sociale –, l’immatriculation à la sécurité sociale avec obtention d’une carte Vitale personnelle, le choix d’un médecin traitant...
En dehors de ces cas, le mineur d’au moins 16 ans peut faire de multiples demandes car les possibilités s’ouvrent – travail, formation, comptes bancaires... –, l’accord des représentants légaux étant cependant toujours requis.
Hypothèse de l’émancipation. – L’émancipation est l’acte par lequel un mineur est juridiquement assimilé à un majeur, soit 18 ans, et peut accomplir seul les actes autorisés par la majorité légale. Il convient d’atteindre l’âge de 16 ans révolus pour prétendre obtenir le statut de mineur émancipé. Une fois émancipé, le mineur n’est plus sous l’autorité de ses parents et a la capacité juridique pour tous les actes de la vie juridique (ex : conclusion d’un contrat de bail, de crédit, de travail...). Cet acte intervient sur décision du juge des tutelles – acte judiciaire – à la demande de son ou ses parents, ou, en cas de tutelle du mineur, du conseil de famille. En tout état de cause, un mineur devient émancipé automatiquement par le mariage, quel que soit son âge, la dispense pour se marier avant 18 ans étant accordée par le procureur de la République pour des motifs graves et avec le consentement des parents.
Attention, le mineur émancipé ne peut pas se marier ou consentir à son adoption sans le consentement de ses parents.

b. Protection des mineurs dans l’administration de ses biens

La loi civile prend le parti de protéger les biens du mineur, toujours au nom d’un discernement non complet, dont l’intérêt propre et l’avenir même sont pris en considération. Ces biens sont administrés selon la logique et les règles qui suivent.
L’administration légale, entendue comme l’ensemble des pouvoirs portant sur les biens d’un mineur, appartient aux parents. Si l’autorité parentale est exercée en commun par les deux parents, chacun d’entre eux est administrateur légal. Dans les autres cas, l’administration légale appartient à celui des parents qui exerce l’autorité parentale. En cas d’exercice en commun de l’administration légale par les deux parents, chacun d’eux est réputé, à l’égard des tiers, avoir reçu de l’autre le pouvoir de faire seul les actes d’administration portant sur les biens du mineur. Quoi qu’il en soit, chaque administrateur légal est tenu d’apporter dans la gestion des biens du mineur des soins prudents, diligents et avisés, dans son intérêt exclusif.
En cas de divergence entre les intérêts des administrateurs légaux et ceux du mineur, les premiers peuvent demander la nomination d’un administrateur ad hoc par le juge des tutelles.
Dans l’attente de la majorité, la jouissance légale des biens en jeu est le droit pour les parents, en tant qu’administrateurs légaux des biens de leur enfant mineur – ou à celui d’entre eux qui a la charge de l’administration –, de s’approprier les revenus du patrimoine de l’enfant jusqu’à ce qu’il ait 16 ans accomplis, sans avoir à en rendre compte, à charge de satisfaire à son éducation et son entretien. Ce droit disparaît aux 16 ans accomplis et pour les causes mettant fin à l’autorité parentale. Attention, la jouissance légale ne concerne pas les biens que l’enfant peut acquérir par son travail ou ceux qui lui sont donnés ou légués.
L’administrateur légal ne peut, sans l’autorisation préalable du juge des tutelles, réaliser certains actes, en fait des actes sensibles et pouvant emporter atteinte aux biens et intérêts de l’enfant : vendre un immeuble ou un fonds de commerce appartenant au mineur, contracter un emprunt au nom du mineur... Pire, il ne saurait, y compris avec une autorisation, aliéner gratuitement les biens ou les droits du mineur, exercer le commerce ou une profession libérale au nom du mineur...

