A. Des points de tensions
Cette phase de développement physiologique s’accompagne de bouleversements affectifs, intellectuels, relationnels et sociaux chez l’adolescent qui nécessitent de sa part des adaptations notables et modifient sa place dans sa famille. Elle implique également une évolution du rôle parental.
Des attentes nouvelles surviennent à cette période, qui « peuvent être source de conflits, auxquels les parents ne sont pas toujours prêts, soit en raison du malaise qu’elles peuvent faire naître en eux, soit parce qu’ils ne peuvent ou ne souhaitent pas y répondre » (Stratégie nationale de soutien à la parentalité 2018-2022).
Vie affective et sexuelle. – Les actions en direction des jeunes et les familles pour répondre aux besoins d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle ont fait l’objet de programmes précis adaptés en fonction de l’âge (OMS, Unesco).
Un rapport du Défenseur des droits, intitulé « Droits de l’enfant en 2017 – Au miroir de la Convention internationale des droits de l’enfant,» dresse un bilan du suivi des recommandations de l’ONU, en particulier sur les thématiques du droit à la santé et de l’éducation à la sexualité. L’obligation de conduire des actions d’éducation à la sexualité est très peu suivie et ne développe pas suffisamment une approche globale et respectueuse des sexualités et des relations sexuelles et susceptible de contribuer à la lutte contre les préjugés et stéréotypes de sexe, d’identité, de genre et d’orientation sexuelle. Le rapport porte aussi une attention aux phénomènes de prostitution occasionnelle.
Sur les risques de prostitution. – Dans une contribution au rapport du Défenseur des droits, transmise en juin 2017, l’association Agir contre la prostitution des enfants indique que la prostitution occasionnelle « concerne les collégiennes ou lycéennes qui, de manière autonome et sans la supervision d’un tiers, consentent à exécuter des prestations sexuelles tarifées à leurs camarades d’établissement scolaire. Le risque réside justement dans le fait que la prostitution permet la valorisation de l’identité de ces adolescentes par le corps : elles sont belles et désirées, et ont donc de la valeur. L’éducation à la sexualité est fondamentale pour la construction d’une santé sexuelle et d’un bien-être identitaire, personnel et affectif solide pour l’adolescent. »
En juin 2021, un groupe de travail a par ailleurs rendu un rapport sur la prostitution des mineurs (voir https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_du_groupe_de_travail_sur_la_prostitution_des_mineurs.pdf ; voir aussi « Risque accru pour les ados placés », ASH n° 3218 du 16-07-2021).
Sur les réseaux sociaux. – Voir infra l’encadré « Actions d’information des parents sur le numérique ».
Sur la santé mentale. – La Défenseure des droits recommande aux directeurs académiques, en concertation avec les collèges et lycées, de diffuser à chaque rentrée scolaire, via un support adapté (livret d’accueil...), les informations relatives à la présence au sein de l’établissement, de l’assistante sociale et de l’infirmière scolaire. Une information systématique à destination des parents sur l’accès à la médecine scolaire doit aussi être organisée (Défenseur des droits, Rapport « Santé mentale des enfants : le droit au bien-être », 2021).
B. Médiateur familial
L’aide d’un médiateur familial peut être utile. Dans cette configuration, il ne s’agit pas d’un travail de médiation familiale entre les parents autour d’un conflit qui les oppose et dont l’enfant est l’enjeu, bien que des tensions dans la relation parentale puissent accompagner ces incompréhensions ou ces conflits. La médiation familiale parents-adolescents concerne un conflit dans cette relation, et va nécessiter que l’adolescent soit pleinement partie prenante de la médiation familiale. Le médiateur propose que celui-ci participe avec ses parents au processus de résolution des tensions familiales, tout en respectant les places et le rôle de chacun qu’implique la filiation parent-enfant, notamment l’autorité parentale sur l’enfant.
