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DROIT ET PROTECTION DU MAJEUR VULNÉRABLE

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Des éléments tels que la maladie, le grand âge, le handicap ou parfois certains accidents de la vie peuvent altérer les facultés physiques et/ou cognitives des personnes et rendre malaisée la défense de leurs intérêts, vis-à-vis tant de leur personne que de leurs biens, dans la mesure où, ayant un discernement évolutif, elles peuvent agir inconsidérément, sans limites et s’exposer à de multiples dangers. Ces personnes sont dites « vulnérables ». Pour pallier la vulnérabilité, nécessairement à géométrie variable, le droit, civil et pénal, offre une batterie de dispositifs légaux portant des règles protectrices, aux exigences diverses compte tenu des degrés non moins divers des causes de vulnérabilité.


A. Protection juridique du majeur vulnérable d’un point de vue civil

Au civil (C. civ., art. 414 et s.), compte tenu de l’altération de certaines facultés, surtout mentales, une décision d’un juge peut emporter une mesure de protection juridique imposant l’intervention d’un tiers pour les aider à protéger leurs intérêts – elles ne sont plus dites légalement « majeurs incapables » mais « majeurs protégés » (C. civ., art. 425 : « Toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté peut bénéficier d’une mesure de protection juridique prévue au présent chapitre. S’il n’en est disposé autrement, la mesure est destinée à la protection tant de la personne que des intérêts patrimoniaux de celle-ci. Elle peut toutefois être limitée expressément à l’une de ces deux missions »).
Un premier type de mesures est susceptible de porter atteinte, définitivement ou temporairement, aux attributs et à l’expression de la personnalité juridique, alors que, on le sait, la majorité est pourtant synonyme de capacité juridique pleine et entière (C. civ., art. 414 : « La majorité est fixée à 18 ans accomplis ; à cet âge, chacun est capable d’exercer les droits dont il a la jouissance »). Dès lors, certains régimes se contentent d’aménager ladite capacité juridique, tandis que d’autres la réduisent ou l’anéantissent ; ce sont les traditionnels régimes de sauvegarde de justice, de curatelle ou de tutelle, auxquels s’ajoutent les habilitations du conjoint et familiale.
Un second type de mesures judiciaires concerne les mesures d’accompagnement en faveur des personnes majeures en difficulté, mais cette fois d’un point de vue social, preuve d’un droit qui n’a de cesse d’ouvrir le champ des vulnérabilités.
Enfin, la loi a ouvert la porte à l’aménagement conventionnel de la gestion de la vulnérabilité à venir, par la création du mandat de protection future, qui permet à une personne, sous certaines conditions, d’organiser à l’avance sa protection future dans l’hypothèse où elle ne pourrait plus, à une date nécessairement indéterminée, pourvoir seule à ses intérêts, par la désignation d’un tiers compétent pour agir en ses lieu et place en cas de besoin.


1. – MESURES TRADITIONNELLES DE PROTECTION JURIDIQUE DES MAJEURS

a. Sauvegarde de justice

Il s’agit du premier régime de protection, le plus léger, n’emportant pas remise en question de la capacité juridique, sauf exceptions. Il est mis en place sur décision du juge des contentieux de la protection – ancien juge des tutelles – concernant toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté, impliquant une protection juridique temporaire ou une représentation pour l’accomplissement de certains actes déterminés. De courte durée, elle peut ensuite se transformer en curatelle ou en tutelle. Coexistent la sauvegarde de justice prise suite à une déclaration médicale (médecin, établissement de santé) faite au parquet, et la sauvegarde de justice prise sur décision du juge, après demande du majeur lui-même, la personne avec qui vit le majeur à protéger, un parent ou un allié...
Un ou plusieurs mandataires spéciaux sont désignés, de préférence au sein des proches, pour accomplir des actes précis, de représentation ou d’assistance, que la protection de la personne rend nécessaires, qui conserve, en principe, ses droits d’accomplir tous les actes de la vie civile. La mesure est renouvelable et peut prendre fin quand les éléments ayant motivé son adoption ne sont plus réunis...

