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LA PRATIQUE DE L’ISOLEMENT ET DE LA CONTENTION

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L’article L 3222-5-1 pose plusieurs conditions nécessaires à la réalisation de ces pratiques d’isolement et de contention et la circulaire du 29 mars 2017 en précise les contours. (1)
Article L 3222-5-1 code de la santé publique. Créé par l’article 72 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016.
« L’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision d’un psychiatre, prise pour une durée limitée. Leur mise en œuvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin.
Un registre est tenu dans chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie et désigné par le directeur général de l’agence régionale de santé pour assurer des soins psychiatriques sans consentement en application du I de l’article L. 3222-1. Pour chaque mesure d’isolement ou de contention, ce registre mentionne le nom du psychiatre ayant décidé cette mesure, sa date et son heure, sa durée et le nom des professionnels de santé l’ayant surveillée. Le registre, qui peut être établi sous forme numérique, doit être présenté, sur leur demande, à la commission départementale des soins psychiatriques, au Contrôleur général des lieux de privation de liberté ou à ses délégués et aux parlementaires.
L’établissement établit annuellement un rapport rendant compte des pratiques d’admission en chambre d’isolement et de contention, la politique définie pour limiter le recours à ces pratiques et l’évaluation de sa mise en œuvre. Ce rapport est transmis pour avis à la commission des usagers prévue à l’article L. 1112-3 et au conseil de surveillance prévu à l’article L. 6143-1. »
Le législateur prévoit ces dispositions spécifiques à l’isolement et à la contention, uniquement dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement dispensés par les établissements autorisés en psychiatrie et désignés par le directeur général de l’agence régionale de santé pour assurer ces soins.
Ces dispositions ne s’appliquent donc pas lorsque le patient bénéficie de soins psychiatriques libres ou lors de pratiques de privation de liberté exercées par d’autres établissements de santé ou médico-sociaux.
Ces mesures, « pratiques de dernier recours », sont toujours réalisées sur décision d’un psychiatre, ce qui traduit un examen médical obligatoire justifiant l’isolement ou la contention et leur caractère adapté, nécessaire et proportionné.
La Haute Autorité de Santé recommande qu’un entretien soit réalisé au moment de la mise sous contention pour :
  • évaluer l’état mental, émotionnel et physique du patient, avec une attention particulière à l’état cardiaque et respiratoire ;
  • expliquer au patient les raisons de la mesure et les critères permettant sa levée ;
  • expliquer la surveillance qui sera effectuée ;
  • discuter, avec l’équipe soignante impliquée dans la mise en place de la mesure, des facteurs déclenchants de l’épisode, des mesures moins restrictives employées, des raisons cliniques de l’isolement ou de la contention mécanique et de l’évolution clinique du patient en isolement ou sous contention mécanique ;
  • identifier et mettre en place les soins permettant d’accélérer la levée de l’isolement ou de la contention mécanique (2).
Ces pratiques sont tracées dans le dossier médical du patient.
Elles sont prises pour une durée limitée, ces pratiques restant l’exception. La HAS préconise une durée maximale de 12 h pour l’isolement et de 6 h pour la contention, prolongées au besoin par une prescription renouvelée en concertation avec l’équipe soignante. L’isolement de plus de 48 h et les contentions mécaniques de plus de 24 h doivent être exceptionnels. Leur mise en œuvre fait l’objet d’une surveillance stricte.
Par principe, la contention mécanique est concomitante à une mesure d’isolement. Il est recommandé qu’elle ait lieu uniquement dans un espace dédié avec des équipements spécifiques et qu’elle se fasse en position allongée.
Par exception, pour des cas spécifiques décrits par la Haute Autorité de Santé dans sa recommandation, il est possible d’avoir recours à la contention en dehors de cet espace par des moyens de contention ambulatoires tels que des vêtements de contention.
Un registre spécifique est tenu par l’établissement qui prend ces mesures : il s’agit d’un document administratif établi sous la responsabilité du directeur d’établissement, qui mentionne la mesure prise, sa date, son heure de début et de fin, sa durée, le nom du psychiatre qui pris cette mesure et le professionnel de santé ayant surveillé le déroulement de cette pratique. S’il est un support indispensable à la pratique des mesures d’isolement et de contention, le registre doit également servir à alimenter la réflexion des équipes la pratiquant, afin d’en limiter les recours. L’établissement doit rendre compte de ces pratiques dans son enceinte, dans un rapport annuel.
Ce rapport est ensuite transmis à la commission des usagers (CSP, art. L 1112-3) et au conseil de surveillance de l’établissement (article L 6143-1 du Code de la santé publique).


