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INTRODUCTION

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Le « refus de soins » a une résonance particulière en cette période où les incertitudes, notamment sur les données scientifiques, et la confrontation à la maladie attisent des peurs et/ou conduisent à des questionnements :
  • possibilités de choix, risques ;
  • vaccination...
Et au niveau du lien social, incluant la relation de soin, les conséquences vont bien au-delà d’une simple mesure sanitaire : les effets de l’isolement et de la distanciation impactent tous les domaines de la santé, y compris avec le recours accéléré aux outils numériques.
Dans ce contexte, une mise en perspective s’avère utile pour mieux comprendre les enjeux de liberté et d’égalité contenus dans le « refus de soins » – qu’il soit exprimé par le soigné ou le soignant.


A. Une mise en perspective historique

Ces quelques extraits du serment d’Hippocrate pourraient-ils au final constituer un condensé des devoirs envers les patients et de leurs droits ?
« Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J’interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité. Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l’humanité. »
« J’exercerai ma profession avec conscience et dignité, dans le respect des bonnes pratiques médicales. »
« Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain. »
Autonomie, volonté, non-discrimination... Des principes auxquels s’ajoutent des concepts d’ordre éthique, moral, dont le droit, au fil des décennies, s’est aussi emparé sans que leurs contours soient toujours clairs : dignité, vulnérabilité... ou dignités, vulnérabilités.
C’est sans doute une évolution importante qui laisse aussi de l’incertitude dans les interprétations.
Interroger le « refus de soins », qui se trouve à la croisée de plusieurs chemins, nécessite aussi de poser un regard sur un autre trait saillant : des droits et libertés en tension dans la relation patient-professionnel de santé mais aussi et de manière plus « liberticide » des logiques sanitaires et sécuritaires qui prennent le pas.


B. Manifestation d’un ordre public sanitaire et d’un ordre public sécuritaire très puissants

Force est de constater que l’état d’urgence (L. n° 2020-290, 23 mars 2020) a créé une situation qui va bien au-delà de l’ordre public sanitaire (O. Beaud, « L’état d’urgence sanitaire : était-il judicieux de créer un nouveau régime d’exception ? », D. 2020, p. 891).
Se combinant avec l’ordre public sécuritaire et social, quelle place reste-t-il pour une politique orientée vers l’éducation à la santé et par cette voie un apprentissage du consentement – ou du non-consentement – aux soins ?
Loin d’un idéal d’éducation thérapeutique, qui permet de « passer d’une approche prescriptive et injonctive à une approche collaborative » (B. Sandrin – Directrice de l’Association française pour le développement de l’éducation thérapeutique [AFDET[ –, « Interview », France Assos Santé, 30 mars 2018), les discours incantatoires oublient aussi cette dimension.


C. De nouveaux outils nécessitant de préserver la relation de soin

L’e-santé et la dématérialisation prennent tout leur essor et il faudra veiller à ce qu’elles restent simplement un outil au service et ne pas oublier le lien avec soi, avec les autres, le lien soignant-soigné, le lien au sein d’une équipe...
« La psychiatrie est une médecine de lien, il ne faut pas créer une psychiatrie de la déliaison avec la dématérialisation », souligne un psychiatre (M. Bellahsen, ASH 3-07-2020), qui a, par ailleurs, saisi le contrôleur général des lieux de privation de liberté suite à l’isolement psychiatrique pratiqué sans avis médical.


D. Influences des neurosciences : entre soins et recherche, quelles applications en droit et quels effets sur le refus de soins ?

Considérons les points suivants :
  • repenser certaines notions de droit et les approches faites du soin sous l’influence des neurosciences est dans la continuité d’approches faites depuis quelques années.
  • Les domaines les plus sensibles sont ouverts à ces champs nouveaux et concernent précisément le refus de soins ou, à l’inverse, le soin sans consentement : lieux de privation de liberté, arrêt de traitement, fin de vie, maladies dégénératives, gérontologie... Hasard, sans doute pas. Ce mouvement nécessite aussi de repenser ces thèmes du point de vue du soigné, de ses droits et de ses libertés ;
  • repenser le soin avec non seulement les nouveaux champs des neurosciences mais aussi en donnant une place prioritaire aux moyens humains qui permettent l’accompagnement, l’apaisement et le soin des troubles psychiatriques (A. Hazan, « Soins sans consentement et droits fondamentaux », Dalloz, 2020) ;
  • repenser la fin de vie : au cours de l’affaire « Vincent Lambert », des expertises en neurosciences ont contribué à déterminer l’état du patient, ce qui a été souligné dans certains rapports (2011 : état pauci-relationnel – 2014 : état de mort végétatif). Cependant, la confrontation au pouvoir de toutes sortes a conduit à repartir à zéro. La réflexion est donc loin d’être aboutie sur les droits et le respect du patient ;
  • repenser la gérontologie.
Un autre thème a surgi durant cette période : celui du choix et du droit au risque (ASH 24-09-2020). Là aussi la question des moyens humains et financiers vient percuter les débats.


E. Concilier libertés et solidarité

La loi « Grand âge et autonomie », annoncée en 2021, sera-t-elle l’occasion d’aborder ces questions ?
Qu’adviendra-t-il de la démocratie ? Les règles et normes seront-elles édictées au pas de charge sous forme d’ordonnances ou sera-t-il possible de faire de ces moments inédits une transformation en appréhendant la complexité et en remettant au premier plan les droits du patient, avec le consentement « libre et éclairé ».

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