La procédure de licenciement est un préalable obligatoire à la rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur.
La Cour de cassation, aux fins de définir l’éventuelle applicabilité du Code du travail à la rupture du contrat, opère une distinction entre les articles du Code du travail traitant de l’employeur de ceux traitant du salarié.
Dès lors que les articles du code font expressément état de l’entreprise, le particulier, qui n’est a fortiori pas une entreprise, n’est pas soumis aux prescriptions du Code du travail.
La procédure de licenciement est précisément définie par le Code du travail (1). Afin d’engager la procédure, l’employeur doit convoquer le salarié à un entretien préalable au licenciement. La lettre doit être expédiée en lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre décharge au salarié. La lettre de convocation doit répondre à un formalisme strict et comprendre les éléments suivants :
- lieu, heure et date de l’entretien ;
- l’objet de la convocation ;
- la possibilité pour le salarié d’être assisté.
Quant à la date, le lieu et l’heure de l’entretien, le particulier procède à la convocation à son domicile. Concernant l’objet de la convocation, l’employeur doit expressément mentionner la « convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement ».
L’entretien a tout intérêt à se dérouler pendant le temps de travail du salarié dans la mesure où cette période doit être rémunérée en qualité de temps de travail effectif. Pendant l’entretien, l’employeur doit exposer au salarié les motifs ayant conduit à l’engagement de la procédure.
Si l’employeur a l’obligation de convoquer le salarié, ce dernier n’est pas contraint de se présenter à l’entretien préalable et n’a pas à s’en justifier. La procédure de licenciement peut être poursuivie par l’employeur. Si le salarié demande un report de l’entretien, l’employeur a-t-il l’obligation d’y satisfaire ? La Cour de cassation a tranché la question et retient que l’employeur n’est pas tenu de procéder à une nouvelle convocation en cas d’absence ou de demande du salarié (2).
La convention collective prévoit la procédure à suivre lors du licenciement mais ne fait pas mention d’un délai entre la date de convocation et la date fixée pour l’entretien préalable. Se pose alors la question de l’obligation de respecter ou non un délai minimal entre les deux dates.
L’article L. 1232-2 du Code du travail précise qu’un délai de cinq jours ouvrables (3) doit être respecté entre la convocation et la date de l’entretien. Le décompte du délai ne débute qu’à compter du lendemain de la première présentation de la lettre recommandée au salarié ou de la remise en main propre contre décharge (4). La Cour de cassation a eu l’occasion d’appliquer, par un arrêt rendu le 6 octobre 2015, le délai de cinq jours ouvrables à un salarié du particulier employeur (5). Il est toutefois important de noter que la Cour de cassation n’avait alors pas fait expressément mention de l’obligation d’appliquer le délai légal aux salariés des particuliers employeurs mais jugeait que l’employeur ne pouvait se prévaloir d’une grève des services postaux pour justifier le non-respect dudit délai. La Haute juridiction avait toutefois ignoré totalement la qualification du salarié, ce qui réduit la portée de la décision. Aucune précision sur le même sujet n’est cependant intervenue par la suite, ce qui conduit à considérer le délai de cinq jours ouvrables comme applicable en l’espèce.
Précisions : L’absence d’arrêts de la Cour de cassation postérieurement à la décision évoquée plus haut amène à s’interroger sur l’applicabilité du délai de cinq jours ouvrables au salarié du particulier employeur. En effet, le Code du travail restreint par principe son application aux dispositions de l’article L. 7221-2. Or, ce dernier ne fait pas mention de la procédure de licenciement et des délais à respecter. Le respect du délai de cinq jours ouvrables n’est donc pas fondé sur le Code du travail mais sur l’arrêt de la Cour de cassation précité, qu’il conviendra de respecter à titre préventif.