b. Curatelle

La mesure judiciaire de curatelle concerne les personnes dans l’impossibilité de pourvoir seules à leurs intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de leurs facultés mentales, soit de leurs facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de leur volonté, qui, sans être hors d’état d’agir elle-même, ont besoin d’être assistées ou contrôlées d’une manière continue dans les actes importants de la vie civile. Elle ne peut être adoptée que s’il est établi que la sauvegarde de justice ne peut assurer une protection suffisante. Globalement, la curatelle permet à une personne d’être conseillée et accompagnée pour les actes d’une certaine ampleur et gravité, notamment pour le patrimoine, tels que la souscription d’un emprunt, la vente d’un bien immobilier, la réalisation d’une donation – « actes de disposition » –, alors qu’elle demeure autonome pour des actes simples du quotidien et de gestion courante – « actes d’administration » : ouverture d’un compte de dépôt, souscrire un bail d’habitation... – et les actes liés à la liberté de choisir son lieu de résidence, de changer d’emploi, d’assumer ses droits civiques, de se marier ou de se pacser sous réserve d’une information au curateur... Elle porte une atteinte à la capacité juridique, recours à une assistance ou à la représentation d’un tiers oblige, qui se trouve amputée variablement.
Il existe trois formes – curatelle simple, renforcée ou aménagée – en fonction de l’état et de la situation des personnes, de leurs besoins et des limitations à l’autonomie et à la liberté de choix subséquentes. La demande auprès du juge s’effectue par le majeur lui-même, la personne avec qui le majeur partage son quotidien, un parent ou un allié, le parquet d’office...
La personne sous curatelle est assistée d’un ou plusieurs curateurs désignés par le juge des contentieux de la protection, prioritairement parmi les proches ; à défaut, par un mandataire judiciaire à la protection des majeurs, professionnel compétent dans le domaine – possibilité également de désigner un subrogé curateur ayant pour mission de surveiller les actes accomplis par le curateur. Le curateur établit chaque année un compte de gestion à l’intention du juge.
La durée de la mesure est fixée par le juge pour une durée de cinq ans au maximum, renouvelable pour cinq ans, modifiable en une tutelle, elle peut prendre fin en cas de recouvrement des facultés défectueuses ayant motivé l’intervention judiciaire...

c. Tutelle

La mesure judiciaire de tutelle, la plus forte sur l’échelle des protections, et la plus attentatoire à la capacité juridique, concerne les personnes dans l’impossibilité de pourvoir seules à leurs intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de leurs facultés mentales, soit de leurs facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de leur volonté, et qui ont besoin d’être représentées de manière continue dans les actes de la vie courante, et a fortiori pour les actes relatifs à leur patrimoine. On estime que l’altération de leurs facultés, du discernement dégradé à l’incapacité totale d’exprimer une volonté, est telle que le régime le plus protecteur est indispensable.
La mesure, qui doit être proportionnée et individualisée autant que possible, en fonction du degré d’altération des facultés propres, peut être requise auprès du juge par la personne elle-même, la personne avec qui vit le majeur, celle avec qui le majeur entretient des liens étroits et stables, un parent ou un allié, le parquet...
Le juge des contentieux de la protection désigne un ou plusieurs tuteurs parmi, de préférence, le cercle des proches, ou, à défaut, par un mandataire judiciaire à la protection des majeurs chargé de représenter massivement la personne dans les actes de la vie courante – possibilité également de désigner un subrogé tuteur ayant pour mission de surveiller la gestion des intérêts de la personne par le tuteur. Le tuteur établit chaque année un compte de gestion à l’intention du juge.
Pour l’accomplissement de la vie juridique de la personne placée sous contrôle, la distinction entre actes de disposition et actes d’administration s’impose à nouveau. Pour les premiers, susceptibles d’engager le patrimoine de la personne, pour le présent et l’avenir, il revient au juge de les autoriser ou non par décision motivée ; les seconds, actes de la vie courante, ne peuvent être réalisés que par le tuteur, mais tout dépend de la force donnée à la tutelle et de l’énumération faite par le juge dans sa décision initiale – qui peut être modifiée – des actes pouvant être accomplis ou non par la personne.
La mesure de protection est limitée à cinq ans ou dix ans si l’altération des facultés personnelles ne peut manifestement pas connaître une amélioration au vu des données acquises par la science ; elle est renouvelable, peut être allégée en fonction de l’évolution de l’état, et prend fin pour plusieurs raisons (ex. : décision du juge estimant qu’elle ne s’impose plus, transformation en curatelle, expiration du délai, décès...).
La loi civile se caractérise aussi par la possibilité de s’affranchir des régimes légaux étudiés, en fonction de la situation d’un majeur à protéger et du degré d’altération des facultés. Il est ainsi d’autres hypothèses d’intervention du juge, compétent pour arrêter d’autres types de mesures, assurant plus de souplesse que les régimes légaux.


