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L’INSTAURATION D’UNE PRÉSOMPTION IRRÉFRAGABLE D’ABSENCE DE CONSENTEMENT POUR LES MINEURS DANS CERTAINES HYPOTHÈSES

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Option possible – Les modifications législatives récentes dont on vient de rendre compte n’avaient pas épuisé le débat sociétal relatif au consentement du jeune mineur à l’acte sexuel. De nouvelles affaires médiatiques ont suscité l’émotion de l’opinion, des acquittements et des relaxes intervenant faute de caractérisation d’une contrainte par l’auteur, ce en dépit du jeune âge de la victime et/ou de la grande différence d’âge entre la victime et l’auteur. La réforme majeure du 21 avril 2021(1) conduit cette fois-ci le législateur au bout de la logique qui l’animait, en instituant une présomption irréfragable d’absence de consentement pour le mineur, dans certains cas : soit à raison du jeune âge du mineur (moins de 15 ans), soit à raison du caractère incestueux de la relation.


A. Une présomption irréfragable d’absence de consentement pour les mineurs de quinze ans, sous certaines conditions

La problématique posée par l’idée d’un âge-seuil – Certains invitaient le législateur à fixer un âge-seuil au-dessous duquel le mineur ne saurait consentir à l’acte sexuel. Cette solution était périlleuse, dans la mesure où le droit pénal français ne fixe aucun âge-seuil pour la responsabilité pénale des mineurs, notamment en matière sexuelle (même si, sur le plan de la réponse pénale, on s’en tient pour les plus jeunes mineurs à des mesures éducatives). Certains estiment en effet peu cohérent qu’un mineur puisse être jugé responsable d’un viol par contrainte – ce qui implique qu’il avait la capacité de comprendre l’absence de consentement de la victime – tout en se voyant interdire la faculté de consentir lui-même librement à un acte sexuel, au motif qu’il n’aurait pas la maturité suffisante pour se savoir consentant.
Critère alternatif retenu par le législateur – Avec la loi du 21 avril 2021, plutôt que de fixer ouvertement un âge-seuil, le législateur a prévu plusieurs hypothèses dans lesquelles le consentement est strictement impossible, en fixant un critère cumulatif et un critère alternatif. Le critère obligatoire est que la victime soit un mineur de quinze ans. Si cette première condition est satisfaite, alors une seconde est nécessaire, alternative cette fois. Il y aura ainsi viol : premièrement lorsque la différence d’âge entre l’auteur majeur et la victime est d’au moins cinq ans ; et deuxièmement lorsque « les faits sont commis en échange d'une rémunération, d'une promesse de rémunération, de la fourniture d'un avantage en nature ou de la promesse d'un tel avantage ».
La question de la constitutionnalité du texte – On le voit, si le législateur s’écarte apparemment de la logique consistant à fixer un âge-seuil, il y revient en réalité. En fixant à cinq ans la différence d’âge maximale entre le majeur et le mineur, il interdit en effet de facto toute relation sexuelle entre un majeur et un mineur de 13 ans. La rédaction adoptée a seulement pour objet de faire échapper à la présomption les relations qui se noueraient entre un jeune majeur et un adolescent (exemple : 18 ans et 14 ans). Le Conseil constitutionnel sera certainement appelé à statuer sur la conformité du nouveau dispositif à nos principes souverains. La présomption irréfragable de viol qui existe désormais pour toute relation sexuelle entre une personne de bientôt 15 ans et une autre d’à peine 20 ans sera-t-elle jugée valable ?


B. Une présomption irréfragable d’absence de consentement pour les mineurs en cas d’inceste

Définition – La réforme du 21 avril 2021 a par ailleurs institué, à l’article 222-23-2 du code pénal, une nouvelle infraction dite de « viol incestueux », qui recèle une seconde présomption irréfragable d’absence de consentement. Pour l’appréciation de cette seconde hypothèse, l’âge du mineur est désormais indifférent. Le critère du viol incestueux réside exclusivement dans la nature des liens entrentenus par le majeur et le mineur. En premier lieu, il y a automatiquement viol lorsque le majeur est un ascendant du mineur. En second lieu, il y a automatiquement viol lorsque le majeur est un frère, une sœur, un oncle, une tante, un grand-oncle, une grand-tante, un neveu ou une nièce, ainsi que le conjoint, le concubin et le partenaire de l’une de ces personnes, à la condition qu’il ou elle ait une autorité de droit ou de fait sur le mineur.
Précisions sur la notion de relation sexuelle incestueuse – La notion d’inceste a été inscrite pour la première fois avec la loi du 8 février 2010. Elle figure aux articles 222-31-1 et 227-27-2 du code pénal. Ces dispositions ont toutefois été censurées par le Conseil constitutionnel en raison de leur imprécision. En 2016, le législateur a réintroduit le texte relatif à l’inceste sur mineur, sans cependant l’assortir de la moindre conséquence sur la peine. Purement symbolique, le texte se réclamait ainsi d’un effet thérapeutique sur les victimes. Désormais, l’inceste peut donc donner lieu à une peine extrêmement sévère lorsque la victime est mineure, tandis qu’il demeure une simple circonstance symbolique lorsque la victime est majeure.
RELATIONS SEXUELLES ENTRE UN MAJEUR ET UN MINEUR DE 15 ANS
▸ viol ou agression sexuelle si :
• différence d’âge de plus de cinq ans
• inceste
• prostitution
• violence ou menace
• contrainte, entendue spécialement comme l’abus de l’état de vulnérabilité du mineur
▸ atteinte sexuelle si :
• toujours
RELATIONS SEXUELLES ENTRE UN MAJEUR ET UN MINEUR DE PLUS DE 15 ANS
▸ viol ou agression sexuelle si :
• violence ou menace
• contrainte, laquelle peut résulter de l’importante différence d’âge ou de l’autorité de droit ou de fait sur le mineur
▸ atteinte sexuelle si :
• autorité de droit ou de fait sur la victime
• abus de l’autorité que confèrent les fonctions du majeur


(1)
Loi n° 2021-478 du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l’inceste.

SECTION 1

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