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LIMITES ET CRITIQUES DE LA LICÉITÉ DU SADOMASOCHISME

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Nécessité d’un contentement ferme et pérenne. – Si la liberté sexuelle peut être invoquée pour faire échec à la répression de comportements jugés en principe illicites, le sadomasochisme n’est évidemment acceptable que dans la mesure où les participants y ont librement et pleinement consenti. La limite du sadomasochisme, en tant que pratique licite, réside donc dans le respect de la volonté du partenaire objet des actes attentatoires à son intégrité physique. Ce consentement doit évidemment s’apprécier durant toute la durée de l’acte sexuel et être renouvelé : une simple acceptation initiale n’autorise pas à présumer que cet accord serait irrévocable. Ainsi, en 2005, la Cour européenne a-t-elle approuvé la condamnation des requérants qui n’avaient pas interrompu leurs pratiques en dépit du fait que la victime avait crié « pitié ! » et « stop ! ».
Critiques persistantes. – Même ainsi conçue, la licéité du sadomasochisme demeure très critiquée, et ce à plusieurs égards. En premier lieu, certains voient dans la dépénalisation du sadomasochisme l’expression plus générale d’un mouvement contemporain d’individualisation du droit pénal et des droits de l’Homme qui serait critiquable. Pour eux, il manifesterait même le passage du monde de « l’homme des droits de l’Homme » au monde de « l’homme sadien », qui voudrait mettre l’Etat au service de ses désirs, au point que « la loi a changé de fonction ; elle n’est plus ce qui institue la liberté mais ce qui permet à la transgression d’exister comme liberté »(1).
En deuxième lieu, d’aucuns soulignent qu’il est admis de longue date que le consentement de la victime est indifférent en droit pénal, solution notamment consacrée dans l’affaire dite des « stérilisées de Bordeaux » dans les années 1930. Certains auteurs jugent ainsi très contestable l’évolution de l’appréhension pénale du sadomasochisme, car elle aboutirait à un « droit de frapper et blesser autrui dans un but de jouissance sexuelle, donc ce qu’on pourrait appeler un “droit au sadisme” ». « Les droits de l’Homme seraient vidés de toute portée si le consentement de la victime suffisait à se dispenser de les respecter »(2). Selon ces auteurs, le droit ne devrait pas tout abandonner aux consentements individuels et devrait assurer la protection de l’ordre public « envers et contre tous ».
En troisième lieu, permettre au consentement de faire échec à des infractions serait ignorer la complexité et la fragilité de ce consentement, notamment dans les hypothèses où l’individu, placé dans un état de dépendance affective, manque de lucidité et se plie malgré lui aux désirs de son partenaire. C’est une critique que nous retrouverons au sujet de la prostitution, avec la crainte d’une contrainte économique et sociale altérant le consentement des auteurs.
En quatrième et dernier lieu, il a pu être rappelé que le recours à la notion de « dignité humaine » permet d’ores et déjà de protéger l’individu contre lui-même : ainsi le « lancer de nains » a-t-il fait l’objet de sanctions remarquées(3). A fortiori, cette notion est de nature à refuser toute maltraitance – même consentie – pratiquée par autrui.


(1)
R. Pellet, La protection de la santé et le consentement aux risques sexuels, Actes du colloque « Consentement et santé », 20e anniversaire de l’AFDS, 2012, Dalloz, 2014.


(2)
M. Fabre-Magnan, « Le sadisme n’est pas un droit de l’homme », D. 2005, p. 2973.


(3)
CE, ass., 27 oct. 1995, n° 136727, Commune de Morsang-sur-Orge, Rec. Lebon, p. 372.

SECTION 1 - LE SADOMASOCHISME ET LA LIBERTÉ SEXUELLE

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