Recevoir la newsletter

Introduction

Article réservé aux abonnés

On cernera davantage les réalités grâce à des données chiffrées et aux profils patiemment dressés.
Chiffres. Au-delà du seul chiffre de 300 000 sans domicile fixe déjà cité, d’autres, issus du même et très riche rapport de la Fondation Abbé-Pierre, contribuent à faire la lumière (années 2020-2021) :
  • 180 000 personnes bénéficiaient d’un hébergement généraliste au sein de centres d’hébergement et de réinsertion (CHRS), de centres d’hébergement d’urgence (CHU), ou en hébergement d’urgence avec accompagnement social (HUAS) (v. le point qui suit pour les « profils »)... ;
  • 100 000 personnes bénéficiaient du dispositif national d’accueil dédié aux demandeurs d’asile et aux migrants ;
  • 25 000 personnes vivaient en chambres d’hôtel ;
  • 100 000 personnes vivaient dans des habitations de fortune (ex. : bidonvilles, squats...) ;
  • 6 000 adultes « francophones » sans domicile dormant dans la rue (2017) ;
  • les Nuits de la Solidarité, qui visent les actions annuelles de décompte des sans-abri stricto sensu dans les grandes villes françaises, apportent les chiffres suivants : en 2020, 1 000 sans-abri à Rennes, 1 600 à Montpellier, 3 600 à Paris.
NUIT DE LA SOLIDARITÉ PARIS (20-21 JANVIER 2022)
À Paris, depuis 2018, la Nuit de la Solidarité est une opération nocturne d’identification et de décompte des personnes sans abri. Elle est organisée par la Ville de Paris, en collaboration avec divers partenaires et avec l’aide de plus de 2 000 bénévoles et professionnels du social. Pour cette édition de l’hiver 2022, le rapport en rendant compte apporte les quelques chiffres clés suivants (v. pour une présentation complète de ce riche rapport, « Les personnes sans-abri à Paris la nuit du 20 au 21 janvier 2022 – Analyses des données issues du décompte de la 5e édition de La Nuit de la solidarité », apur.org) :
  • zones d’observation : 355 secteurs de décompte, 7 gares, 252 stations de métro et de RER, 14 adresses de Paris Habitat, 45 parkings, 25 talus du périphérique, 4 parcs et jardins, 7 campements, bois de Vincennes et Boulogne ;
  • 2 598 personnes sans abri répertoriés ;
  • 10 % de femmes et 90 % d’hommes (13 % de femmes en 2021) ;
  • âge moyen : 43 ans (41 ans en 2021) ;
  • des personnes plus ancrées aÌ la rue en 2022 par rapport aux éditions précédentes :
    • 69 % des répondants déclarent vivre aÌ la rue depuis plus d’un an (61 % en 2021),
    • 63 % indiquent avoir vécu plusieurs épisodes de rue (57 % en 2021),
    • 94 % des personnes rencontrées disent que le lieu ouÌ elles ont été rencontrées est celui ouÌ elles dorment le plus souvent (83 % en 2021) ;
  • un recours majoritairement faible aux aides et aux dispositifs (stable ou non par rapport à 2021) :
    • 69 % des répondants n’appellent pas ou plus le 115 (stable),
    • 58 % ne sont pas accompagnés par un travailleur social (stable),
    • 46 % n’ont pas d’adresse pour recevoir leur courrier (stable),
    • 52 % ne disposent pas de couverture maladie et n’ont pas entameì de démarches (49 %),
    • 24 % n’ont pas consulté de médecin depuis au moins un an (26 % en 2021),
    • 54 % indiquent ne pas avoir de ressources financières ou prestations sociales, ou vivent de la mendicité (67 % en 2021),
    • 46 % indiquent que la crise n’a pas eu d’impact sur leur quotidien (stable),
    • 13 % des répondants soulignent avoir ressenti du stress ou de l’anxiété et 12 % évoquent un sentiment d’isolement en raison du contexte de crise sanitaire (stable).
Profils. La question des profils est certainement la plus délicate, elle perdure encore à ce jour. Qui sont ces personnes ? Quel est leur nombre ? Où se trouvent-ils ? Il est clair que les situations et les parcours de vie sont très hétérogènes, de même que les besoins, les prises en charge subséquentes. Pour autant, au fil du temps, des caractéristiques ont pu émerger. Les profils qui suivent sont tirés des informations collectées et traitées par les institutions, services (ex. : Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques [DREES], délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement [DIHAL], Insee, Institut national des études démographiques [INED]...) et autres acteurs associatifs engagés socialement (ex. : Samu social, Fondation Abbé-Pierre, Fondation de l’Armée du Salut, collectif Les Morts de la Rue...) :