c. Protection des mineurs et autorité parentale

L’autorité parentale englobe l’ensemble des droits et des devoirs incombant aux parents envers leur enfant mineur devant être protégé. L’intérêt supérieur de l’enfant fait office de boussole juridique et doit irriguer les domaines de sa santé, de son éducation, de sa moralité... L’autorité parentale peut être exercée conjointement par les deux parents ou par un seul parent.
Contenu et exercice de l’autorité parentale. – Les « devoirs » à la charge des parents doivent contribuer à la protection et au développement général de l’enfant, visant les domaines de la sécurité, de la santé, de la moralité, de l’éducation – intellectuelle, professionnelle, civique... – sans compter l’administration des biens du mineur.
Il s’agit bien d’un entretien matériel et moral quotidien, censé préparer son entrée future dans la vie d’adulte : nourrir, ou obligation alimentaire, héberger, surveiller relations et déplacements, prendre des décisions d’ordre médical, scolariser...
L’« exercice » de ladite autorité est le fait des parents, une fois les liens de filiation établis (v. supra sur la filiation et les différents modes d’établissement, engendrant la qualité de titulaire de l’autorité parentale), indépendamment du type d’union de ceux-ci : mariage, Pacs, concubinage, et malgré les faits de séparation et de divorce, car l’autorité parentale demeure le principe y compris en cas de retour à l’état de célibataire, de famille recomposée... En réalité, ils cumulent « titularité » et « exercice » de l’autorité ; dans certaines hypothèses, l’exercice peut ne plus être effectif, laissant intacte la titularité ; titularité et exercice peuvent également tomber, dans le cas du retrait – v. infra pour ces hypothèses du mineur en danger potentiel.
Le principe est l’exercice conjoint – hors délégation ou retrait –, qui se décline comme suit. Pour les « actes usuels », un seul parent peut les accomplir, sans l’accord de l’autre parent (ex. : établissement d’une carte d’identité, autorisation de sortie scolaire, pratique d’activités sportives... ; ces actes n’engagent pas l’avenir de l’enfant ni ne mettent en cause ses droits fondamentaux, ou s’inscrivent dans une pratique antérieure établie par les parents et non contestée par l’un deux et ne rompent pas avec le passé), le parent agissant étant présumé avoir reçu l’accord de l’autre, sans qu’il y ait besoin de rapporter la preuve du consentement de l’autre parent. Pour les « actes non usuels », l’accord des deux parents est nécessaire (ex. : choix d’interrompre la scolarité à 16 ans, première inscription de l’enfant dans un établissement scolaire [public ou privé], choix du baptême religieux... ; ces actes font rupture avec le passé de l’enfant, ou engagent l’avenir de l’enfant).
Le principe est que chacun des parents doit contribuer à l’entretien de l’enfant en fonction de ses ressources et de celles de l’autre parent, et au vu des besoins de l’enfant.
À noter. Les responsabilités engendrées par l’acquisition de l’autorité parentale ont pour corollaire l’engagement légal de la responsabilité civile des parents du fait de leurs enfants, autre marque de la prise de l’intérêt du mineur, au discernement non identique à celui du majeur (v. déjà supra). Selon l’article 1242 du Code civil : « On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde. (...). Le père et la mère, en tant qu’ils exercent l’autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux. »
Modification dans l’expression et/ou fin de l’autorité parentale. – L’autorité parentale peut rencontrer vicissitudes et autres remises en question. Elle peut être l’objet d’une délégation, volontaire (ex. : éloignement, maladie, prison...) ou forcée (ex. : délaissement parental...), qui suspend l’exercice mais non la titularité, d’un retrait (ex. : mauvais traitements, condamnation pour crime ou délit), qui porte jusque sur la titularité.
Celle-ci connaît en tout cas son terme à la majorité de l’enfant, par l’émancipation, à l’évidence en cas de décès d’un parent.


2. – MÉCANISMES CIVILS GARANTISSANT LA PROTECTION DU MINEUR POTENTIELLEMENT EN DANGER

a. Cadre de la famille absente : la tutelle

L’hypothèse est celle de l’impossibilité d’exercice de l’autorité parentale par ses titulaires que sont les parents. Ainsi, si les parents sont décédés, ou non connus, sont frappés tous les deux d’un retrait de l’autorité parentale, le mineur est placé sous le régime de la tutelle. Dans un souci de protection accrue, le juge met ainsi en œuvre un dispositif spécifique de tutelle, en le contrôlant, prenant en charge les intérêts du mineur : un tuteur, chargé de prendre soin du mineur au quotidien (choisi parmi les ascendants de préférence) ; un subrogé tuteur (si possible de la famille), surveillant la gestion du tuteur, l’assistant pour certains actes, en lien avec le juge des tutelles, compétent pour constater le bon fonctionnement de l’ensemble ; un conseil de famille (choisi si possible au sein de la famille), prenant des décisions relatives à l’entretien et à l’éducation, d’ordre budgétaire...
Il importe de rappeler dans ce cadre de famille absente le cas des pupilles de l’État. Il s’agit d’un enfant mineur ayant perdu tout lien avec ses parents ou avec sa famille. Confié aux services du département et accueilli principalement en pouponnière – pour les enfants en bas âge – ou en famille d’accueil, le pupille de l’État peut également faire l’objet d’une adoption.