A. Jurisprudence

La jurisprudence a eu l’occasion de se positionner quant aux dispositions de l’article L 3222-5-1 du Code de la santé publique. Le 24 octobre 2016, la cour d’appel de Versailles a rendu une ordonnance relative aux mesures d’isolement énoncées désormais dans la loi (3). Les parents d’un patient hospitalisé sans consentement dans le cadre de soins psychiatriques sur décision du représentant de l’État ont saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de mainlevée de cette mesure, aux motifs que leur fils avait été maintenu en isolement de façon continue durant plusieurs semaines sans que les conditions prévues à l’article L 3222-5-1 du Code de la santé publique ne soient respectées. Le juge des libertés et de la détention ayant rejeté leur demande, les parents d’un patient hospitalisé sans consentement a interjeté appel de cette décision.
La cour d’appel de Versailles a ainsi confirmé la compétence du juge judiciaire, garant de la liberté fondamentale d’aller et venir pour traiter du contentieux des mesures d’isolement et de contention, en respect de l’article 66 de la Constitution.
La cour d’appel a également placé la charge de la preuve du respect des dispositions de l’article L 3222-5-1 à l’égard de l’établissement de santé ayant initié la mesure d’isolement.
Ce dernier n’ayant fourni aucun élément permettant de justifier que la mesure d’isolement prise avait été réalisée en conformité avec la loi, la cour d’appel en a conclu qu’il en résultait une atteinte grave aux droits du patient concerné et a ordonné la mainlevée de l’hospitalisation complète de l’intéressé.
Cette décision constitue une première mise en pratique des dispositions relatives à l’isolement et à la contention, faisant ainsi application des garanties appartenant à tous malades hospitalisés sans consentement de protection de sa liberté fondamentale d’aller et venir. Il conviendra toutefois de suivre la jurisprudence de la Cour de cassation afin de constater si cette dernière à la même vision de sa compétence en la matière et des dispositions de l’article L 3222-5-1 du Code de la santé publique.


B. Recommandations du CGLPL

En 2016, le contrôleur général des Lieux de privation des libertés a publié des recommandations concernant les pratiques d’isolement et de contention, survenues après sa visite au centre psychothérapique de l’Ain (4).
Le CGLPL a ainsi rappelé les conditions des mesures d’isolement ; il s’agit bien là d’une pratique de dernier recours, brève et réalisée sur prescription médicale après un examen minutieux du patient, dont l’objectif est de remédier à une situation de crise du patient, par l’apaisement en chambre d’isolement, pièce dédiée à cette pratique.
Concernant la pratique de la contention, le CGLPL a également rappelé qu’il s’agit là d’une pratique sur prescription médicale et exceptionnelle, le temps de permettre à un traitement sédatif de faire effet.
La CGLPL a ainsi édicté les recommandations suivantes :
  • ériger en règle la libre circulation dans l’établissement, toute restriction de la liberté d’aller et venir devant être expressément motivée par l’état clinique du patient ;
  • mettre fin immédiatement à l’enfermement en chambre ordinaire ;
  • mettre sans délai un terme à la pratique excessive, tant dans la durée que dans l’intensité, de l’enfermement en chambre d’isolement et de la contention ;
  • mettre fin immédiatement aux prescriptions et décisions médicales effectuées sans examen préalable du patient ;
  • assurer une présence médicale quotidienne et d’une durée suffisante dans toutes les unités ;
  • évaluer avec l’aide d’intervenants extérieurs l’état clinique et les modalités de prise en charge de tous les patients présents dans les unités de « soins de suite » et à l’unité pour malades agités et perturbateurs afin d’élaborer pour ces patients un projet de soins et de vie ;
  • renforcer dans des délais très courts les activités thérapeutiques dans et hors les unités afin d’en faire bénéficier le plus grand nombre de patients ;
  • former l’ensemble du personnel à la prévention et la gestion des situations de crise.
À la même occasion, le CGLPL a précisé que « ces pratiques qui renforcent l’image d’une dangerosité des malades mentaux, ne doivent jamais occulter le fait que ceux-ci sont, avant tout, des personnes en grande souffrance »(5)
Les dispositions relatives aux mesures d’isolement et de contention prévues dans le Code de la santé publique encadrent ces pratiques dans le cadre unique des établissements de santé chargés d’assurer les soins psychiatriques sans consentement. (CSP, art. L 3222-1 à L 3222-6).
Qu’en est-il alors de ces pratiques en dehors de ce cadre, en particuliers dans celui des établissements médico-sociaux ?


(1)
Circulaire instruction n° DGOS/R4/DGS/SP4/2017/109 du 29 mars 2017 relative à la politique de réduction des pratiques d’isolement et de contention au sein des établissements de santé autorisés en psychiatrie et désignés par le directeur général de l’agence régionale de santé pour assurer des soins psychiatriques sans consentement.


(2)
Recommandation de bonne pratique HAS – Isolement et contention en psychiatrie générale – février 2017


(3)
Arrêt cour d’appel de Versailles, 24 octobre 2016, n° 16/07393.


(4)
Recommandations en urgence du contrôleur général des Lieux de privation de liberté du 8 février 2016 relatives au centre psychothérapique de l’Ain - Bourg-en-Bresse - publiées au Journal Officiel du 16 mars 2016.


(5)
Recommandations en urgence du contrôleur général des Lieux de privation de liberté du 8 février 2016 relatives au centre psychothérapique de l’Ain (Bourg-en-Bresse), JORF du 16 mars 2016.

SECTION 3 - L’ENCADREMENT DES MESURES D’ISOLEMENT ET DE CONTENTIONS PAR LA LOI

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