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L’EXPRESSION DU REFUS

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Corollaire de la liberté du patient, le refus de consentement doit être éclairé. Il s’exprime en lien avec le droit à information (CSP, art. L. 1111-2 et L. 1111-4). Pour que ce refus soit éclairé, le droit à information doit être respecté.
« Toute personne a le droit de refuser ou de ne pas recevoir un traitement. Le suivi du malade reste cependant assuré par le médecin, notamment son accompagnement palliatif. Le médecin a l’obligation de respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix et de leur gravité. Si, par sa volonté de refuser ou d’interrompre tout traitement, la personne met sa vie en danger, elle doit réitérer sa décision dans un délai raisonnable. »
« Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment » (CSP, art. L. 1111-4).
Un médecin ne peut se borner à prendre acte d’un refus de soins sans informer son patient des risques graves encourus du fait de cette opposition au traitement préconisé (Cass. 1re civ., 15 nov. 2005, n° 04-18180).
Dans les lignes générales, un médecin n’est pas tenu de réussir à convaincre son patient du danger de l’acte médical qu’il demande (refus par le patient d’une anesthésie générale, le médecin acceptant de pratiquer une anesthésie seulement locale mais plus risquée) (Cass. 1re civ., 18 janv. 2000, n° 97-17716 P). Et en tout état de cause, il ne peut plus, en principe, passer outre sa volonté.


A. Comment le refus se caractérise-t-il ?

Le droit au refus de soins consacre l’autonomie du patient. Il apparaît comme un acteur participant à la décision médicale et peut refuser tout traitement (CSP, art. L. 1111-4).
Encore faut-il, comme évoqué ci-dessus, que ce refus soit « éclairé » (voir en ce sens, Cass. 1re civ., 15 nov. 2005, précité).
D’un point de vue éthique, la question a fait l’objet d’un avis du Comité consultatif national d’éthique (CCNE, avis n° 87, précité). Le refus peut sembler lié à un défaut de discernement, chez un malade en situation de souffrance, dans un état de vulnérabilité particulière, parfois à l’approche de la mort (sur ces notions, v supra, Chapitre 1) et, jugé à l’aune de l’efficacité médicale, il apparaît comme « une sorte de contrainte, une transgression du principe de bienveillance » (notamment dans des situations où la vie d’une personne ou d’un enfant est en danger : cas des transfusions sanguines analysées dans l’avis). L’expression de la liberté individuelle interpelle la personne et son entourage, la médecine, la société, la justice. (voir aussi, Y. Favier, « Fragilité et vulnérabilité : réflexions autour du consentement des personnes âgées », RD sanit. et soc. 2015, p. 702).
D’un point de vue juridique, le consentement et le droit de refuser nécessitent de se poser les questions relatives au mode d’expression du consentement, au moment et à la preuve de celui-ci, et en amont la question du droit à information en vue d’un refus éclairé (voir supra, Chapitre 1).


B. Comment le refus s’exprime-t-il ?

Hormis les cas où la loi impose un formalisme précis, selon les actes médicaux, l’écrit n’est pas spécifiquement requis. De la même manière qu’une feuille de « consentement éclairé » signée par le patient ne satisfait pas aux obligations d’information (prévues à l’article R. 4127-36 du code de la santé publique) si elle a une portée trop générale (CNOM, 5 juill. 2019, précité), serait-il possible de considérer qu’une simple feuille mentionnant le refus de consentir ne suffit pas ?
Surtout si le refus met la vie de la personne en danger : l’ensemble de la procédure doit dans ce cas être inscrite dans le dossier médical (CSP, art. L. 1111-4). Voir supra, Chapitre 1.