b. Cadre d’une famille défaillante dans ses devoirs

De la simple prévention à la réponse judiciaire, dotée d’un large éventail d’outils civils, la protection d’un mineur aux prises avec une famille défaillante quant à ses responsabilités parentales s’effectue de manière progressive, en fonction du degré de danger encouru.
Protection et mesures préventives. – Afin de prévenir les défaillances des parents dans leurs devoirs parentaux, de divers ordres, les pouvoirs publics mettent en œuvre légalement des dispositifs très nombreux (ex. : soutien à la parentalité...). L’État est le premier des acteurs institutionnels, via ses politiques publiques. Le département est la collectivité territoriale qui dispose cependant de la compétence de droit commun en la matière, abritant les services de l’aide sociale à l’enfance, de la protection maternelle et infantile et de l’aide sociale, compétents pour une assistance et une protection administrative.
Nous sortons ici de l’approche purement civile pour déborder sur le droit de l’action sociale et des familles, que nous mentionnons en fin de document pour illustrer le glissement des branches du droit vers les vulnérabilités. Citons tout de même l’article L. 221-1 du CASF au titre des compétences de l’aide sociale à l’enfance : « Apporter un soutien matériel, éducatif et psychologique tant aux mineurs et à leur famille ou à tout détenteur de l’autorité parentale, confrontés à des difficultés risquant de mettre en danger la santé, la sécurité, la moralité de ces mineurs ou de compromettre gravement leur éducation ou leur développement physique, affectif, intellectuel et social, qu’aux mineurs émancipés et majeurs de moins de vingt et un ans confrontés à des difficultés familiales, sociales et éducatives susceptibles de compromettre gravement leur équilibre (...). »
Protection et mesures judiciaires : contrôle de l’autorité parentale. – Ce niveau d’intervention dépasse le traitement strictement administratif de la question ; il est recouru à l’intervention d’un juge aux fins de décisions venant perturber le schéma et le fonctionnement de l’autorité parentale, sans remise en question de cette dernière dans ses fondements. Deux types de mesures judiciaires figurant dans le Code civil entendent contrôler l’exercice de cette dernière.
D’une part, la « mesure d’assistance éducative ». Le juge des enfants, saisi notamment par l’enfant lui-même, ses parents, l’aide sociale à l’enfance, un tuteur ou une famille d’accueil ou à son initiative, peut prendre des mesures d’assistance éducative (ex. : mesure de suivi et d’aide à la famille, avec maintien dans sa famille, et recours à une personne qualifiée ou un service spécialisé pour aider la famille ; mesure de placement en cas de danger plus palpable pour le mineur, la loi et la pratique s’efforçant de ne pas couper autant que possible l’enfant de son milieu naturel).
D’autre part, la « mesure judiciaire d’aide à la gestion du budget familial ». Ne touchant pas aux attributs de l’autorité parentale, le juge des enfants, saisi par les parents, la personne à qui sont versées les prestations ou autres, peut prendre une mesure judiciaire d’aide à la gestion du budget familial dans l’objectif de garantir une bonne gestion des prestations familiales dans l’intérêt et pour les besoins de l’enfant, d’accompagner les parents dans la protection des besoins leurs enfants pour les dépenses alimentaires, de logement, de santé, d’éducation et d’entretien général.
Protection et mesures judiciaires : remise en cause des attributs de l’autorité parentale. – L’autorité parentale n’est alors plus seulement mise sous surveillance ou accompagnée, elle connaît une atteinte dans ses expressions, aux degrés de gravité différents.
D’une part, la « délégation de l’autorité parentale ». Prononcée par le JAF, la délégation peut être « volontaire », à la demande des parents, ensemble ou séparément, en cas de maladie, d’hospitalisation, d’incarcération, de difficultés relationnelles avec le mineur ; elle est toujours modifiable, en fonction des circonstances. Le placement n’est pas obligatoire, mais l’exercice de l’autorité est le fait d’un membre de la famille, d’un tiers de confiance, d’un établissement agréé accueillant des enfants. Il n’y a pas perte de la titularité mais exercice modifié, en tout ou partie. La délégation peut être « forcée », à la demande d’un membre de la famille, de la personne ou de l’établissement qui a recueilli l’enfant, du procureur de la République, après enquête sociale. Le fait générateur peut consister dans le délaissement parental – celui-ci nécessitant une déclaration judiciaire – ou dans l’impossibilité pour les parents de faire face à leurs responsabilités. La décision du JAF, modifiable en cas de nouveaux éléments, a pour effet le transfert partiel ou total de l’exercice de l’autorité parentale.
D’autre part, le « retrait de l’autorité parentale », aux effets plus sévères – mais répondant également à des faits plus graves – que la délégation. Deux hypothèses se présentent. L’une a trait à la « mise en danger ou au désintérêt envers l’enfant » par les parents : en dehors de toute condamnation pénale, soit en cas de mauvais traitements – maltraitance psychologique... –, soit du fait d’une consommation habituelle et excessive d’alcool ou d’un usage de stupéfiants, soit en raison d’inconduite notoire ou de comportements délictueux, notamment lorsque l’enfant est témoin de pressions ou de violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre, soit pour défaut de soins ou manque de direction, mettant manifestement en danger la sécurité, la santé ou la moralité de l’enfant ; également lorsqu’une mesure d’assistance éducative avait été édictée à l’égard de l’enfant et que les père et mère, pendant plus de deux ans, se sont volontairement abstenus d’exercer les droits et de remplir leurs devoirs. L’action peut être le fait du ministère public, d’un membre de la famille ou du tuteur de l’enfant, ou de l’aide sociale à l’enfance auquel l’enfant est confié.
L’autre cas de retrait intervient quand les parents ou l’un d’eux parent sont condamnés comme auteurs, coauteurs ou complices d’un crime ou d’un délit commis sur le mineur ou l’autre parent, ou par le mineur lui-même. C’est la juridiction de jugement qui rend ce type de décision parallèlement aux sanctions pénales attribuées.
Le retrait peut viser les deux parents ou l’un d’eux, être partiel ou total, soit tous les droits concernés par l’autorité parentale, s’étendre à tous les enfants déjà nés au moment du jugement ; le mineur peut être remis provisoirement à un tiers qui se chargera de la tutelle ou à l’aide sociale à l’enfance. Les droits retirés sont restituables, à la condition de justifier de profonds changements rendant possibles de bonnes conditions de vie de l’enfant dans son intégrité morale et physique.
Ce n’est plus simplement l’exercice de ce droit mais la titularité du droit qui est en jeu.


