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APPLICATION DU TRAVAIL DE NUIT AUX SALARIÉS DU PARTICULIER EMPLOYEUR

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La convention collective nationale des salariés du particulier employeur prévoit en son article 6, en vigueur étendu, des dispositions sous la dénomination « nuit ». Ces règles connaissent un caractère tout à fait dérogatoire au droit commun dont les modalités ont été exposées ci-avant. À titre liminaire, doit être soulevée une problématique spécifique aux salariés du particulier employeur : la convention collective ne définit à aucun moment ce qui doit être considéré comme « nuit ». Or, dans le cadre des dispositions légales sur le travail de nuit, la définition d’une période de nuit est indispensable et, à défaut d’être fixée par convention ou accord collectif, est établie dans la plage de 21 heures à 7 heures du matin (1). Comment déterminer les périodes de nuit et le paiement des heures afférentes en l’absence de définition des plages horaires de « nuit » ? Cette absence de précision conduira à une application difficile de toutes les règles issues de la convention collective applicable.
À NOTER :
L’Urssaf précise que les particuliers employeurs recourant au Cesu peuvent déclarer des heures de nuit dans la période de 21 heures à 6 heures du matin, fixant un cadre non défini par la loi ou la convention collective applicable (2).
On relèvera, au fil des développements qui vont suivre, que le salarié du particulier employeur ne connaît pas d’application du travail de nuit tel que défini par le Code du travail mais est soumis à un dispositif totalement exorbitant de droit commun. En premier lieu, il est utile de soulever que la convention collective n’évoque pas le travail de nuit mais énonce une présence de nuit concernant les emplois à caractère familial (3). L’article 6 de la convention collective nationale des salariés du particulier employeur donne une définition de la présence de nuit : « La présence de nuit, compatible avec un emploi de jour, s’entend de l’obligation pour le salarié de dormir sur place dans une pièce séparée, sans travail effectif habituel tout en étant tenu d’intervenir éventuellement dans le cadre de sa fonction » (4).
Il faut donc comprendre deux principes à la lecture de l’article précité :
  • présence de nuit ne peut être assurée que dans le cadre des emplois à caractère familial ;
  • la présence de nuit est compatible avec un travail de jour.
Le texte conventionnel fait ensuite mention des modalités pratiques et admet une amplitude horaire de douze heures par nuit et la possibilité, sauf exception, d’un maximum de cinq nuits consécutives.
Quant à la rémunération, les règles sont de nouveau parfaitement dérogatoires au droit commun puisque le salarié ne sera pas rémunéré pour l’intégralité du temps « présence de nuit » et ne bénéficiera d’aucune majoration comme prévu dans le droit commun relatif au travail de nuit. Ainsi, le texte conventionnel prévoit que la présence de nuit doit être rémunérée par une indemnité forfaitaire dont le montant ne pourra pas être inférieur à 1/6 du salaire conventionnel versé au salarié pour une durée identique de travail effectif.
Cependant, la convention collective précise que l’indemnité pourra être majorée : « Cette indemnité sera majorée en fonction de la nature et du nombre des interventions » (5).


Présence de nuit

Ce n’est que lorsque le salarié sera amené à intervenir toutes les nuits et à plusieurs reprises que la rémunération des heures de nuit prendra une autre définition : il s’agira d’heures de présence responsable.
Il sera donc relevé que le salarié qui est appelé à intervenir à plusieurs reprises pendant plusieurs nuits tombe sous la qualification des heures responsables. On aurait pu penser, comme dans le cadre du droit commun, que le salarié qui demeure au domicile du client afin d’être en mesure d’intervenir pour effectuer un travail doit répondre à la définition de l’astreinte (6). Or, le salarié du particulier employeur ne bénéficiera pas de ce régime, mais demeurera soumis aux dispositions moins favorables de la convention collective.


FOCUS. Les heures de présence responsable

Selon la convention collective des salariés du particulier employeur, les employés qui occupent un poste nommé comme étant à caractère familial assument une responsabilité auprès de personnes âgées ou dépendantes et d’enfants. Le texte conventionnel distingue pour ce type d’emploi des heures de travail effectif et des heures de présence responsable prévoyant dans ce dernier cas que le salarié doit pouvoir utiliser son temps pour lui-même tout en restant vigilant en cas d’intervention au besoin. En matière de rémunération, l’heure de présence responsable équivaut à deux tiers d’une heure de travail effectif (7).