C. À quel moment le refus s’exprime-t-il ?

Certains actes sont soumis à un délai de réflexion.
Ce délai doit donc être respecté (CSP, art L. 2212-5 pour l’interruption volontaire de grossesse [IVG[ ; art. L. 2141-10 pour la procréation médicalement assistée [PMA[ ; art. L. 2151-6 pour les recherches sur des embryons conçus in vitro ; art. L. 2123-1 et L. 2123-2 pour la stérilisation contraceptive ; art. L. 6322-2 et D. 6322-30 pour la chirurgie esthétique).


D. Qui formule et exprime le refus ?

Le statut juridique joue un rôle capital (majeur, mineur, mineur émancipé, majeur protégé, incapable...).
La personne qui exprime le refus est en principe le patient en priorité.
Concernant les personnes qui souhaitent quitter l’hôpital, si le médecin-chef de service estime que cette sortie est prématurée et présente un danger pour leur santé, les intéressés ne sont autorisés à quitter l’établissement qu’après avoir rempli une attestation établissant qu’ils ont eu connaissance des dangers que cette sortie présente pour eux.
Lorsque le malade refuse de signer cette attestation, un procès-verbal de ce refus est dressé (CSP, art. R. 1112-62).
La démarche est la suivante :
▸ informer oralement de façon claire, loyale et intelligible le malade ou ses parents (s’il s’agit d’un mineur) sur sa pathologie, sur le traitement proposé et sur les risques encourus s’il refuse la prise en charge médicale proposée ;
▸ si le malade persiste, le médecin doit mettre par écrit les informations données oralement, tout en respectant les règles relatives au secret professionnel ;
▸ la rédaction du document et sa remise au malade sont effectuées en présence d’un tiers soignant. Le caractère impératif de l’information médicale est donné par un médecin ;
▸ la signature par le malade ou son représentant sera précédée par une relecture orale en s’assurant que tous les termes sont compris ;
▸ si le malade refuse de signer, il faut établir un procès-verbal de constat de refus de signer, toujours en présence d’un tiers soignant. Une fois que toutes les conditions précitées sont réunies et l’information adaptée, la sortie du malade est possible ;
▸ informer le médecin traitant en lui adressant un courrier lui précisant les conditions de la sortie de son patient ;
▸ adresser un courrier au malade lui rappelant les nécessités du traitement et lui indiquer la possibilité de revenir sur sa décision. Des consignes claires et précises sont laissées afin de joindre le bon interlocuteur ;
▸ s’assurer du retour à domicile du malade.


E. Majeur capable

Dans le cas du majeur capable, en premier lieu, le majeur doit exprimer son consentement et, par conséquent, son refus éventuel. Ce principe se comprend aussi en lien avec le secret médical. Dès lors que la personne a la capacité juridique pour donner et donc de refuser son consentement, le médecin ne doit pas révéler l’état de santé à des tiers.
Dans le cas où la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, il peut s’agir d’un tiers, d’une personne de confiance, de la famille et des proches. Aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance ou la famille, ou, à défaut, un de ses proches, ait été consulté.
Les directives anticipées sont prises en compte. Avec toutefois une appréciation faite par un médecin qui, en pratique, peut en limiter les effets (voir p. 47).


F. Mineurs

Le consentement du mineur doit être systématiquement recherché s’il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision.
Quid si la décision parentale risque d’entraîner des risques graves ?
Dans le cas où le refus d’un traitement par la personne titulaire de l’autorité parentale ou par le tuteur risque d’entraîner des conséquences graves pour la santé du mineur ou du majeur sous tutelle, le médecin délivre les soins indispensables (CSP, art. L. 1111-4).
Ainsi, en présence de signes cliniques de péril vital imminent présentés par un enfant et en l’absence de produits de substitution disponibles dans le département, le recours à des transfusions sanguines étant le seul moyen de sauvegarder la vie de l’enfant mineur, les médecins qui choisissent de donner ces soins indispensables, malgré l’opposition des parents, ne commettent pas de faute (CAA Bordeaux, 4 mars 2003, n° 99BX02360).
En revanche, en l’absence de péril immédiat, le fait d’administrer de la morphine à un enfant gravement handicapé, malgré l’opposition de la mère, sans mettre en œuvre les voies de droit, permettant de contourner ce refus, contredit l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (Cour européenne des droits de l’Homme [CEDH[, 9 mars 2004, n° 61827/00). Des examens non urgents ne doivent pas être réalisés sans l’autorisation des parents (CEDH, 23 mars 2010, nos 45901/05 et 45901/06).