C. Protection juridique du mineur d’un point de vue pénal

En plus de la matière civile, le mineur est également protégé par la matière pénale. Qu’il soit victime d’une infraction ou lui-même auteur, son âge, facteur de vulnérabilité, explique le traitement réservé par la loi dans la préservation de ses intérêts.


1. – LE MINEUR VICTIME D’UNE INFRACTION

a. Protection et infractions spécifiques à l’autorité parentale

L’autorité parentale est la prérogative majeure des parents, synonyme de protection globale du mineur dans ses intérêts vitaux. Des infractions spécifiques à l’exercice de celle-ci sonnent comme autant d’atteintes aux droits de l’enfant.
On répertorie dans le Code pénal les infractions suivantes, la tentative étant à chaque fois également punissable :
  • non-représentation de mineur (délit) : « fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer » ; en d’autres termes, il s’agit du fait de ne pas remettre l’enfant au titulaire d’un droit de visite ou de garde – éloignement de l’enfant –, ou de ne pas ramener l’enfant après un droit de visite. Il est ajouté le cas de non-notification du changement de domicile à la suite d’un déménagement d’un parent ayant la garde de l’enfant, l’autre bénéficiant du droit de visite et d’hébergement ;
  • soustraction de mineur (délit) : cette infraction consiste, par tout ascendant, à soustraire un enfant mineur des mains de ceux qui exercent l’autorité parentale ou auxquels il a été confié ou chez qui il a sa résidence habituelle, cette même infraction pouvant être commise, et plus lourdement sanctionnée, par une autre personne que l’ascendant.

b. Protection et infractions spécifiques en matière de santé, de moralité et de sécurité

