A. Notion de « personnalité juridique »
Ce n’est qu’à partir du moment où une personne acquiert la personnalité juridique qu’elle se voit attribuer la qualité de sujet de droit et consécutivement des prérogatives juridiques. Des entités ne peuvent accéder à la qualité de sujet, les choses et les animaux, ceux-ci étant seulement des objets de droits. Néanmoins, une loi de 2015 a modernisé le statut des animaux et leur a accordé le statut d’« être vivant doué de sensibilité », n’étant plus un « bien meuble par nature » ni même une chose au sens strict ; en outre, des actes tels que sévices graves et actes de cruauté sont qualifiés de délits par le Code pénal et punissables. Sous ces réserves légales, les animaux sont soumis au régime des biens et ne sauraient bénéficier des prérogatives ouvertes par la qualité de sujet de droit.
Deux types de personnes sont autorisés à prétendre à la personnalité juridique.
B. Personnes physiques
1. –DÉBUT ET FIN DE LA PERSONNALITÉ JURIDIQUE
a. Naissance et conception
Les personnes physiques désignent les êtres humains. Ils acquièrent la personnalité juridique du seul fait de leur naissance, avec la précision légale d’être nés vivants et viables (voir chapitre II).
b. Décès
En principe, seul le décès de la personnalité physique, médicalement constaté et déclaré en mairie, met fin à la personnalité juridique. Cette qualité fait doute, notamment en cas de disparition et d’absence, deux notions envisagées par le droit civil (voir chapitre II).
2. –DIVERS DEGRÉS DE LA PERSONNALITÉ JURIDIQUE
a. Principe : une personnalité juridique pleine et entière
Dès lors qu’un individu, personne physique, obtient la personnalité juridique, il en jouit a priori pleinement et entre dans un tissu légal de droits et d’obligations. La réalité demeure cependant plus complexe puisque l’exercice de cette personnalité juridique peut se trouver amoindri.
b. Exceptions : les incapacités
Par souci de les protéger, certaines catégories de personnes dites « vulnérables » ne disposent légalement que d’une capacité juridique restreinte. Ces dernières doivent alors se faire assister par un tiers dans leur vie juridique, tant que dure l’incapacité. Elle peut être temporaire et plus ou moins prononcée, pour les mineurs et les personnes majeures dont les facultés physiques et mentales sont altérées par un handicap, la maladie...
Un décret du 22 juillet 2019 a supprimé l’adjectif « incapable » pour qualifier la situation des majeurs et des mineurs « protégés ».
C. Personnes morales
1. –ÉLÉMENTS DE DÉFINITION
Les personnes physiques ne sont pas les seuls sujets de droit sur la scène juridique. Ainsi, la place considérable prise par les groupements, composés de personnes physiques, dans la vie économique et sociale a abouti à une reconnaissance de leur personnalité juridique, conférant droits et obligations propres, leur permettant d’œuvrer efficacement dans leurs champs respectifs d’activité. Ce sont toutes les entités dotées de la personnalité juridique par définition de la loi, la volonté de s’associer collectivement et l’expression d’un intérêt commun parmi les personnes physiques (voire morales) qui les constituent apparaissant comme des dénominateurs communs.
Parmi ces personnes morales, en droit privé, se trouvent les sociétés civiles, les sociétés commerciales, les associations, les groupements d’intérêt économique, les syndicats professionnels, les fondations, les syndicats de copropriétaires... Dans le domaine public, le bénéfice de la personnalité juridique est plus classiquement reconnu à l’État, aux collectivités territoriales, à l’ensemble des établissements publics, ainsi qu’à l’Union européenne depuis le Traité de Lisbonne de 2007.
La personne morale étant une entité juridique à part entière et autonome, elle est distincte des personnes physiques (voire morales) qui lui ont donné naissance.
2. DÉBUT ET FIN DE LA PERSONNALITÉ JURIDIQUE DES PERSONNES MORALES
Une personne morale se crée par une manifestation de volonté de son ou ses membres. Un acte de nature particulière est rendu nécessaire légalement pour entériner la création de la personnalité morale. Deux cas sont assez connus : l’immatriculation d’une société auprès du registre du commerce et des sociétés octroie matériellement la personnalité morale à celle-ci ; le dépôt du contrat d’association en préfecture, celle-ci devant remettre un récépissé prenant acte de la déclaration par laquelle plusieurs personnes conviennent de mettre en commun, d’une façon permanente, leurs connaissances et leurs activités, dans un autre but que le partage de bénéfices, est créateur de la personnalité juridique de l’association, sous réserve de faire insérer un extrait de la déclaration au Journal officiel.
L’extinction de la personne morale entraîne celle de la personnalité juridique. Elle intervient soit par l’arrivée d’un terme, soit par décision collective soit par décision judiciaire, voire administrative.
3. –CONSÉQUENCES DE LA RECONNAISSANCE DE LA PERSONNALITÉ JURIDIQUE DES PERSONNES MORALES
La personne morale étant devenue vivante et indépendante juridiquement vis-à-vis de ses membres, elle peut dès lors commencer à accomplir des actes, certes toujours représentée par des personnes physiques.
Le groupement ayant une existence juridique propre, elle endosse des droits et obligations propres. À ce titre, elle dispose d’un patrimoine, pouvant en son nom acquérir de ce fait des biens, ouvrir un compte bancaire, recevoir des subventions et des dons, solliciter un agrément ou une reconnaissance d’utilité publique dans le cas de la forme associative, embaucher des salariés, et passer plus généralement des contrats ; elle a un droit exclusif sur son nom, un domicile et se voit reconnaître la capacité d’agir en justice, par l’intermédiaire de ses représentants, pour défendre ses intérêts, ses biens, ainsi que l’intérêt ayant justifié sa création.
À noter. Depuis 1994, les personnes morales peuvent, à l’instar des personnes physiques, voir leur responsabilité pénale engagée. Ainsi, les « personnes morales, à l’exclusion de l’État, sont responsables pénalement (...) des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants. (...) La responsabilité pénale des personnes morales n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits (...) » (C. pén., art. 121-2).