2. – MESURES JUDICIAIRES D’HABILITATION D’UN TIERS POUR REPRÉSENTER UN MAJEUR VULNÉRABLE

a. Habilitation du conjoint

L’hypothèse consiste pour le juge des contentieux de la protection à prendre une mesure de protection habilitant un époux à représenter l’autre époux, aux facultés mentales altérées, malade, handicapé, victime d’un accident et/ou hospitalisé, le rendant inapte à exercer un véritable discernement et à exprimer sa volonté, et d’agir en son nom pour la réalisation des actes de la vie courante. La représentation peut être générale ou ne concerner que certains actes. Sauf exceptions, le bénéficiaire ne peut procéder qu’à des actes d’administration.

b. Habilitation familiale

L’habilitation familiale consiste pour le juge à désigner une personne compétente pour réaliser certains actes, au bénéfice d’une personne non capable de manifester sa volonté et de protéger ses intérêts, notamment patrimoniaux, consécutivement à une altération de ses facultés mentales et/ou facultés physiques, constatée par un certificat médical dûment circonstancié.
Peuvent être habilités un parent, grand-parent, arrière-grand-parent, enfant, petit-enfant, arrière-petit-enfant, frère, sœur, époux, partenaire, concubin.
Le juge détermine l’étendue et la durée de l’habilitation, en précisant le type d’habilitation : représentation, autorisant la prise de décision en lieu et place de l’intéressé, ou assistance, impliquant un conseil à la prise de décision.
L’habilitation peut être générale, d’une durée de dix ans au maximum et renouvelable, emporte compétence pour réaliser l’ensemble des actes, qu’ils soient d’administration ou de disposition ; elle peut être partielle, limitée à certains actes, quels qu’ils soient, ceux demeurant en dehors du périmètre de la mesure pouvant continuer à être accomplis par le majeur protégé.
Attention, d’une part, certains actes requièrent impérativement l’autorisation du juge, tels que les actes de disposition à titre gratuit (ex. : donation...), les actes relatifs au logement de la personne comme la vente ou la location..., et d’autre part, certains actes sont strictement interdits, car jugés trop dangereux (ex. : acquisition ou location à titre personnel des biens appartenant à la personne protégée, réalisation d’opérations d’ordre commercial avec les biens du protégé, souscription d’un engagement de caution au nom de celui-ci...).
La mesure connaît son terme en cas de décès, d’adoption d’un régime légal de protection, de mainlevée, si les conditions de l’habilitation ne sont plus réunies...