Au titre des « atteintes aux mineurs et à la famille » prévues par le Code pénal, on identifie plusieurs infractions spécifiques commises contre le mineur, sous les rubriques suivantes.
Délaissement du mineur. – Ce délit consiste en l’addition du fait de laisser seul le mineur sans s’assurer qu’il soit pris en charge par un tiers et du fait de se défaire matériellement de l’enfant sans esprit de retour, de se soustraire à ses obligations liées à l’autorité parentale. Il devient crime si le délaissement entraîne mutilation ou infirmité permanente, ou le décès.
Abandon de famille. – Ce délit réside dans le fait de ne plus remplir ses obligations familiales pendant plus de deux mois (ex. : versement de la pension alimentaire...), précisément la non-exécution d’une obligation alimentaire prévue par une décision telle qu’un jugement de divorce. Si l’intermédiation financière des pensions alimentaires – service public jouant le rôle d’intermédiaire entre les parents séparés, collectant la pension alimentaire tous les mois auprès du parent qui paie la pension pour la reverser à l’autre parent – est mise en œuvre, le fait pour le parent débiteur de demeurer plus de deux mois sans s’acquitter intégralement des sommes dues entre les mains de l’organisme débiteur des prestations familiales assurant l’intermédiation est punissable à ce titre.
Mise en péril de la santé et de la moralité des mineurs. – La loi prévoit plusieurs délits, pouvant devenir crimes en cas de circonstances aggravantes :
  • fait, par un ascendant ou toute autre personne exerçant à son égard l’autorité parentale ou ayant autorité sur un mineur de 15 ans, de priver celui-ci d’aliments ou de soins au point de compromettre sa santé ; est en outre une privation de soins le fait de maintenir un enfant de moins de 6 ans sur la voie publique ou dans un espace affecté au transport collectif de voyageurs, dans le but de solliciter la générosité des passants – crime si décès – ;
  • fait pour les parents de se soustraire, sans motif légitime, à ses obligations légales au point de compromettre la santé, la sécurité, la moralité ou l’éducation de son enfant mineur ;
  • fait pour les parents d’un enfant ou toute personne exerçant à son égard l’autorité parentale ou une autorité de fait de façon continue, de ne pas l’inscrire dans un établissement d’enseignement, sans excuse valable ;
  • fait de provoquer directement un mineur à faire un usage illicite de stupéfiants ; également le fait de provoquer directement un mineur à transporter, détenir, offrir ou céder des stupéfiants ;
  • fait de provoquer directement un mineur à la consommation excessive et/ou habituelle d’alcool ;
  • fait de provoquer directement un mineur à commettre un crime ou un délit.
Violences physiques. – À l’instar de tout un chacun, le mineur expose également son intégrité physique, sous l’effet de nombreux comportements qualifiés d’infractions. La minorité, et partant sa vulnérabilité, est cependant prise en considération, au titre de la protection apportée à sa personne, pour la définition de certaines peines. Ainsi, en comparaison avec le sort des personnes majeures, les peines encourues sont plus lourdes, par exemple, notamment pour les mineurs de 15 ans, en cas de violences, coups et blessures, meurtre, actes de torture et de barbarie...
Infractions sexuelles commises contre les mineurs. – Considérés comme des transgressions majeures, abus et agressions d’ordre sexuel encourent la sanction pénale – les peines encourues sont nombreuses, elles ne sauraient ici être citées dans leur intégralité. On identifie en fait, d’une part, des infractions d’ordre sexuel non spécifiques aux mineurs (ex. : viols, agressions sexuelles, inceste, exhibition sexuelle et harcèlement sexuel) mais qui sont punissables plus lourdement en présence de mineur, l’âge de ce dernier constituant une circonstance aggravante, et, d’autre part, des infractions spécifiques aux mineurs, allant du délit au crime, emportant une gradation des peines. Elles peuvent se résumer ainsi pour l’ensemble des mineurs, avec une frontière constituée par l’âge de 15 ans, les peines étant plus fortes en deçà de celui-ci, certaines circonstances aggravantes pouvant encore alourdir les peines (ex. : infraction sexuelle commise par un ascendant, usage d’une arme, infraction commise par plusieurs personnes, en bande organisée...) :
  • corruption d’un mineur, imposant, y compris par Internet, à un mineur des propos, des actes, des scènes ou des images pouvant le pousser à adopter une attitude ou un comportement sexuel dégradant ;
  • proposition sexuelle faite par un majeur sur Internet ;
  • agression sexuelle, qui est l’acte sexuel sans pénétration, commis par violence, contrainte, menace ou surprise ;
  • atteinte sexuelle, visant une attitude en lien avec l’activité sexuelle, avec ou sans pénétration, qui est le fait d’un majeur, sans violence, contrainte, menace ou surprise ; – viol, qui désigne l’acte de pénétration sexuelle ou orale commis par violence, contrainte, menace ou surprise ;
  • sextorsion, incitant un mineur à transmettre ou à diffuser des images ou vidéos dans lesquels il se livre à des actes pornographiques ;
  • recours à la prostitution de mineurs.