Salarié assurant les fonctions de malade de nuit

Au sein du même article 6 de la convention collective nationale des salariés du particulier employeur, sont également prévues des dispositions relatives aux gardes malades. Le texte conventionnel précise : « Le salarié assurant les fonctions de garde malade de nuit est à proximité du malade et est susceptible d’intervenir à tout moment. Cet emploi n’est pas compatible avec un emploi de jour à temps complet. Le salarié reste à proximité du malade et ne dispose pas de chambre personnelle. La rémunération est calculée sur une base qui ne peut être inférieure à huit fois le salaire horaire pour douze heures de présence par nuit » (8). Ce poste comprend des différences notables avec la définition de la présence de nuit. Ainsi, le garde malade peut être susceptible d’intervenir à tout moment et a l’obligation de rester à proximité du malade sans pouvoir disposer, contrairement au dispositif de présence de nuit, d’une chambre ou d’un espace personnel.
De nouveau, en totale contradiction avec les dispositifs de droit commun relatifs au travail de nuit, la rémunération des salariés admet un minimum correspondant à huit fois le salaire horaire pour douze heures de présence. Ainsi, alors même que le garde malade est susceptible d’intervenir à tout moment, comme précisé par le texte conventionnel, que le salarié doit rester à proximité du malade et ne dispose pas de chambre personnelle, la rémunération ne correspond toujours pas à celle du temps de travail effectif. On constate donc bien ici que le statut des salariés employés par des particuliers est tout à fait dérogatoire du droit commun. En effet, dès lors que le travail de nuit ne figure pas dans les dispositions obligatoires énoncées par l’article L. 7221-2 du Code du travail, les employeurs sont fondés à se dispenser des dispositions pourtant d’ordre public figurant dans le Code du travail. La Cour de cassation a par ailleurs eu également l’occasion de se prononcer sur la notion d’« heures de présence responsable » et leur exécution de nuit. La Haute juridiction, qui devait trancher un litige relatif à l’existence et au nombre d’heures de travail accompli, a expressément tenu compte du fait que les dispositions du Code du travail relatives à la durée du travail n’étaient pas applicables aux employés de maison (salariés du particulier employeur), ces derniers ne devant être soumis qu’à la convention collective applicable (9).


(1)
C. trav., art. L. 3122-2 : « Tout travail effectué au cours d’une période d’au moins neuf heures consécutives comprenant l’intervalle entre minuit et 5 heures est considéré comme du travail de nuit. La période de travail de nuit commence au plus tôt à 21 heures et s’achève au plus tard à 7 heures. »




(3)
Les postes d’emploi à caractère familial sont déterminés par l’article 3, a), de la convention collective et il s’agit des emplois repères du domaine « adulte » et du domaine « enfant » et de l’emploi repère « employeur familial auprès d’enfants ».


(4)
Convention collective nationale des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999, art. 6 « Nuit ».


(5)
Convention collective nationale des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999, art. 6, b, 1. La formulation précisant une majoration de l’indemnité en fonction de la nature et du nombre des interventions laisse à penser que le salarié ne bénéficiera toujours pas d’une rémunération comme temps de travail effectif. Il n’existe d’ailleurs aucune précision quant au montant de ladite majoration.


(6)
C. trav., art. L. 3121-9 : l’astreinte est définie par la loi comme une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de son employeur, a l’obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d’être en mesure d’intervenir pour effectuer un travail au service de l’entreprise. La durée de l’intervention étant considérée comme un temps de travail effectif.


(7)
Convention collective nationale des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999, art. 3 « Poste d’emploi à caractère familial ».


(8)
Convention collective nationale des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999, art. 6 « Nuit », 2.


(9)
Cass. soc., 7 mars 2018, n° 16-14164. Dans cette affaire, la salariée sollicitait des rappels de salaire au titre d’heures supplémentaires, considérant qu’elle avait dépassé l’horaire hebdomadaire de 40 heures de travail effectif fixé comme temps plein dans la convention collective. La Cour de cassation a rejeté une partie des demandes de la salariée, admettant que cette dernière effectuait des heures de travail mais également des heures de présence responsable qui devaient correspondre à deux tiers des heures de travail effectif.

SECTION 4 - TRAVAIL DE NUIT

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