La distinction entre entreprise et particulier apparaît très tôt, dans une réponse ministérielle du 27 juillet 1998, pour éluder certaines dispositions du Code du travail : « En mentionnant expressément les articles du Code du travail qui sont applicables aux employés de maison, l’article L. 772-2 du Code du travail ne déroge pas pour autant aux dispositions des articles L. 122-14 et suivants qui sont d’ordre public. Les dispositions de l’article L. 122-14, alinéa 1, du Code du travail relatives à l’entretien préalable au licenciement doivent s’appliquer à l’occasion de tout licenciement prononcé par un employeur quels que soient l’ancienneté du salarié, la taille de l’entreprise et le motif du licenciement. Le fait que l’emploi s’exerce dans le domicile privé de l’employeur ne saurait faire obstacle à cette disposition d’ordre public. Cependant, les dispositions des premier et deuxième alinéas de cet article relatives à l’assistance du salarié, visent expressément le personnel relevant d’une entreprise et ne sauraient donc s’appliquer aux salariés travaillant chez un particulier. Il en résulte que les employés de maison n’entrent pas dans le champ d’application des dispositions de l’article L. 122-14 prévoyant la possibilité pour un salarié de se faire assister par un conseiller du salarié inscrit sur une liste départementale lors de l’entretien préalable au licenciement. Compte tenu du caractère privé du domicile de l’employeur, il n’apparaît pas opportun de modifier sur ce point la législation actuelle » (6).
L’administration considérait ainsi que l’employé de maison ne pouvait bénéficier de l’assistance d’un tiers lors de l’entretien préalable au licenciement.
La Cour de cassation, la même année, retenait une interprétation identique à celle de l’administration et exposait : « l’article L. 122-14 du Code du travail ne prévoit l’assistance du salarié par un conseiller de son choix qu’en l’absence d’institutions représentatives du personnel dans l’entreprise ; qu’il en résulte que cette disposition, applicable uniquement au personnel des entreprises, ne s’applique pas au personnel employé de maison au sens de l’article L. 772-1 du Code du travail ; que la cour d’appel qui a, en outre, relevé la régularité de la procédure de licenciement, a légalement justifié sa décision » (7).
La convention collective nationale des salariés du particulier employeur de 1999 et étendue en 2000 viendra retranscrire expressément l’exclusion des salariés de la protection relative à la procédure de licenciement en son article 12, rédigé comme suit :
« Le particulier employeur n’étant pas une entreprise et le lieu de travail étant son domicile privé, les règles de procédure spécifiques au licenciement économique et celles relatives à l’assistance du salarié par un conseiller lors de l’entretien préalable ne sont pas applicables. »
Lorsque l’employeur souhaite prononcer le licenciement de son salarié, il est donc contraint de respecter la procédure habituelle, exception faite de la possibilité d’assistance du salarié par un conseiller lors de l’entretien. Au simple prétexte que le salarié est embauché par un particulier, il n’a donc pas le droit d’être accompagné lors de l’entretien préalable. Cette impossibilité, aisément compréhensible lorsque l’on considère que l’employeur n’est lui-même qu’un particulier, amène toutefois à s’interroger sur les droits des salariés, différents du cadre classique.
De nombreux arrêts font mention de la qualité d’employé de maison, sans référence à la dénomination de « salarié » du particulier employeur. Il convient de relever que les deux termes visent des situations identiques. Pour précision, en 2016, la loi « Travail » a modifié l’article L. 7221-1 du Code du travail pour remplacer les termes d’« employé de maison » par « employé à domicile par un particulier employeur ». Ainsi, le nouvel article L. 7221-1 exclut la notion d’« employé de maison » pour intégrer dans un premier alinéa une définition des salariés et dans un second temps celle du particulier employeur. Un arrêt de la Cour de cassation a repris les contours de la notion d’« employé de maison » ou « salarié du particulier employeur » et précise : « est considéré comme employé de maison le salarié employé par des particuliers à des travaux domestiques recouvrant des tâches ménagères ou familiales ; qu’en retenant, en l’espèce, que Mme X... ne répondait pas à la définition d’employé de maison, quand elle constatait pourtant que cette salariée assurait des tâches d’aide à domicile, caractérisées par une responsabilité auprès d’une personne âgée et qu’il s’agissait d’un emploi à caractère familial, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l’article L. 7221-1 du Code du travail » (8).
II. LA NOTIFICATION DU LICENCIEMENT
La convention collective précise que la notification du licenciement ne peut intervenir que dans un délai minimal d’un jour franc (9) après la date fixée de l’entretien préalable. Or, le Code du travail prévoit que le délai à respecter est de deux jours ouvrables (10) après l’entretien. Comme précédemment évoqué, le Code du travail précise à l’article L. 7221-2 une application limitative des règles légales aux salariés du particulier employeur. Or, les délais relatifs à la procédure de licenciement et précisément à la notification de la rupture du contrat de travail n’en font pas partie.
Au regard des éléments précisés ci-avant quant à la convocation et l’entretien préalable, il apparaît plus prudent de considérer que les règles issues du Code du travail doivent prévaloir sur les prescriptions de la convention collective applicable, soit un délai de deux jours francs.
On pourra rappeler un arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation le 6 octobre 2015, qui avait expressément retenu que le délai prévu entre la date de convocation et l’entretien préalable trouvait application et étendu cette interprétation à la notification de la lettre de rupture du contrat de travail (11).
Les modifications instaurées par les ordonnances « Macron » et le décret du 29 décembre 2017 ont mis en place des modèles de lettre de licenciement visant à permettre aux employeurs de faciliter la notification de la lettre de rupture (12). Six modèles de lettre sont ainsi disponibles, dont trois pourraient être utilisés par les particuliers : motif personnel disciplinaire, motif non disciplinaire et inaptitude du salarié. Les modèles relatifs au licenciement économique ne trouveront pas, en tout état de cause, application aux particuliers employeurs qui ne connaissent pas ce motif de rupture (13).
Attention : Les modèles ont été établis à destination de chefs d’entreprise et non pour les particuliers, quelques adaptations seraient donc nécessaires à leur utilisation. À ce titre, le décret précise expressément : « L’application du présent modèle est sans incidence sur l’application des stipulations conventionnelles ou contractuelles plus favorables applicables au contrat de travail du salarié licencié. » L’on doit alors comprendre que les modèles ne dispensent en rien l’employeur de l’application des dispositions prévues par la convention collective des salariés du particulier employeur et ne sauraient en rien les remplacer. À titre d’exemple, le modèle relatif à l’inaptitude doit être pris avec réserves car il fait état de l’obligation de reclassement, dont le particulier employeur est expressément dispensé par l’article 12 de la convention collective.
Quant aux modèles de lettre concernant le motif personnel disciplinaire ou non, les documents permettent de rappeler la procédure classique et la nécessaire motivation, mais l’on regrette l’absence d’exemples ou d’indications plus précises.
(1)
C. trav., art. L. 1232-2 et s.
(2)
Cass. soc., 26 mai 2004, n° 02-40681.
(3)
S’agissant du décompte en jours ouvrables, il s’agit de tous les jours de la semaine à l’exception du jour de repos hebdomadaire et des jours fériés habituellement non travaillés dans l’entreprise.
(4)
Cass. soc., 3 juin 2015, n° 14-12245.
(5)
Cass. soc., 6 nov. 2013, n° 12-24053.
(6)
Rép. min. à QE n° 8594, JOAN Q. 27 juill. 1998, p. 4145.
(7)
Cass. soc., 4 juin 1998, n° 95-44693.
(8)
Cass. soc., 20 nov. 2013, n° 12-20463.
(9)
Le jour franc est un jour de 0 heure à 24 heures et le délai ne tient pas compte du jour de la décision ni du jour de l’échéance. Si le délai expire un samedi, dimanche ou jour férié, il est reporté au jour suivant.
(10)
C. trav., art. L. 1232-6. La jurisprudence a précisé par ailleurs qu’en cas de licenciement pour motif disciplinaire, un délai maximal d’un mois est prévu. V. notamment Cass. soc., 30 nov. 2010, n° 09-68-174.
(11)
Cass. soc., 6 oct. 2015, n° 14-18067.
(12)
D. n° 2017-1820, 29 déc. 2017, établissant des modèles types de lettre de notification de licenciement : les six modèles de lettre figurent en annexe du décret.
(13)
V. pour l’exclusion du motif économique, au sein du même chapitre, I, B « Les motifs de licenciement ».