G. Personnes responsables de la protection juridique

L’article L. 1111-4 du code de la santé publique envisage les situations de refus de soins opposés par les personnes responsables de la protection juridique ou de la représentation du patient en reprenant des principes qui avaient été dégagés par la jurisprudence.
Le consentement de la personne majeure faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne doit être obtenu si elle est apte à exprimer sa volonté, au besoin avec l’assistance de la personne chargée de sa protection.
Lorsque cette condition n’est pas remplie, il appartient à la personne chargée de la mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne de donner son autorisation en tenant compte de l’avis exprimé par la personne protégée. Sauf urgence, en cas de désaccord entre le majeur protégé et la personne chargée de sa protection, le juge autorise l’un ou l’autre à prendre la décision.
Dans le cas où le refus d’un traitement par la personne chargée de la mesure de protection juridique faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative risque d’entraîner des risques graves pour la santé du majeur protégé, le médecin délivre les soins indispensables.


CAS OÙ LE MINEUR S’OPPOSE À LA CONSULTATION IMPOSÉE PAR LES TITULAIRES DE L’AUTORITÉ PARENTALE

Par dérogation, le médecin ou la sage-femme peut se dispenser d’obtenir le consentement du ou des titulaires de l’autorité parentale sur les décisions médicales à prendre lorsque l’action de prévention, le dépistage, le diagnostic, le traitement ou l’intervention s’impose pour sauvegarder la santé d’une personne mineure, dans le cas où cette dernière s’oppose expressément à la consultation du ou des titulaires de l’autorité parentale afin de garder le secret sur son état de santé. Toutefois, le médecin ou la sage-femme doit, dans un premier temps, s’efforcer d’obtenir le consentement du mineur à cette consultation. Dans le cas où le mineur maintient son opposition, le médecin ou la sage-femme peut mettre en œuvre l’action de prévention, le dépistage, le diagnostic, le traitement ou l’intervention. Dans ce cas, le mineur se fait accompagner d’une personne majeure de son choix (CSP, art. L. 1111-5).
Lorsqu’une personne mineure, dont les liens de famille sont rompus, bénéficie à titre personnel du remboursement des prestations en nature de l’assurance maladie et maternité et de la couverture complémentaire, son seul consentement est requis.
Par dérogation, l’infirmier peut également se dispenser d’obtenir le consentement du ou des titulaires de l’autorité parentale sur les décisions à prendre lorsque l’action de prévention, le dépistage ou le traitement s’impose pour sauvegarder la santé sexuelle et reproductive d’une personne mineure, dans le cas où cette dernière s’oppose expressément à la consultation du ou des titulaires de l’autorité parentale afin de garder le secret sur son état de santé.
Toutefois, l’infirmier doit, dans un premier temps, s’efforcer d’obtenir le consentement du mineur à cette consultation. Dans le cas où le mineur maintient son opposition, l’infirmier peut mettre en œuvre l’action de prévention, le dépistage ou le traitement.
Dans ce cas, le mineur se fait accompagner d’une personne majeure de son choix (CSP, art. L. 1111-6).


H. À qui incombe la charge de la preuve ?

Le médecin, tenu à l’obligation d’information, est tenu de prouver qu’il a rempli cette obligation. Cette preuve peut être apportée par tout moyen (CSP, art. L. 1111-2).

SECTION 1 - L’AFFIRMATION DU DROIT DE REFUSER DES SOINS ET TRAITEMENTS

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