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LA CONSULTATION DES DOCUMENTS JUDICIAIRES

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L’accès aux documents judiciaires fait l’accès d’une réglementation spécifique, d’une part, pour protéger le bon déroulement des procédures judiciaires en cours, d’autre part, pour assurer le respect du contradictoire et des droits de la défense.
Dans le champ de la protection de l’enfance, de nombreux documents versés au dossier d’assistance éducative sont fournis par des services administratifs relevant de la protection de l’enfance (service de l’aide sociale à l’enfance, établissements ou services public et associatif, etc.), ces documents deviennent néanmoins dans ce cadre des documents judiciaires jusqu’à la clôture de la procédure en cours. Leur accès est alors soumis aux conditions posées par l’article 1187 du Code de procédure civile.
Il est intéressant de souligner que l’accès aux documents judiciaires en assistance éducative est une préoccupation relativement récente qui prend son essor avec un décret de 2002 qui modifie le Code de procédure civile (1) et consacre pour la première fois un droit à consultation des documents judiciaires par les parties et un droit à communication des pièces pour leurs avocats. Michel Huyette, juge des enfants, insiste sur le caractère indispensable de cette réforme : « il ne peut y avoir de véritable débat contradictoire avec les parents non assistés d’un avocat que s’ils ont la possibilité de venir prendre connaissance avant l’audience des éléments du dossier susceptibles de conduire à une décision sanctionnatrice de leurs défaillances » (2).


A. Qu’est-ce qu’un document judiciaire ?

Les documents judiciaires ne sont pas définis en tant que tels par le droit. Selon Gérard Cornu, le terme « judiciaire » peut être défini dans un sens précis, comme « ce qui concerne la justice rendue par les tribunaux judiciaires » (3). Si l’on s’appuie sur cette définition, on peut considérer que les documents judiciaires sont l’ensemble des documents produits ou reçus par les tribunaux dans le cadre d’une procédure à venir ou en cours.
L’accès aux documents élaborés directement par le juge des enfants ou établis par d’autres acteurs mais pour l’exercice de la justice se fait sous le contrôle du juge. Au sens large, ces documents peuvent être définis comme l’ensemble des pièces établies pour les besoins d’une procédure : dossier d’instruction, commissions rogatoires, procès-verbaux d’audition, rapports d’expertise, mémoires et observations des parties, conclusions du procureur de la République, etc.


B. Qui peut les consulter ?

Les documents versés au dossier d’assistance éducative peuvent être consultés au greffe du Tribunal de grande instance par :
  • les avocats des parties,
  • les parties elles-mêmes : à savoir les titulaires de l’autorité parentale ou encore la personne ou le service à qui l’enfant est confié. L’enfant peut également consulter son dossier, mais ce droit est réservé au mineur « capable de discernement », cette condition étant appréciée par le juge (C. proc. civ., art. 1187).
Il est intéressant de souligner que le dossier d’assistance éducative peut être consulté par la personne à qui l’enfant est confié. L’article 1187 du Code de procédure civile ne distingue pas la qualité de cette personne. Il peut ainsi s’agir d’un particulier ou d’un professionnel entendu au sens large. Le professionnel de l’aide sociale à l’enfance qui suit la situation, celui qui met en œuvre la mesure d’aide éducative en milieu ouvert ou de placement, ou encore l’assistante familiale, peuvent ainsi consulter le dossier de l’enfant.
Cette consultation peut permettre aux professionnels de mieux comprendre l’histoire de l’enfant et d’avoir une perception globale de sa situation et de son parcours. Cette possibilité est d’autant plus importante lorsque l’enfant a connu des référents éducatifs successifs au sein du service de l’aide sociale à l’enfance et qu’il n’y a plus auprès de lui un professionnel qui connaisse l’ensemble de son histoire.