2. – LE MINEUR DÉLINQUANT

Le statut de mineur n’est pas seulement pris en considération par la loi pénale, il l’est également alors qu’il se trouve en situation d’auteur d’acte(s) infractionnel(s).
Au nom d’un discernement jugé particulier, son sort pénal demeure différent de celui du majeur. La question de la responsabilité pénale entraînant ou non sanction – et si oui, quelles peines particulières – connaît des variations.

a. Regard actuel sur la justice pénale des mineurs

Il convient d’emblée de souligner que la loi a connu de récents bouleversements au sujet de la responsabilité pénale de ce public. Longtemps l’ordonnance célèbre de 1945, relative à l’enfance délinquante, certes retouchée en oscillant entre protection et durcissement, a constitué le cadre juridique de la justice pénale des mineurs, sous la bannière des grands principes d’excuse de minorité, de primauté de l’éducatif et de spécialisation des juridictions. Sous l’effet de nombreux facteurs ayant sensiblement modifié le visage de la délinquance des mineurs et après d’âpres débats sur l’insécurité et le type de réponse répressive à apporter de la part de la justice, ce texte central et les textes subséquents ont été remplacés par le Code de la justice pénale des mineurs, à la suite de la loi n° 2021-218 du 26 février 2021. Pour autant, le nouveau code entend reprendre l’héritage de 1945 en le plongeant au cœur des réalités contemporaines. Ainsi son article préliminaire énonce-t-il : « Le présent code régit les conditions dans lesquelles la responsabilité pénale des mineurs est mise en œuvre, en prenant en compte, dans leur intérêt supérieur, l’atténuation de cette responsabilité en fonction de leur âge et la nécessité de rechercher leur relèvement éducatif et moral par des mesures adaptées à leur âge et leur personnalité, prononcées par une juridiction spécialisée ou selon des procédures appropriées », confirmant le particularisme de la justice pénale des mineurs.
Parmi les grands changements figure le souci de scinder en séquences strictes la durée de la procédure pénale : une audience censée déterminer la culpabilité (dix jours à trois mois) ; une mise à l’épreuve éducative (six à neuf mois) ; une audience dont l’issue est l’énoncé de la sanction, à la fin de la mise à l’épreuve. Cependant, dans les faits, d’aucuns se montrent sévères contre les orientations du code, entre crainte d’une justice potentiellement expéditive et manque cruel de moyens pour être à la hauteur des enjeux, avec la conséquence de rendre plus relative la protection des mineurs.

b. Entre irresponsabilité présumée et montée en puissance de la responsabilité pénale des mineurs

