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NOTIONS DE « VULNÉRABILITÉ » ET D’« AUTONOMIE »

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L’autonomie étant au cœur des actions conduites pour aider ou accompagner des personnes, comment préserver cette capacité d’autonomie et entendre leur volonté ? Comment l’autonomie peut-elle être préservée alors même que le terme de « vulnérabilité » est utilisé pour décrire ces groupes de personnes (parmi lesquelles des personnes âgées, des personnes en situation de handicap et de manière générale les personnes qui vivent dans la précarité) ?
Un exemple de l’association faite entre vulnérabilité et catégories de personnes : une protection est spécifiquement accordée en application de critères de « vulnérabilité » (voir en ce sens les possibilités de placement en chômage partiel pour les personnes vulnérables risquant de développer une forme grave d’infection ainsi que les salariés qui partagent le même domicile que ces personnes, D. n° 2020-1365, 10 nov. 2020). L’ambiguïté naît d’une contradiction – au moins apparente – entre l’affirmation d’une volonté d’aller vers la reconnaissance d’autonomie et la nécessité de protéger.
La notion de « vulnérabilité » ne recoupe pas nécessairement la notion de « protection juridique » : des personnes majeures considérées comme « vulnérables » ne sont pas nécessairement sous protection au sens juridique : sauvegarde de justice, tutelle, curatelle. Ce point est rappelé dans une note d’orientation du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge et du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH).
Ne serait-il pas plus juste d’évoquer des situations de vulnérabilité, dans le sens où la vulnérabilité marque le rapport à l’autre ?
Et il convient de noter que les besoins de la personne, qui font l’objet d’une évaluation, s’inscrivent dans une démarche de « projet de vie ». En ce sens, la place de l’aidant qui apporte son aide pour accomplir des actes (qui peuvent concerner l’intimité du corps) n’est-elle pas de s’adapter aux capacités de la personne et à son rythme : ne pas brusquer, choisir le moment, dialoguer. Si la personne est en train de faire une activité, au moment de l’arrivée de l’aide, il est possible de voir, par exemple, si l’ordre et le déroulement du temps d’accompagnement planifié peuvent être modifiés. L’objectif est d’apporter l’aide dont elle a besoin, tout en respectant son intimité et son espace privé.


A. Exemple de la vie quotidienne (indicatif)

Côté aidé/côté aidant (source : Revue Aider, sept. 2017, n° 2)
L’aidée (35 ans) souffre, à la suite d’un accident avec traumatisme crânien, de troubles de la vigilance, du sommeil de la parole, de troubles sensoriels (audition et odorat). Elle s’est levée et est restée en jogging, après avoir fait une légère toilette. Avec ses deux chats, qu’elle a récemment accueillis, elle s’est installée devant la télévision pour regarder une émission. Les chats dorment sur ses genoux et elle les câline.
L’aidante entre dans l’appartement. Elle a les clés et ouvre sans frapper. Elle fait une remarque sur l’odeur des chats. L’aidée ne répond pas. Sa mère, qui est présente, assiste à une scène : l’auxiliaire de vie refait des remarques sur l’odeur et éteint la télévision, déloge les chats des genoux et entraîne l’aidée dans la salle de bains.


DÉCRYPTAGE

Côté aidé

La douche prise à contrecœur, l’aération en grand de l’appartement, le « grand » ménage sont ressentis par certaines personnes comme quelque chose de violent, voire d’insupportable.

Côté aidant

L’ordre que l’auxiliaire de vie programme chaque jour est : la toilette, le petit déjeuner, le ménage, les courses, et la préparation des repas pour le midi et le soir.
Elle ressent de l’agacement face aux hésitations et lenteurs de la jeune femme, mais celle-ci souffre de troubles importants qui ne sont pas visibles.

Bonnes pratiques

La douche prise à contrecœur, l’aération en grand de l’appartement, le « grand » ménage sont ressentis par certaines personnes comme quelque chose de violent, voire d’insupportable.
Pourtant, les soins d’hygiène sont en effet fondamentaux, mais si la personne ne veut pas prendre de douche un matin, il vaut mieux tenter la négociation plutôt que l’affrontement. De même aérer est nécessaire, mais pourquoi ne pas le faire en différant le moment ? La mère de la jeune femme n’est pas intervenue et a préféré attendre d’être moins émue. Elle rappelle à l’auxiliaire de vie que sa fille souffre de troubles de l’odorat et que tout changement brutal est vécu comme une violence insoutenable. Elle a besoin de se sentir en sécurité.
Ce moment traduit aussi un besoin de repos pour l’aidante.


B. Fragilité et dangerosité – risques de stigmatisation sous l’effet de logique sécuritaire

Dans un avis du 22 janvier 2021, le CNCPH dénonce trois décrets parus le 2 décembre 2020 modifiant les dispositions du code de la sécurité intérieure relatives au traitement de données à caractère personnel. Ces décrets modifient le code de la sécurité intérieure et précisent que pourront être enregistrées des données à caractère personnel intéressant la sûreté de l’État ou pouvant porter atteinte à la sécurité publique. En outre, ils créent trois fichiers successivement dénommés « Enquêtes administratives liées à la sécurité publique », « Prévention des atteintes à la sécurité publique » et « Gestion de l’information et prévention des atteintes à la sécurité publique ».
Parmi les données qui vont pouvoir être relevées et stockées dans ces fichiers (utilisés pour réaliser les enquêtes préalables à certains recrutements dans la fonction publique), le CNCPH relève :
  • comme facteurs de dangerosité : les troubles psychologiques ou psychiatriques, qui pourront être recueillis conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur ;
  • comme facteurs de fragilité : des données telles que le comportement auto-agressif (comme les auto-mutilations, voire les tentatives de suicide) ou les addictions, sans oublier les mesures de protection (curatelle ou tutelle).
Le CNCPH relève qu’en introduisant des « facteurs de fragilité » dans « les données intéressant la sûreté de l’État », ces textes réglementaires vont à l’encontre de la loi du 11 février 2005 et de plusieurs conventions internationales (Convention internationale relative aux droits des personnes handicapées, ratifiée par la France en 2010, et la Convention internationale relative aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989) en générant des discriminations fondées sur le handicap et l’état de santé.

SECTION 3 - RELATION D’AIDE : UNE QUESTION D’INTIMITÉ, DE RESPECT ET DE DIGNITÉ

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