3. – MESURES D’ACCOMPAGNEMENT EN FAVEUR DES PERSONNES MAJEURES EN DIFFICULTÉ

En la matière, le droit sort de la stricte altération des facultés mentales ou physiques, et se penche, de façon très contemporaine, sur les personnes majeures rencontrant des difficultés d’ordre social – bénéficiaires de minima sociaux notamment –, voire de santé, et dans la gestion de leur patrimoine.

a. Mesures d’accompagnement social personnalisé (MASP)

Ces MASP ont pour vocation à aider une personne majeure dont la santé ou la sécurité sont menacées par ses carences dans la gestion de ses ressources et ses prestations sociales. Mises en place par les services sociaux du département, elles donnent lieu à l’établissement d’un contrat d’accompagnement social personnalisé (Casp), sans intervention judiciaire. Ce contrat prévoit des actions en faveur de l’insertion sociale et est censé apporter un apprentissage dans la gestion autonome de ses prestations. En outre, le bénéficiaire peut autoriser le département à percevoir et à gérer temporairement, pour son compte, tout ou partie des prestations sociales qu’il perçoit, affectées en priorité au paiement des loyers et des charges locatives en cours. La durée de la mesure varie entre six mois et deux ans, renouvelable, au maximum pour quatre ans.
En cas d’échec dans les effets attendus, le juge du contentieux et de la protection peut être saisi pour fixer une mesure plus radicale, telle une mesure d’accompagnement judiciaire (v. ci-après), ou mettre en place un régime de protection plus élaboré, telles la sauvegarde de justice, la curatelle...

b. Mesures d’accompagnement judiciaire (MAJ)

Visant les personnes vulnérables socialement évoquées ci-dessus, la MAJ est plus contraignante que la MASP – la première pouvant se substituer à la seconde en cas d’échec – puisque le juge, saisi par le parquet après l’alerte de services sociaux, désigne un mandataire judiciaire à la protection des majeurs pour percevoir et gérer les prestations sociales de ceux-ci.
Elle est impérative et radicale car la personne défaillante n’est plus apte à gérer ses prestations sociales. Le mandataire judiciaire perçoit les prestations énoncées dans la MAJ, les fait créditer sur un compte ouvert au nom de la personne, obligation lui étant faite de les gérer dans l’intérêt de la personne, sans compter un volet d’action éducative devant lui permettre de gérer dans l’avenir ses prestations.
La durée de la mesure est de deux ans au maximum, renouvelable une fois pour la même durée. Elle est modifiable par le juge, et peut être remplacée par un régime légal encore plus strict.


4. – MANDAT DE PROTECTION FUTURE

Cette mesure a pour objet d’anticiper une éventuelle survenance de toute altération des capacités mentales et/ou physiques. Elle consiste alors à désigner à l’avance une ou plusieurs personnes pour représenter la personne qui établit le mandat, dans la perspective d’assurer la protection de cette dernière dans ses intérêts propres, en dehors de tout régime légal habituel.
Le mandat, dont les acteurs sont le mandant et le(s) mandataire(s), peut porter sur l’assistance dans la vie personnelle du mandant et/ou sur la gestion de tout ou partie de son patrimoine. Le mandataire, nécessairement détenteur de la capacité juridique, peut être choisi parmi les proches du mandant ou parmi une liste de professionnels mandataires judiciaires à la protection des majeurs.
Formellement, le mandat est un contrat qui peut revêtir la forme sous signature privée (ex. : contresigné par un avocat...), n’incluant alors que les actes d’administration, les actes de disposition devant être autorisés par le juge des contentieux de la protection, ou la forme de l’acte authentique notarié, incluant toutes les catégories d’actes et faisant obligation au mandataire de rendre compte au notaire des actes de gestion.
Le mandant est habilité à faire inscrire dans l’acte certaines demandes en matière de logement ou d’hébergement, de maintien de liens personnels avec les tiers.
L’acte prend effet que dès lors que l’évolution de l’état de santé du mandant, dûment actée par une expertise médicale, ne permet plus une prise de soin de sa personne ou une gestion saine de son patrimoine. L’acte du mandat et le certificat médical doivent être transmis au greffe du tribunal pour visa par le greffier, le mandat étant dès lors actif.
Tant que l’acte n’a pas pris effet, le mandant conserve sa pleine capacité juridique, peut le révoquer ou le modifier, l’autre partie pouvant y renoncer. Une fois que le mandat a pris effet, il faut s’adresser au juge des contentieux de la protection pour l’annuler ou le modifier.
Le mandat prend fin en cas de décès d’une deux parties au contrat, de rétablissement de l’état de santé, d’adoption d’un régime de protection légale visant une des deux parties, du retrait des missions du mandataire par le juge.
À noter. Contrairement à la responsabilité pénale, en matière de responsabilité civile, la personne qui a causé un dommage à autrui alors qu’il était sous l’empire d’un trouble mental n’en est pas moins obligé à réparation sur le volet civil (C. civ., art. 414-3), les mécanismes assuranciels venant régler les questions de réparation.