C. Comment s’organise l’accès aux documents judiciaires ?

L’article 1187 du Code de procédure civile reconnaît un accès au dossier d’assistance éducative différencié selon la qualité du demandeur. Il est ainsi nécessaire de distinguer les règles qui s’appliquent aux avocats, aux parents de l’enfant, aux personnes à qui l’enfant est confié, et enfin au mineur lui-même.
Le Code de procédure civile reconnaît un droit de consultation et de communication du dossier d’assistance éducative à l’avocat d’une des parties (du mineur, de ses parents, de son tuteur ou encore du service). Celui-ci peut ainsi consulter le dossier dès l’avis d’ouverture et jusqu’à la veille de l’audition. Par ailleurs, l’article ajoute que « l’avocat peut se faire délivrer copie de tout ou partie des pièces du dossier pour l’usage exclusif de la procédure d’assistance éducative ». En revanche, il ne peut transmettre les copies ainsi obtenues ou la reproduction de ces pièces à son client. Cet ajout est important car il signifie que l’avocat est le seul à avoir un droit à communication du dossier d’assistance éducative.
Les parties ont un droit de consultation du dossier d’assistance éducative. Elles peuvent ainsi consulter les pièces qui composent le dossier sur place, mais à aucun moment en demander la copie. Ce principe est rappelé par l’article 1187 du Code de procédure civile qui dispose que « le dossier peut également être consulté, sur leur demande et aux jours et heures fixés par le juge, par les parents, le tuteur, la personne ou le représentant du service à qui l’enfant a été confié et par le mineur capable de discernement, jusqu’à la veille de l’audition ou de l’audience ». Ainsi, pour les parties à la procédure, le dossier d’assistance éducative peut être consulté seulement après en avoir fait la demande et sur rendez-vous.
Le mineur a un droit de consultation du dossier d’assistance éducative sous certaines conditions. Le droit de consultation du mineur est d’abord reconnu uniquement aux enfants capables de discernement. Par ailleurs, l’accès au dossier est limité, puisque « la consultation du dossier le concernant [...[ ne peut se faire qu’en présence de ses parents ou de l’un d’eux ou de son avocat ». Cette disposition spécifique prend en compte la minorité de l’enfant et évite ainsi le vide juridique qui existe en ce qui concerne la consultation des documents administratifs.
Lorsqu’il le souhaite, le mineur capable de discernement peut consulter le dossier avec son avocat, sans avoir obtenu l’accord des titulaires de l’autorité parentale. L’article 1187 du Code de procédure civile prévoit qu’« en cas de refus des parents et si l’intéressé n’a pas d’avocat, le juge saisit le bâtonnier d’une demande de désignation d’un avocat pour assister le mineur ou autorise le service éducatif chargé de la mesure à l’accompagner pour cette consultation ». Ainsi, le service qui a la charge de la mesure peut accompagner l’enfant dans la consultation de son dossier. Cette possibilité est parfois un levier intéressant dans des accompagnements complexes au sein desquels l’enfant se pose beaucoup de questions sur son histoire personnelle.


D. Quels sont les documents consultables ?

Le juge des enfants peut exclure de la consultation toute pièce dont la lecture pourrait mettre en danger l’enfant. Selon l’article 1187 du Code de procédure civile, « par décision motivée, le juge peut, en l’absence d’avocat, exclure tout ou partie des pièces de la consultation par l’un ou l’autre des parents, le tuteur, la personne ou le représentant du service à qui l’enfant a été confiée ou le mineur lorsque cette consultation ferait courir un danger physique ou moral grave au mineur, à une partie ou à un tiers ». Il peut s’agir par exemple d’un procès-verbal d’audition au sein duquel le mineur se décrit des maltraitances de la part de ses parents
Ce pouvoir de contrôle du juge des enfants n’existe qu’en l’absence d’avocat. A contrario, lorsque la partie qui demande consultation du dossier a pris un avocat, le contrôle exercé par le juge des enfants n’est plus prévu par les textes. Cet oubli est surprenant et permet en pratique au parent qui a un avocat d’avoir accès à la totalité des pièces versées au dossier d’assistance éducative. Il existe donc une différence de traitement entre le parent qui a un avocat et qui peut consulter l’ensemble du dossier par son intermédiaire, et celui qui n’en a pas, pour lequel la consultation du dossier est soumise au contrôle du juge des enfants.
Enfin, les documents versés au dossier d’assistance éducative sont consultables « jusqu’à la veille de l’audience ». Le justiciable comme l’avocat peuvent ainsi demander l’accès à ces documents plusieurs jours avant l’audience. Il est donc indispensable que les rapports d’évaluation, notes et expertises demandés par le juge des enfants puissent lui être adressés dans « un délai raisonnable » avant l’audience afin qu’ils puissent être consultés en amont par les parties. La loi ne fixe pas de délai particulier, en revanche certains juges demandent (et écrivent même parfois au sein de leur décision) que le rapport de situation qui est une des pièces maîtresses du dossier d’assistance éducative doit être remis deux à trois semaines avant l’échéance, afin de respecter le principe du contradictoire.


(1)
Décret n° 2002-361 du 15 mars 2002 modifiant le nouveau Code de procédure civile et relatif à l’assistance éducative.


(2)
Huyette M., « Le contradictoire en assistance éducative : l’indispensable réforme de l’article 1187 du nouveau Code de procédure civile », Recueil Dalloz, 1998, p. 218.


(3)
Cornu G., Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, PUF, 11e édition, 2016.

SECTION 4 - L’ACCÈS AU DOSSIER DE L’AIDE SOCIALE À L’ENFANCE

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