En tout état de cause, le droit français est marqué par une logique de paliers.
Ainsi, la loi prévoit que la responsabilité pénale d’un mineur ne saurait, en principe, être engagée qu’à partir de 13 ans. Avant 13 ans, il est estimé qu’un mineur ne dispose pas d’une pleine capacité de discernement pour mesurer les conséquences de ses actes : « Les mineurs de moins de 13 ans sont présumés ne pas être capables de discernement » (CJPM, art. L. 11-1). Il y a là en fait seulement « présomption de non-discernement ». Et ladite présomption n’est pas absolue, le discernement du mineur devant toujours être apprécié par le juge. Ce dernier peut alors renverser cette présomption en apportant la preuve que le mineur cumule notamment, à l’occasion de faits commis, capacité de comprendre ce qu’il a fait, l’avoir voulu, et compréhension du sens de la procédure auquel il est partie. Le parquet peut engager des poursuites et saisir le juge des enfants, qui peut prononcer des mesures éducatives (ex. : mesures éducatives judiciaires, destinées à assurer la protection du mineur, son assistance, son éducation, son insertion et son accès aux soins ; avertissement judiciaire), qui ne sont pas des peines, et en aucun cas des mesures privatives de liberté – interdiction de toute garde vue, mais retenue possible avec maintes garanties. Il reste que le parquet peut renoncer à renvoyer devant un juge des enfants en fixant des mesures alternatives aux poursuites (ex. : rappel de ses obligations en présence des parents, orientation vers une structure sanitaire et sociale, réparation des dommages causés à la victime...).
À partir de 13 ans et jusqu’à 16 ans, la responsabilité pénale franchit un palier. Il n’est plus de présomption de non-discernement (CJPM, art. L. 11-1 : « Les mineurs âgés d’au moins 13 ans sont présumés être capables de discernement »). Le droit continue cependant de traiter cette catégorie d’âge différemment de celle des adultes. En fonction de la gravité des faits, les poursuites peuvent déboucher sur une saisine du juge des enfants, du tribunal pour enfants, voire de la cour d’assises des mineurs pour l’édiction de peines, voire du tribunal de police pour les contraventions de 4e classe.
L’énoncé de peines doit être exceptionnel (ex. : confiscation de l’objet ayant servi à commettre l’infraction, stage de citoyenneté, de sensibilisation aux dangers des produits stupéfiants..., avertissement judiciaire : remise à un parent, admonestation, avertissement solennel, cumulable avec une mesure éducative judiciaire... ; prison pour les plus de 13 ans pour les crimes les plus graves...), elles peuvent être assorties du sursis simple ou du sursis probatoire. Mais dans les cas les plus graves passibles de peines d’emprisonnement, la sanction par la prison est possible, cependant que le tribunal pour enfants et la cour d’assises des mineurs ne peuvent prononcer une peine privative de liberté supérieure à la moitié de la peine encourue, soit une diminution de moitié (ex. : si la peine encourue est la réclusion criminelle ou la détention criminelle à perpétuité, elle ne peut être supérieure à vingt ans de réclusion criminelle ou de détention criminelle).
Avant le prononcé de la sanction, la liberté du mineur peut être limitée dans cette tranche d’âge, dans l’attente d’être présenté à un juge, pour garantir sa sécurité, éviter qu’il entre en contact avec des complices ou des victimes, s’assurer qu’il sera présent au moment de son jugement.
À titre de sanction, en fonction des faits, le juge peut également recourir à des mesures éducatives judiciaires, qui consistent en un accompagnement individualisé du mineur bâti à partir d’une évaluation de sa situation personnelle, familiale, sanitaire et sociale, la juridiction pouvant également prononcer des modules, tels que modules d’insertion, de réparation, de santé, de placement, des interdictions de paraître dans le ou les lieux dans lesquels l’infraction a été commise, d’entrer en contact avec la victime ou les coauteurs ou complices, des obligations de remettre un objet ayant servi à la commission de l’infraction ou qui en est le produit, de suivre un stage de formation civique...
Toujours en fonction de la gravité des actes, il peut être recouru à des mesures alternatives en lieu et place des poursuites judiciaires (ex. : médiation entre l’auteur et la victime, réparation des dommages causés à la victime, composition pénale – procédure permettant de proposer au mineur une ou plusieurs sanctions pour mettre fin aux poursuites : travail non rémunéré, stage ou formation dans un organisme sanitaire et social... –, suivi régulier de la scolarité ou d’une formation professionnelle, consultation d’un psychiatre ou psychologue...).
Enfin, de 16 à 18 ans, la responsabilité pénale peut naturellement être engagée. Le fait de la minorité continue pourtant à trouver application. Selon la portée des actes, diverses peines et mesures telles qu’envisagées dans la catégorie précédente sont susceptibles d’être appliquées (ex. : mesures éducatives judiciaires...) et autres mesures alternatives. Pour cette tranche d’âge, il importe cependant de signaler que si le principe de diminution de moitié de la peine encourue s’applique, la loi prévoit que, pour le mineur en question, le tribunal de police, le tribunal pour enfants et la cour d’assises des mineurs peuvent, à titre exceptionnel et compte tenu des circonstances de l’espèce et de la personnalité du mineur ainsi que de sa situation, décider qu’il n’y a pas lieu de faire application des règles d’atténuation des peines.
À noter. Le mineur qui aurait commis une infraction alors que son discernement était aboli – et pas seulement altéré – n’est pas responsable pénalement, à l’image du droit commun, sous réserve de respecter des critères rigoureux (v. supra pour la responsabilité pénale de droit commun et ses conditions : appréciation méticuleuse des faits, examen médical et psychiatrique...).