  • la majorité des personnes sont des hommes (avec une proportion de 47 % de plus de 45 ans), même si 37 % sont des femmes (y compris enceintes) ; 20 % sont en couple, avec éventuellement des enfants ; la part des personnes étrangères dans la rue a progressé ces dernières années ;
  • 25 % des sans-abri occupent un emploi, mais très souvent précaire, saisonnier, intérimaire, peu qualifié (ex. : bâtiment, services à la personne...) ; ils incarnent le « travailleur pauvre » ; en outre, 14 % des adultes français francophones de la rue ont suivi des études supérieures ; globalement, les classes dites « populaires » ont une probabilité plus élevée de se retrouver en situation de sans-abrisme ;
  • l’espérance de vie dans la rue est de 49 ans chez ces personnes, contre en moyenne 80 ans en général ; nombreux sont ceux qui connaissent des pathologies d’ordre psychiatrique ;
  • 25 % ont connu un placement au cours de l’enfance, sous les auspices de l’aide sociale à l’enfance ; 25 % ont subi des violences ou ont été maltraités au cours de cette même enfance ; on compte également parmi eux 30 % d’anciens détenus n’étant pas parvenus à se réinsérer socialement ;
  • le sans-abrisme résulte fortement du cumul de plusieurs problématiques personnelles rendant les situations très complexes (ex. : problèmes de santé, y compris mental, perte d’un emploi, divorce, état de surendettement... en somme les « accidents de la vie »), les liens familiaux très fragiles ou absents, impliquant manque de soutien et isolement, étant autant de facteurs d’aggravation ;
  • enfance : les mineurs ne sont pas épargnés par la vie de rue, y compris depuis leur très jeune âge ; le phénomène s’est amplifié à la suite de la crise migratoire de 2015, dans la mesure où de jeunes étrangers, originaires d’Afrique et d’Asie, se sont retrouvés sur le territoire français seuls, sans parents ou représentants légaux, appelés « mineurs non accompagnés » ;
  • le sans-abrisme ne se réduit pas aux « urbains », il touche en outre les personnes en situation d’habitat précaire en milieu rural ou dans les espaces péri-urbains, espaces dans lesquels doivent également se déployer de façon relativement récente les politiques sociales de solidarité, d’insertion...
À noter. La dernière grande étude statistique portant sur les personnes sans domicile en France date de 2012, fruit des travaux de l’Insee, en collaboration avec la direction des statistiques démographiques et sociales (DSDS) (Insee, « Enquête auprès des sans-domicile », 2012), dont les objectifs étaient au nombre de trois : décrire les caractéristiques des sans-abri et des sans-domicile (santé, emploi, niveau de vie...) ; détailler les difficultés d’accès au logement, les trajectoires ayant amené les personnes à la situation de sans domicile, aux fins d’identification des processus d’exclusion ; estimer le nombre de personnes sans domicile. Une autre étude d’envergure est actuellement en cours, tandis qu’ont fleuri des initiatives locales ces dernières années affichant les mêmes buts.
Par ailleurs, il est à signaler la collecte « Habitations mobiles et sans-abri » (HMSA) mise en place par l’Insee, qui a lieu tous les cinq ans dans le cadre du recensement général de la population. En tout état de cause, il est admis que les innombrables données issues des acteurs de terrain et des institutions ne permettent toujours pas d’établir un tableau suffisamment précis du nombre et du profil des personnes sans abri. Des données suffisamment précises, circonstanciées, se rapprochant du toujours impossible exhaustif, demeurent cependant indispensables dans la perspective de la définition des politiques publiques.
Le sans-abrisme est appréhendé présentement sous l’angle du fait social « pauvreté » et de l’hébergement d’urgence. Il importe néanmoins de mentionner le fait que la personne sans abri demeure un sujet de droit, quand bien même l’assertion n’irait pas clairement de soi dans les faits. Sous cet aspect, elle bénéficie de toutes les prérogatives juridiques attachées à la notion de « personne », de toutes les garanties relatives aux droits et libertés fondamentaux, y compris en conséquence dans la rue, au premier rang desquels la liberté d’aller et venir, la liberté d’expression, de se réunir, le droit à la sûreté... autant de thèmes déclinés dans la partie II du document, qui concernent une société en son entier.

SECTION 3 - DE QUELQUES RÉALITÉS DES SANS-ABRI

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur