Notion. – Le « consentement à l’acte sexuel » est une notion particulièrement délicate à cerner. Elle relève du for intérieur et évoque un processus intellectuel et psychologique, voire émotionnel, interne à l’individu – dont le résultat ne s’extériorise d’ailleurs pas nécessairement. Il est par ailleurs très varié. Parfois puissant et solidement ancré, parfois fragile et éphémère. On en perçoit souvent précisément les causes, mais parfois aussi ses ressorts nous échappent. Ces incertitudes paraissent faire obstacle à une définition rigide et désincarnée du consentement. Il faut pourtant ici composer avec les exigences du droit pénal et notamment le principe constitutionnel de légalité criminelle, qui commande au législateur de définir de façon suffisamment claire et précise les notions auxquelles il a recours pour fixer les contours d’une infraction.
C’est pourquoi le législateur n’a pas délégué au juge le soin d’apprécier, de façon parfaitement libre, si le plaignant a « consenti » ou non à l’acte sexuel. Une définition aussi souple, s’agissant d’une notion déjà fuyante par elle-même, aurait concédé au juge une marge d’appréciation peu commune en droit pénal. C’est la raison pour laquelle le législateur a défini cet élément constitutif de l’infraction non pas de façon conceptuelle et abstraite, mais en édictant quatre moyens concrets de pression susceptibles d’être employés pour outrepasser l’absence de consentement de la victime : ce sont les quatre adminicules prévus à l’article 222-22 du code pénal : la violence, la contrainte, la menace et la surprise.
Il convient de s’y intéresser de deux manières cumulatives : d’abord pour caractériser l’absence de consentement tel qu’il est vécu par la victime – autrement dit au titre de l’élément matériel (§ 1) – puis tel qu’il est perçu par l’auteur – autrement dit au titre de l’élément moral (§ 2).
A titre liminaire, indiquons dès à présent que des voix s’élèvent pour remettre en cause cette logique, en appelant à une définition plus large du consentement (et donc de son absence), apte à permettre au juge d’appréhender des situations qui pourraient, aujourd’hui, échapper injustement à la sanction. Ce débat met en jeu des principes moraux sur lesquels il n’y a pas lieu de nous prononcer ici. Observons simplement, en tant que praticiens, que la quasi-totalité des situations que nous avons rencontrées relevaient de la définition actuelle, et qu’il nous paraît peu sage de légiférer sur un sujet aussi vital dans le seul objet d’appréhender les hypothèses rarissimes, quoique médiatisées, qui ont pu se présenter.