Introduction

Le terme plateforme de services est polysémique. Il correspond à un concept à géométrie variable, en usage dans de nombreux domaines de l’activité humaine et des organisations, usage indiquant plusieurs significations.

Selon le Littré, le mot est formé de plat (au féminin : adjectif qualifiant une superficie, horizontale donc, unie et sans inégalités.) et de forme (du latin forma : un modelage, un moule). L’usage du terme commence au XV^e siècle : en architecture (terrasse sur un édifice), en charpente (pièces de bois qui soutiennent la charpente d’une couverture), en artillerie (bâti en bois ou en maçonnerie disposé dans les batteries de siège place ou de côte, pour recevoir les bouches à feu) en marine (sorte de plancher tel que celui des soutes aux poudres et de la poulaine) en horlogerie (machine dont l’horloger se sert pour fendre les roues dentées). Les premiers usages en littérature : Rabelais l’emploie dans Pantagrueline prognostication (1532) en prédisant l’avenir proche et, notamment, que « Boesmes, Juifs, Égyptiens ne seront pas ceste année réduits en plate-forme de leur attente », Straparole dans Nuits facétieuses (1550, 1553) évoque une « plate-forme sur l’eau qui descouvroit tout le lieu circonvoisin en belle vue ».

Le dictionnaire de l’académie française, qui admet dans ses corrections orthographiques de 1990 l’écriture plateforme autant que celle de plate-forme, donne 3 significations :

▸ Surface plane qui forme la partie la plus élevée d’un édifice,

▸ Dans certains véhicules, espace ouvert destiné à accueillir des voyageurs, du personnel ou des marchandises

▸ Surface plate et surélevée servant de support.

Trois caractéristiques donc : une surface (plane), une surélévation (servant de support), une capacité (faciliter une entrée, un accueil, voire un usage).

L’usage du terme initial avec ses caractéristiques s’est décliné, depuis, dans de multiples domaines : l’artillerie et armement (pour désigner un emplacement aménagé pour mettre un canon en batterie), l’astronautique (véhicule orbital entièrement stabilisé), le bâtiment et l’architecture (terrassement base d’une construction ; toiture-terrasse ; sablière recevant des abouts de chevrons dans des charpentes), le mobilier (tablettes supérieure d’une armoire ou d’un secrétaire, entourée souvent d’un rebord en métal), le transport ferroviaire (assiette d’une voie ferrée supportant le ballast), les travaux publics (surface occupée par la chaussée, les accotements, les trottoirs ou les pistes), les techniques de forage (structure utilisée pour un forage sous-marin), la géologie (bouclier recouvert par une couverture sédimentaire discordante subhorizontale), l’informatique (ensemble d’outils du numérique pour le stockage et le partage de contenus virtuels).

S’il amène à la désignation actuelle d’organisations d’un nouveau type, réputés plus souples et plus adaptables, horizontales (sans organisation verticale donc), c’est du fait d’une tendance paradoxale : recherche d’une évolution des organisations (diminution des structurations verticales, ou encore horizontales mais complexes, progression recherchée de leur souplesse à des usages, agilité à évoluer) et recherche parallèle pourtant d’une visibilité, d’une assise permanente et de réponses stables et garanties.

Dans la vie sociale, la progression récente produit une prédominance des plateformes numériques, avec leur cortège de réalités (d’un côté, stockage hiérarchisé de nombreuses informations, données, services, d’un autre côté, facilités de lien et d’accès, d’usage pour de grands nombre d’utilisateurs) et de représentations (Big brother, ubérisation, innovation disruptive, destruction des équilibres sociaux, solidaires, etc.).

L’accolement du terme « de services » à « plateforme » indique une finalité : une pluralité d’aides, travaux prestations ayant une utilité pour la personne concernée (1).