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LA PRISE EN COMPTE DE LA NATURE SEXUELLE DE L’INFRACTION DANS LES POURSUITES

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A. La prééminence de la territorialité dans la détermination de la compétence de la loi pénale française

La justice pénale est un attribut essentiel de la souveraineté de chaque Etat et il semble difficilement concevable qu’un Etat applique la loi pénale d’un autre Etat. Cette solution résulte du dogme de la solidarité des compétences judiciaire et législative. Contrairement à ce qui se produit classiquement en matière civile, un juge national ne peut appliquer que la loi pénale de son Etat souverain, et réciproquement la loi pénale d’un pays ne peut être appliquée que par le juge de ce pays.
Le principe de territorialité est donc central dans la répression en droit pénal international. Fondé sur l’article 113-2 du code pénal, il est entendu de façon extensive par la jurisprudence, de sorte que des infractions qui ne présentent qu’un lien ténu avec la France sont attraites sous la compétence du juge français qui, en application du principe de solidarité, appliquera le droit pénal français.
Sous réserve du respect du principe « Non bis in idem » – l’interdiction de poursuivre et de juger une personne deux fois pour des mêmes faits – et du respect de certaines particularités qu’il n’est pas opportun de développer ici, le code pénal admet des chefs de compétence subsidiaire de la loi française. Celle-ci peut ainsi trouver à s’appliquer y compris lorsque les faits ont été intégralement commis à l’étranger, dès lors qu’est de nationalité française l’auteur des faits (on parle alors de « compétence personnelle active ») ou la victime (on parle de « compétence personnelle passive »).


DES VIOLS CONNEXES MAIS PAS INDIVISIBLES

Dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt du 31 mai 2017 de la Cour de cassation, une personne était poursuivie en France pour de multiples viols sur deux mineurs, au sein du cercle familial. Mais la majeure partie de ces infractions avaient été commises en Belgique et en Suisse, et ni la victime ni l’auteur des faits n’avaient la nationalité française. La chambre criminelle a annulé la mise en examen des chefs de tous les viols commis à l’étranger : la circonstance que ces crimes aient été commis dans des circonstances très similaires à ceux commis en France, par le même auteur sur les mêmes victimes, à des dates rapprochées, ne suffit pas à créer entre eux un lien d’indivisibilité. Les uns pourraient exister sans les autres. Ces viols sont seulement connexes, ce qui ne permet pas (contrairement à l’indivisibilité) de fonder la compétence de la loi pénale française.


B. La compétence étendue de la loi pénale française en matière d’infractions sexuelles

Pour certaines infractions sexuelles, le législateur a prévu un chef de compétence spécifique de la loi pénale française. Ces dispositions ont pour objet assumé de permettre la répression du tourisme sexuel, entendu comme le fait de se rendre dans un pays où les mineurs sont moins bien protégés pour abuser d’eux, avant de revenir en France où l’auteur vit. Dans ces cas particuliers, le législateur a permis qu’on puisse réprimer le simple résident étranger en France pour ces faits commis à l’étranger, nonobstant l’absence de critère de compétence habituel de la loi pénale française.
L’article 222-22, alinéa 3, du code pénal dispose ainsi que lorsque les agressions sexuelles sont commises à l’étranger par un Français ou « par une personne résidant habituellement sur le territoire français », la loi pénale française est applicable sans qu’il soit nécessaire qu’un des faits constitutifs de l’infraction ait été commis en France ni même que les poursuites aient été précédées d’une plainte de la victime ou d’une dénonciation officielle par l’autorité du pays où le fait a été commis.
Il en va exactement de même du proxénétisme aggravé, notamment sur mineur, commis à l’étranger par un Français ou « par une personne résidant habituellement sur le territoire français », et même du recours à la prostitution lorsqu’il est aggravé. Sur ce dernier point, on peut légitimement s’interroger sur la pertinence d’une extension aussi rare de la compétence de la loi pénale française, alors qu’au sein même du territoire de la République, le recours à la prostitution n’a longtemps pas été systématiquement sanctionné (v. supra, Chapitre 1).

SECTION 2 - INFRACTIONS SEXUELLES ET DROIT PÉNAL DE FOND

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