ACTIONS D’INFORMATION DES PARENTS SUR LE NUMÉRIQUE. UNE DÉMARCHE INTERACTIVE ET PRAGMATIQUE : L’OBSERVATOIRE DE LA PARENTALITÉ ET DU NUMÉRIQUE
Dépassionner le débat autour du numérique par une approche pragmatique « implique une permanente adaptation sur le fond et sur la forme des messages de prévention délivrés par l’Observatoire de la parentalité et du numérique, qu’il s’agisse de ses guides papiers, sites Internet ou de la communication sur les réseaux sociaux » (T. Rohmer, « L’Observatoire de la parentalité et du numérique [OPEN] : dépassionner le débat autour du numérique par une approche pragmatique », Informations sociales 2021/1, n° 202). En diversifiant les lieux des interventions et en privilégiant une approche interactive, la démarche de l’OPEN est au plus près des besoins et de la réalité de chaque personne, sans s’inscrire dans une situation de jugement peu propice aux échanges et réflexions. Des partenariats avec des collectivités, institutions locales ou des entreprises, conduisent à aller dans un théâtre, dans un centre social ou dans une cantine. Une formation adéquate des intervenants et une légitimité qui repose sur des compétences professionnelles et humaines permet de redonner sa place au mot le plus important : la parentalité.
Des balises d’âge
Concernant les écrans et le numérique, des « balises d’âge » ont été fixés par le psychiatre Serge Tisseron (S. Tisseron, « Les balises 3-6-9-12, un guide des écrans en famille, pour apprendre à s’en servir et à s’en passer », Informations sociales 2021/1, n° 202), qui affirme : « Comme pour les aliments, tout est question d’âge, de quantité, de moment » (voir également www.3-6-9-12.org). Soulignant l’importance de contextualiser le temps passé sur les écrans, il invite à se poser ces questions au sujet des écrans : quelle est leur place physique, où sont-ils ? Quelle est leur place dans l’emploi du temps de chacun et ensuite combien de temps l’enfant passe-t-il par jour à les regarder ? Et enfin quelle est leur place dans les échanges familiaux ?
Voir aussi Chapitre 2, Section 3 « L’UNAF : accompagner les familles dans leurs pratiques numériques ».
L’inscription de la médiation intra-familiale parents-adolescents au référentiel national de la médiation familiale fait partie des propositions de la stratégie nationale de soutien à la parentalité 2018-2022.
C. Maisons des adolescents : une ressource importante
L’accompagnement par les maisons des adolescents (MDA), structures multidisciplinaires originales, vise notamment les jeunes en situation de souffrance psychique. Lieux ressources sur l’adolescence, ces espaces tiers ont pour objectif d’apporter des réponses adaptées aux jeunes âgés de 11 à 21 ans, voire 25 ans pour certains. L’accueil se fait de façon libre, gratuite, confidentielle et possiblement anonyme. Environ plus d’une centaine de MDA accueillent l’adolescent, sa famille et des professionnels qui les entourent, avec un niveau d’implantation qui varie : dimension départementale ou territoire de santé spécifique (voir Informations sociales 2021/1, n° 202).
Des expériences de terrain sont conduites également sur l’usage des outils numériques en lien avec le repérage et la prévention du suicide.
Le repérage et la prévention du risque suicidaire sur les réseaux sociaux est révélateur du rôle à double tranchant des applications comme Facebook, Twitter, Instagram ou Snapchat. D’un côté, ces applications exposent à des menaces inédites par leur nature ou leur ampleur avec le « trolling » (modalité de communication en ligne caractérisée par une volonté systématique de provoquer, de déstabiliser ou de faire dégénérer les discussions), les défis... qui présentent des risques pour les jeunes de se voir vulnérabilisés, encouragés à l’autodestruction. D’un autre côté, ces applications permettent des modalités d’interactions singulières caractérisées par l’immatérialité, l’asynchronie (modalités d’échange en différé) et les jeux d’identité (emploi de pseudonymes ou d’avatars), d’où une impression de facilité qui libère l’expression. Certains adolescents qui taisent habituellement leurs idées suicidaires dans la vie « IRL » (« In Real Life ») en témoignent dans leurs publications numériques.
Il s’agit donc d’accompagner les adolescents dans leurs navigations. L’aide entre pairs est une piste possible.