A. Evolution du cadre juridique
1. DÉFINITION DE LA MÉDIATION FAMILIALE
Selon la définition adoptée par le Conseil national consultatif de la médiation familiale en 2002, « la médiation familiale est un processus de construction ou de reconstruction du lien familial axé sur l’autonomie et la responsabilité des personnes concernées par des situations de rupture ou de séparation dans lequel un tiers impartial, indépendant, qualifié et sans pouvoir de décision – le médiateur familial – favorise, à travers l’organisation d’entretiens confidentiels, leur communication, la gestion de leur conflit dans le domaine familial entendu dans sa diversité et dans son évolution ».
La loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale a introduit la médiation familiale dans le code civil (C. civ., art. 373-2-10).
2. RECOURS À LA MÉDIATION
La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice entend développer les modes de règlement amiable des différends. « A l’effet de faciliter la recherche par les parents d’un exercice consensuel de l’autorité parentale, le juge peut leur proposer une mesure de médiation (...) et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder, y compris dans la décision statuant définitivement sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale » (C. civ., art. 373-2-10, al. 2). Ainsi, la médiation a été étendue à la phase d’exécution de la décision relative à l’autorité parentale, via la médiation « post-sentencielle », la médiation ayant alors vocation à intervenir à l’issue du jugement dans le cadre de la gestion du conflit.
La loi visant à protéger les victimes de violences conjugales prévoit toutefois qu’une telle mesure ne peut être décidée si des violences sont alléguées par l’un des parents sur l’autre parent ou sur l’enfant, ou sauf emprise manifeste de l’un des parents sur l’autre parent (L. n° 2020-936, 30 juill. 2020).
B. Un champ large : types de médiation proposés
Le champ d’intervention de la médiation familiale concerne toutes les situations de ruptures familiales. Le soutien à la médiation familiale s’inscrit en outre dans le cadre, plus général, de la politique d’appui à la parentalité.
Il est à signaler que les services proposant exclusivement des médiations familiales judiciaires ne sont pas éligibles à certains financements des CAF ou des caisses de MSA, et ce, dans le but que des co-financements, notamment du ministre de la Justice, soient mis en œuvre.
Les situations suivantes peuvent relever de la médiation familiale :
- situations de séparation et de divorce ;
- conflits familiaux autour du maintien des relations intra-familiales ;
- conflits liés aux recompositions dans la famille ;
- conflits familiaux intergénérationnels entre :
- parents et jeunes adultes,
- parents et adolescents,
- grands-parents et parents permettant le maintien des liens entre grands-parents et petits-enfants (conflits intergénérationnels),
- frères et sœurs (fratries) et parents lorsque la perte d’autonomie d’un membre de la famille nécessite une prise de décision : intervention de tiers au domicile, accueil en établissement, mesure de protection...
- successions conflictuelles ;
- à l’occasion d’un contentieux familial, essentiellement en matière d’autorité parentale, de droit de visite (des père et mère ou des grands-parents) ou d’obligation alimentaire, une médiation familiale pouvant être engagée à l’initiative du juge ou des parties.
Plus largement, l’article 131-1 du code de procédure civile dispose ainsi que : « Le juge saisi d’un litige peut, après avoir recueilli l’accord des parties, ordonner une médiation. Le médiateur désigné par le juge a pour mission d’entendre les parties et de confronter leurs points de vue pour leur permettre de trouver une solution au conflit qui les oppose » (D. n° 2022-245, 25 févr. 2022, favorisant le recours à la médiation, portant application de la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire et modifiant diverses dispositions).
C. Expérimentation d’une médiation familiale systématique
Depuis la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011, le recours à la médiation familiale en matière d’autorité parentale et de contribution à l’entretien de l’enfant – sauf dans certaines situations – est expérimentée. Cette expérimentation a été renouvelée et élargie (L. n° 2016-1547, 18 nov. 2016, art. 7 ; Arr. 16 mars 2017, NOR : JUSB1707997A).
Les tribunaux judiciaires qui participent à cette expérimentation, autorisée en dernier lieu jusqu’au 31 décembre 2022, sont : Bayonne, Bordeaux, Cherbourg-en-Cotentin, Evry, Nantes, Nîmes, Montpellier, Pontoise, Rennes, Saint-Denis et Tours.
D. Articulation avec la médiation ordonnée par le juge des enfants
Lorsque le juge des enfants ordonne une mesure d’assistance éducative, il peut proposer aux parents une mesure de médiation familiale, sauf si des violences sur l’autre parent ou sur l’enfant sont alléguées par l’un des parents, ou sauf emprise manifeste de l’un des parents sur l’autre parent. Après avoir recueilli leur accord, il peut désigner un médiateur familial pour y procéder.
Il informe également les parents des mesures dont ils peuvent bénéficier au titre du code de l’action sociale et des familles, au titre des articles L. 222-2 à L. 222-4-2 et L. 222-5-3 (aide à domicile, allocation mensuelle, accueil du mineur, pendant tout ou partie de la journée, dans un lieu situé, si possible, à proximité de son domicile, afin de lui apporter un soutien éducatif, ainsi qu’un accompagnement à sa famille dans l’exercice de sa fonction parentale, accueil dans un centre parental pour les enfants de moins de trois ans) (C. civ., art. 375-4-1 ; L. n° 2022-140, 7 févr. 2022, art. 14).
Dans une note juridique de mai 2022, l’Observatoire national de la protection de l’enfance s’interroge sur le financement des mesures de médiation ordonnées dans ce cadre, compte tenu de désengagements possibles de l’Etat. Restera aussi à déterminer l’articulation entre intervenants et la possible compétence partagée entre le juge des enfants et le juge aux affaires familiales.
E. Cadre partenarial de la médiation familiale
Le développement de l’offre de médiation familiale est porté par la formalisation de partenariats organisés à l’échelon national et au niveau départemental (Circ. CNAF n° 2014-017, 30 avr. 2014 ; Convention-cadre nationale ministère des Solidarités et de la Santé, ministère de la Justice, CNAF et CCMSA relative à la prévention et à l’accompagnement des ruptures familiales 2022-2024, mars 2022).
La convention-cadre nationale « s’inscrit dans la politique de développement des services aux familles » et « se traduit notamment par le développement d’une offre territoriale diversifiée et de proximité ».
Elle constitue le levier pour renforcer la coopération entre les acteurs concernés et en particulier :
- les directions départementales de l’emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations (DDETSPP) ;
- les cours d’appel, qui sont chargées de décliner localement la politique de développement de la médiation familiale et des espaces de rencontre ;
- les CAF et les caisses de MSA.
Peuvent être associés à ce partenariat les délégués départementaux aux droits des femmes, en charge du suivi des conventions pluriannuelles d’objectifs avec les établissements d’information, de consultation et de conseil familial (EICCF), dénommés désormais « espaces de vie affective, relationnelle et sexuelle » (EVARS) (D. n° 2018-169, 7 mars 2018).
Ce partenariat doit s’incarner dans le cadre des comités départementaux des services aux familles (CDSF) prévus par l’ordonnance relative aux services aux familles ainsi que dans les schémas départementaux des services aux familles.