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LE RETRAIT CIVIL DE L’AUTORITÉ PARENTALE

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Le retrait de l’autorité parentale est également prévu par l’article 378-1 du Code civil en dehors de toute condamnation pénale. Cet article modifié par la loi du 14 mars 2016 n’a pas fait l’objet d’un toilettage et emploie encore des formulations aujourd’hui désuètes, qui sont par ailleurs difficiles à concilier avec d’autres textes.
En matière civile, le retrait de l’autorité parentale recouvre deux séries d’hypothèses : d’une part, les situations dans lesquelles les parents ont une conduite inadaptée à l’égard de l’enfant lui faisant courir un danger grave, d’autre part, les situations dans lesquelles les parents n’exercent pas leurs droits et leurs devoirs à l’égard de l’enfant pendant plus de deux ans. L’utilisation de l’article 378-1 du Code civil nécessite de revenir sur les contours et limites de cette disposition, sur les modifications apportées par la loi du 14 mars 2016, et enfin sur les éléments de procédure applicable.


A. Les contours et limites du retrait

Selon l’article 378-1 du Code civil, peuvent se voir retirer totalement l’autorité parentale, en dehors de toute condamnation pénale, les père et mère qui mettent manifestement en danger la sécurité, la santé ou la moralité de l’enfant :
  • « soit par de mauvais traitements ;
  • soit par une consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques ou un usage de stupéfiants ;
  • soit par une inconduite notoire ou des comportements délictueux, notamment lorsque l’enfant est témoin de pressions ou de violences à caractère physique ou psychique exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre ;
  • soit par un défaut de soins ou un manque de direction ».
Le retrait de l’autorité parentale peut ainsi être envisagé dans des situations où les parents ont un comportement inadapté à l’égard de l’enfant qui le met manifestement en danger. La formulation de l’article 378-1 du Code civil telle qu’elle vient d’être présentée interroge sur sa proximité avec les critères qui justifient aujourd’hui une intervention au titre de l’assistance éducative. En effet, le juge des enfants a compétence chaque fois que les comportements des parents font encourir à l’enfant un danger portant atteinte à son développement. La formulation retenue par le législateur en ce qui concerne le retrait de l’autorité parentale en matière civile rend alors difficilement lisible la répartition des compétences entre le juge des enfants et le juge aux affaires familiales. Le droit en vigueur laisse ainsi une marge de manœuvre importante aux professionnels comme aux services sur la nature des procédures introduites lorsque l’enfant est en danger.
La jurisprudence exerce par ailleurs un contrôle approfondi sur les conditions de retrait de l’autorité parentale. Le juge exige notamment que soit démontrée l’existence d’un lien de causalité entre le danger encouru par l’enfant et le comportement du parent fautif. Dans un arrêt récent, la Cour d’appel de Limoges considère ainsi que le passé alcoolique et délinquant du père de l’enfant ne peut à lui seul justifier le retrait de l’autorité parentale. En l’espèce, la carence du père absent ne permet pas d’établir un lien de causalité entre sa situation et un quelconque danger encouru par l’enfant (1).
Enfin, l’article 378-1 du Code civil prévoit que le retrait de l’autorité parentale peut être envisagé lorsqu’une mesure d’assistance éducative a été prise à l’égard de l’enfant, et que les père et mère se sont volontairement abstenus d’exercer l’autorité parentale pendant plus de deux ans. Cette disposition est aujourd’hui en concurrence avec d’autres dispositions du Code civil plus récentes. En effet, la plupart des situations visées par cet article peuvent également faire l’objet d’une déclaration judiciaire de délaissement parental dans le délai d’un an et non de deux ans (cf. infra, section 3).


B. La réforme opérée par la loi du 14 mars 2016

L’article 378-1 du Code civil est très rarement invoqué devant les tribunaux. La loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant a cherché à favoriser l’utilisation de cette disposition sans pour autant en revoir la rédaction d’ensemble. Elle modifie ainsi l’article 378-1 du Code civil en autorisant le retrait de l’autorité parentale dans les cas où « l’enfant est témoin de pressions ou de violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre ». Il s’agit ainsi de prendre en compte les situations de violences conjugales, au sein desquelles, sans subir une violence directe, l’enfant peut être considéré comme victime en raison du climat au sein duquel il évolue. Dans ces hypothèses, la loi autorise le retrait de l’autorité parentale dans un cadre civil, en dehors de toute condamnation pénale pour le parent fautif.
Cet ajout s’appuie notamment sur les neurosciences qui montrent depuis plusieurs années l’importance des premières années de vie d’un individu pour son développement notamment cérébral, et les risques encourus par les enfants qui grandissent dans des environnements violents. Plusieurs auteurs ont ainsi récemment insisté sur la nécessité de ne pas minimiser la situation des enfants exposés à des violences conjugales (2). Il s’agit aussi d’infléchir la position actuelle de certaines juridictions dans des litiges où le parent victime de violences conjugales demandait le retrait de l’autorité parentale du parent violent et était débouté. Les juges du fond considéraient en effet jusqu’à peu que ces situations ne permettaient pas d’établir un lien de causalité entre le comportement du parent et le danger encouru par l’enfant, et donc de prononcer le retrait de l’autorité parentale. C’est par exemple ce qu’illustre un arrêt très sévère de la cour d’appel de Rennes en 2013 (3).
En l’espèce, une mère demande le retrait de l’autorité parentale du père de l’enfant, aux motifs que ce dernier a fait l’objet d’une condamnation pour des violences commises sur elle en présence des enfants, que ces enfants ont peur de rencontrer leur père et enfin que le père condamné ne suit pas les soins pourtant imposés par le jugement pénal. En l’espèce, la cour d’appel considère que ces conditions ne sont pas suffisantes pour prononcer le retrait de l’autorité parentale. La loi du 14 mars 2016 devrait permettre de casser cette jurisprudence et de prononcer un retrait de l’autorité parentale dans des situations similaires.


C. Les éléments de procédure

En matière civile, le retrait de l’autorité parentale doit faire l’objet d’une saisine spécifique du juge aux affaires familiales. Selon l’article L. 378-1 du Code civil, cette action « est portée devant le tribunal de grande instance, soit par le ministère public, soit par un membre de la famille ou le tuteur de l’enfant, soit par le service départemental de l’aide sociale à l’enfance auquel l’enfant est congé ».
Les services départementaux de l’aide sociale à l’enfance pourraient ainsi, dans de très nombreuses situations, saisir le juge aux affaires familiales en demandant un retrait de l’autorité parentale en raison du danger encouru par l’enfant. Si le retrait de l’autorité parentale n’est pas toujours opportun et dépend de nombreux facteurs (la personnalité de l’enfant, sa psychologie, les détails de la situation familiale et le positionnement de l’enfant au sein de sa famille), il est important que cette possibilité ne soit pas écartée d’office et qu’il n’existe pas d’interdit moral sur l’utilisation de cette procédure.


(1)
Limoges, 16 novembre 2015, n° 14/011651, consultable sur www.legifrance.gouv.fr


(2)
Ronai E., Durand E. « Violences conjugales : le droit d’être protégée », Collection Santé Social, Dunod, novembre 2017.


(3)
Rennes, 22 mars 2013, n° 12/00355, consultable sur www.legifrance.gouv.fr

SECTION 3 - LE RETRAIT DE L’AUTORITÉ PARENTALE

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