B. Protection juridique du majeur vulnérable d’un point de vue pénal

La prise en compte de la particularité des majeurs vulnérables par le droit pénal est une constante, quand bien même le terme « vulnérabilité » n’est entré dans le Code pénal qu’en 1992 – « majeurs à la particulière vulnérabilité ». La protection de ceux-ci intervient à deux égards : dès lors qu’ils sont victimes d’infractions et alors qu’ils seraient en situation infractionnelle. Mais la protection du majeur ne se calque pas exactement sur celle du mineur puisqu’il ne connaît pas le principe d’une présomption d’irresponsabilité pénale pour âge : 13 ans pour les mineurs, comme sus-évoqué.


1. – MAJEUR VULNÉRABLE VICTIME D’UNE INFRACTION

Il importe peu que le majeur en question soit ou non soumis à un statut ou à des mesures de protection comme évoqué ci-dessus. Est concernée « toute personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d’une maladie, d’une infirmité, d’une déficience physique ou psychique ou d’un état de grossesse », voire « à la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale ». Autour de ces profils se dressent des infractions spécialement attachées à ceux-ci et des infractions qui concernent toute personne mais pour lesquelles la qualité de la victime entraîne un alourdissement des peines, en vertu du principe des circonstances aggravantes.

a. Infractions spécifiques à certaines vulnérabilités (psychique, physique...)

Plusieurs infractions se fondent sur l’état de la personne tant physique que psychique, dépendante, handicapée... On identifie les infractions – délits – suivantes :
  • discriminations à l’encontre de personnes fondées sur la « particulière vulnérabilité résultant de leur situation économique », « de leur état de santé, de leur perte d’autonomie, de leur handicap » (ex. : refus de fourniture d’un bien ou d’un service, entrave à l’exercice normal d’une activité économique, refus d’embauche ou sanction ou licenciement à raison de l’état de la personne...) ;
  • fait d’obtenir d’une personne, dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance sont apparents ou connus de l’auteur, la fourniture de services non rétribués ou en échange d’une rétribution manifestement sans rapport avec l’importance du travail accompli, ou encore le fait de soumettre une personne, dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance sont apparents ou connus de l’auteur, à des conditions de travail ou d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine ;
  • délaissement, en un lieu quelconque, d’une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique ;
  • abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse soit d’une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur, soit d’une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, pour conduire cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables ;
  • fait, pour quiconque ayant connaissance de privations, de mauvais traitements ou d’agressions ou atteintes sexuelles infligés à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d’une maladie, d’une infirmité, d’une déficience physique ou psychique ou d’un état de grossesse, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives.

b. L’état (psychique, physique...) de la personne comme circonstance aggravante de l’infraction

