La contention physique passive, mesure de restriction des libertés, doit être considérée comme un acte à risques en établissement sanitaire et médico-social. À ce titre, elle doit être prescrite en dernier recours, après échec d’autres alternatives et appréciation du ratio bénéfices/ risques pour le patient ou le résident. Dès lors qu’elle est mise en place, une réévaluation et une surveillance spécifique s’imposent. Évaluer ses pratiques et les analyser s’avère une étape indispensable à l’amélioration et à la pertinence des soins dispensés.
Le RéQua, une structure régionale d’appui dédiée aux établissements
Le RéQua, réseau Qualité des établissements de santé de Bourgogne – Franche-Comté, est un groupement d’intérêt public qui a pour but d’accompagner les établissements dans le déploiement et l’évaluation de leur démarche d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, tant dans le secteur sanitaire, médico-social et plus récemment dans le secteur des soins primaires. Le RéQua est membre de Fédération des organismes régionaux et territoriaux pour l’amélioration des pratiques et organisations en santé (Forap) (1) qui regroupe au niveau national les structures régionales d’appui à la qualité des soins et à la sécurité des patients. Ses missions s’organisent autour de deux axes :
- conseil et expertise en répondant aux demandes spécifiques des adhérents touchant les domaines de l’évaluation, la qualité ou la gestion des risques ;
- conduite des projets définis dans son programme triennal : ils correspondent aux problématiques en cours ou émergentes pour l’ensemble des établissements adhérents.
Parmi les grands axes de travail du RéQua, l’amélioration des pratiques par l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP) a été largement développée ces dernières années pour compter à ce jour plus de soixante-dix référentiels EPP clé en main.
Étape indispensable d’un projet qualité (Figure 1 - La roue de Deming, transposition graphique de la méthode de gestion de la qualité dite PDCA (Plan, Do, Check, Act)), l’évaluation s’inscrit dans une démarche qualité globale et en constitue une de ses étapes, indispensable à l’amélioration des pratiques.
Chaque nouveau projet EPP développé au sein du RéQua est conduit selon une même méthodologie :
- revue de la littérature en amont : recherche des recommandations et références récentes et validées ;
- constitution d’un groupe de travail valorisant le partage d’expériences et aboutissant à l’élaboration de guides et d’outils validés ;
- aide à la mise en œuvre des projets dans les établissements avec accompagnement des équipes sur site si besoin ;
- retour d’expérience régional : validation méthodologique après une première mesure et/ou atelier de benchmarking (ou parangonnage).
La méthode d’évaluation retenue en 1re intention : l’audit clinique ciblé
Dès 2007, le RéQua a décidé de mener une réflexion sur l’évaluation de la contention physique passive. Sept ans après l’édition des recommandations professionnelles de l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (Anaes), « Limiter les risques de la contention physique de la personne âgée » (2), les études de prévalence démontraient un taux de recours à la contention encore élevé en établissement de santé. Cette pratique, rarement formalisée par une procédure validée au niveau de l’établissement, pouvait engendrer des évènements indésirables graves. Il est ainsi apparu nécessaire au RéQua de mener un groupe de travail sur le sujet.
Afin d’améliorer la prise en charge et l’accompagnement de la personne soignée ou hébergée, les objectifs du projet EPP étaient d’harmoniser les pratiques et de diminuer l’incidence des contentions, ainsi que leurs conséquences physiques et psychologiques sur les patients ou résidents. Pour ce faire, il était nécessaire de :
- investiguer les modalités de la pose des contentions dans les services : qualité de la prescription médicale ; qualité de l’information de la personne hospitalisée ou hébergée et de son entourage ; sécurité et confort lors de l’utilisation de la contention au lit ou au fauteuil ; qualité de la surveillance et prévention des risques ;
- mesurer auprès des professionnels l’écart entre les pratiques réalisées et les références de bonne pratique ;
- mesurer auprès des personnes hospitalisées et de leur entourage l’écart entre les pratiques d’information réalisées et les références de bonnes pratiques ;
- identifier les ressources et freins existants ;
- identifier les actions préventives et correctives à mettre en place.
La méthode d’EPP utilisée était un audit clinique ciblé (ACC), selon une approche par comparaison à un référentiel. L’ACC, méthode de première intention, a permis de comparer les pratiques à des références admises (existence et importance des écarts) en vue de les améliorer. Les critères d’évaluation retenus se sont appuyés sur des données issues de la réglementation, des recommandations de grade élevé (à haut niveau de preuve) ou sur un fort consensus professionnel : ils ont permis de réaliser un état des lieux objectif de la conformité de la pratique et ont ainsi représenté un potentiel d’amélioration des pratiques cliniques et organisationnelles, orientés vers la sécurité du patient, la contention étant un acte à risques.
(1)
Les membres de la Forap sont : Capps en Bretagne, CCECQA en Nouvelle-Aquitaine, Ceppral en Auvergne-Rhône-Alpes, Oraqs 971 en Guadeloupe, Orison à la Réunion-Mayotte, Pasqual en Provence-Alpes-Côte d’Azur, Qualirel Santé en Pays-de-la-Loire, Qualiris en Centre-Val de Loire, QualiSté en Corse, Qual’Va en Normandie, RéQua en Bourgogne-Franche-Comté, Réseau Santé Qualité Risques des Hauts-de-France, Staraqs en Île-de-France, Apperqual en Languedoc-Roussillon
(2)
Anaes. Limiter les risques de la contention physique de la personne âgée. Évaluation de pratiques professionnelles dans les établissements de santé. octobre 2000.