LA « VULNÉRABILITÉ » DANS LA LOI

C’est au sein du Code pénal, par exemple au détour des dispositions relatives au viol, à l’inceste et autres agressions, que l’on trouve trace de la « vulnérabilité », avec mention des personnes concernées : un mineur de 15 ans, une personne à la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse. Et d’autres dispositions pénales d’accoler à ces personnes : « qui n’est pas en mesure de se protéger », ou de préciser : « l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse soit d’un mineur, soit d’une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse ».
Le code s’est d’ailleurs ensuite enrichi d’autres personnes à ce titre, avec l’ajout des « personnes à la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale », faisant entrer par la grande porte du code la précarité sociale. La vulnérabilité est ainsi une notion pénale, étant notamment érigée au rang de circonstance aggravante de certaines infractions.
Au plan purement civil, la population mineure et celle des majeurs protégés ne se présentent pas sous le vocable « vulnérabilité ». Ce sont des termes tels que « assistance », « protégés », « protection », « personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté »... qui permettent de souligner que les publics en question sont l’objet de toutes les attentions du législateur. Ils sont bel et bien partie intégrante de la vulnérabilité.
Celle-ci a peu à peu pénétré de nombreuses matières, au-delà du pénal et du civil stricto sensu, dans le but de protéger certaines personnes et de les accompagner. Les termes « vulnérable » ou « vulnérabilité » ont ainsi pris place dans le Code de l’action sociale et des familles (ex. : CASF, art. L. 116-1 : « [...] L’action sociale et médico-sociale tend à promouvoir [...] l’autonomie et la protection des personnes, [...] en particulier des personnes handicapées et des personnes âgées, des personnes et des familles vulnérables [...] ») (v. infra dans le chapitre III).
D’autres codes normatifs ne sont pas en reste et donnent à voir d’autres vulnérabilités, tels les Code de la santé publique, le Code de la sécurité sociale, le Code du travail... (v. infra les derniers développements du document), même si le terme n’est pas explicitement utilisé.
En somme, la vulnérabilité correspond à un spectre sans cesse élargi de personnes, voire d’activités, un symptôme comme un autre de l’évolution de notre société.

GRANDES LOIS RELATIVES À L’ENFANCE DEPUIS L’ENTRÉE EN VIGUEUR DE LA CIDE

De nombreuses lois ont succédé à la CIDE, dont certaines se situent dans le prolongement direct de sa philosophie générale et de ses dispositions :
  • loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale ;
  • loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, promouvant le droit à tout enfant en situation de handicap d’être scolarisé en milieu ordinaire ;
  • loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre des mineurs ;
  • loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance ;
  • loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfance, qui précise la précédente, redéfinissant la protection de l’enfance : « La protection de l’enfance vise à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation, dans le respect de ses droits. Elle comprend des actions de prévention en faveur de l’enfant et de ses parents, l’organisation du repérage et du traitement des situations de danger ou de risque de danger pour l’enfant ainsi que les décisions administratives et judiciaires prises pour sa protection. Une permanence téléphonique est assurée au sein des services compétents » (CASF, art. L. 112-3...), à l’aune de l’intérêt de l’enfant ;
  • loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, supprimant les tribunaux correctionnels pour mineurs ;
  • loi n° 2019-721 du 10 juillet 2019 relative
    à l’interdiction des violences éducatives ordinaires, qui modifie l’article 371-1 du Code civil en ajoutant : « L’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ou psychologiques » ;
  • loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, qui introduit un article L. 511-3-1 du Code de l’éducation : « Aucun élève ne doit subir, de la part d’autres élèves, des faits de harcèlement ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions d’apprentissage susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité ou d’altérer sa santé physique ou mentale » ;
  • loi n° 2020-936 du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales, au premier desquelles les enfants ;
  • loi n° 2020-1266 du 19 octobre 2020 visant à encadrer l’exploitation commerciale de l’image d’enfants de moins de 16 ans sur les plateformes en ligne (YouTube, TikTok, Instagram...) ;
  • loi n° 2021-218 du 26 février 2021, qui ratifie une ordonnance du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs ;
  • loi n° 2021-478 du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l’inceste, qui instaure de nouvelles infractions sexuelles ; ainsi aucun adulte ne peut-il se prévaloir du consentement sexuel d’un enfant s’il a moins de 15 ans, ou moins de 18 ans en cas d’inceste ; d’autres dispositions apportent des précisions sur la sextorsion et la prostitution des enfants ;
  • loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, qui rend obligatoire la scolarisation de tous les enfants en établissement scolaire dès la rentrée 2022 ; et l’instruction d’un enfant en famille devient soumise à autorisation, et non plus seulement à déclaration, celle-ci étant accordée uniquement pour quatre motifs stricts ;
  • loi n° 2022-140 du 7 février 2022, qui entend améliorer la situation des enfants protégés par l’aide sociale à l’enfance, et apporte, entre autres, une définition de la maltraitance : « La maltraitance au sens du présent code vise toute personne en situation de vulnérabilité lorsqu’un geste, une parole, une action ou un défaut d’action compromet ou porte atteinte à son développement, à ses droits, à ses besoins fondamentaux ou à sa santé et que cette atteinte intervient dans une relation de confiance, de dépendance, de soin ou d’accompagnement » (CASF, art. L. 119-1)...

SECTION 2 - DROIT ET PROTECTION DES PERSONNES VULNÉRABLES DANS LES MATIÈRES CIVILE ET PÉNALE

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