De très nombreuses infractions concernant la globalité des personnes sont concernées par les circonstances aggravantes, la vulnérabilité des personnes majeures comme ci-dessus cernées en constituant une.
On citera, sans exhaustivité, d’une part, au sujet de la personne à la « particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse » : le meurtre et l’empoisonnement (réclusion criminelle à perpétuité et non trente ans), les actes de torture ou de barbarie (réclusion criminelle de vingt ans et non quinze, trente ans de réclusion criminelle lorsque l’infraction est commise en bande organisée ou de manière habituelle), les violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner (réclusion criminelle de vingt ans et non quinze ans), les violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente (quinze ans de réclusion criminelle et non dix ans)... le même schéma d’aggravation des peines concernant également les violences ayant entraîné une incapacité de travail, les violences habituelles, mais également, à l’évidence, le viol, les agressions sexuelles autres que le viol, le harcèlement sexuel et moral, l’outrage sexiste, le proxénétisme, la mise en danger d’autrui, le vol, l’extorsion et l’escroquerie, l’exploitation de la mendicité...
D’autre part, il doit être fait mention de certaines infractions commises sur une personne à la « particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale » : le viol, les agressions sexuelles autres que le viol, le harcèlement sexuel et moral, l’outrage sexiste, l’infraction consistant en des pratiques dites des « thérapies de conversion ».


2. – MAJEUR VULNÉRABLE DÉLINQUANT

Contrairement au mineur qui demeure par principe non responsable pénalement de façon présumée jusqu’à ses 13 ans (v. supra), le majeur vulnérable au comportement infractionnel encourt une responsabilité pleine et entière.
En revanche, il est des hypothèses possibles de non-engagement de cette responsabilité pénale, au même titre que pour toutes les personnes majeures. Ainsi, comme il a déjà été évoqué (v. supra pour le principe de la responsabilité pénale et ses exceptions), la responsabilité pénale peut n’être pas établie en cas d’« abolition du discernement » – ce qui, en pratique, est très envisageable au vu des différentes pathologies pouvant toucher certains majeurs vulnérables – au moment de la commission de l’infraction, la considération des faits par le juge étant très stricte. En tout état de cause, en cas de responsabilité engagée, et en contemplation de la peine à infliger, le juge pénal a toute latitude dans la gradation – à la baisse par rapport au droit commun – de la sanction applicable à ce public.


PRINCIPES FONDAMENTAUX DE LA LOI CIVILE ET RÉGIME DE PROTECTION DES MAJEURS

De la loi phare de 1968 à celles de 2007, 2015 et 2019, le droit a connu moult évolutions marquées par une prise en compte croissante des intérêts des majeurs protégés. La dernière grande loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, elle, est nettement caractérisée par la mise en avant de certains grands principes : « principe de nécessité », selon lequel un juge ne peut prononcer une mesure de protection que si une expertise médicale apporte la preuve que la personne ne peut plus pourvoir seule à ses intérêts en présence de l’altération de ses facultés l’empêchant d’avoir un discernement stable et d’exprimer sa volonté ; « principe de subsidiarité », par lequel le juge ne peut prononcer une mesure contraignante que si une mesure plus souple ne peut trouver à s’appliquer (ex. : habilitation familiale, mandat de protection future...) ; « principe d’autonomie » du majeur, signifiant quête de la restauration du majeur protégé dans sa personne de citoyen (ex. : autorisation des majeurs sous tutelle à exercer leur droit de vote par la loi de 2029...), dans la mise en valeur, autant que possible, de sa voix propre, ce qui se traduit notamment par un allégement dans la loi de 2019 du contrôle effectué par le juge des contentieux de la protection ; « principe de remise de la personne au centre des décisions qui la concernent » ; « principe de mobilisation de la ressource familiale », avec une recherche encouragée des possibilités offertes par un cadre intra-familial.
Plus globalement, la loi civile, enfin, indique que « la protection des majeurs intéressés est instaurée et assurée dans le respect des libertés individuelles, des droits fondamentaux et de la dignité de la personne. Elle a pour finalité l’intérêt de la personne protégée. Elle favorise, dans la mesure du possible, l’autonomie de celle-ci. Elle est un devoir des familles et de la collectivité publique » (C. civ., art. 415).

SECTION 2 - DROIT ET PROTECTION DES PERSONNES VULNÉRABLES DANS LES MATIÈRES CIVILE ET PÉNALE

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