L’allocation personnalisée d’autonomie (APA) implique une évaluation de la dépendance de la personne âgée de soixante ans au moins. Par conséquent, les professionnels de l’équipe médico-sociale, en charge de l’évaluation du degré de dépendance, sont amenés à partager certaines informations. Quant à l’aide sociale à l’hébergement (ASH), qui constitue également une prestation d’aide sociale légale, les personnes âgées, qui ne peuvent être utilement aidées à domicile, ont la possibilité d’y être éligibles, sous certaines conditions, notamment de ressources (1). Dès lors qu’elles consentent à être accueillies chez un particulier agréé (2) ou dans un établissement habilité par convention à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale (3), une prise en charge financière par l’ASH peut être envisagée.
Outre les aspects techniques liés à ces deux prestations sociales, c’est surtout la question des politiques publiques à l’égard des personnes âgées qui se trouve posée. Aussi, la loi d’adaptation de la société au vieillissement du 28 décembre 2015 prévoit-elle des dispositions qui autorisent des transmissions d’informations entre caisses de sécurité sociale aux fins d’adapter les prestations allouées aux besoins actuels et futurs des personnes âgées.
A. ÉVALUATION DE LA DÉPENDANCE ET PARTAGE D’INFORMATIONS
Toute personne âgée de 60 ans au moins, résidant en France et qui se trouve dans l’incapacité d’assumer les conséquences du manque ou de la perte d’autonomie lié à son état physique ou mental a droit à une allocation personnalisée d’autonomie (APA) (4) permettant une prise en charge adaptée à ses besoins (5). Ce dispositif relève de la compétence du conseil départemental. L’APA est destinée aux personnes ayant besoin d’une aide pour l’accomplissement des actes essentiels de la vie ou dont l’état nécessite une surveillance régulière.
Pour apprécier le degré de perte d’autonomie d’une personne âgée, on se réfère à une grille nationale dite AGGIR (autonomie, gérontologie, groupe iso-ressources) (6). Cette grille contient six niveaux de dépendance allant des situations les plus lourdes (GIR 1) aux moins lourdes (GIR 6).
Une équipe médico-sociale constituée de professionnels sociaux et médico-sociaux, après évaluation du degré de dépendance de la personne, élabore un plan d’aide qui définit les modalités d’intervention qui lui paraissent les plus appropriées compte tenu du besoin d’aide et de l’état de perte d’autonomie du bénéficiaire. Le plan d’aide tient compte de l’entourage social et familial de la personne, ainsi que de l’aménagement et de l’équipement de son logement. Un recensement des besoins du demandeur et des aides de toute nature (7) nécessaires à son maintien à domicile.
Pour remplir un objectif de soutien et d’aide adapté au bénéficiaire, il semble peu réaliste d’imaginer que les différents acteurs participant à l’accompagnement global de la personne ne soient pas amenés à échanger des informations entre eux. Pourtant, le législateur n’a pas prévu de possibilité de partage d’informations entre eux, comme cela existe pour les membres de l’équipe pluridisciplinaire de la MDPH et pour ceux de la CDAPH. Encore une fois, seul l’intérêt de l’usager doit servir de guide aux acteurs qui souhaitent s’échanger des informations. Dans l’absolu, un risque juridique existe, puisqu’il n’y a pas d’autorisation légale de partager. Toutefois, réservons l’hypothèse des échanges d’informations entre les membres de l’équipe médico-sociale de l’APA et des professionnels de santé sous certaines conditions (cf. section 3, Chapitre 2).
B. AUTRES DISPOSITIONS RELATIVES À L’APA ET À L’ASH
I. Conditions d’échange d’informations pour la perte d’autonomie
Afin de faciliter la mise en œuvre d’une politique de prévention plus coordonnée, la loi du 28 décembre 2015 d’adaptation de la société au vieillissement introduit un nouvel article dans le code de la sécurité sociale. Cet article autorise, sous conditions, les organismes de sécurité sociale à échanger entre eux des renseignements à caractère personnel concernant notamment les assurés de 55 ans et plus. Le but étant « d’apprécier la situation de leurs ressortissants pour l’accès à des prestations et avantage sociaux qu’ils servent ainsi qu’aux actions qu’ils mettent en œuvre en vue de prévenir la perte d’autonomie des personnes âgées » (8). Les informations à caractère médical sont exclues de cette transmission. Les modalités pratiques sont définies par un décret du 14 mars 2017 (9). Le décret liste les éléments d’information pouvant être transmis tels que, par exemple, l’identification de l’assuré, sa situation familiale ou encore ses droits à prestation en matière de retraite.
Généralement, la demande d’informations émane d’un organisme de sécurité sociale (Carsat, CNAV, CGSS) qui souhaite proposer un service à destination d’assurés susceptibles de présenter un risque de perte d’autonomie. L’organisme demandeur fournit une liste de personnes qu’il a identifiées à partir de sa base de données et qui présentent un risque de perte d’autonomie. Il transmet alors sa demande à l’observatoire régional des situations de fragilité de l’organisme de sécurité sociale territorialement compétent. À charge pour ce dernier de solliciter chacun des autres organismes de sécurité sociale détenant les informations dont l’organisme demandeur souhaite obtenir la communication. Enfin, l’observatoire régional des situations de fragilité fait parvenir les informations au demandeur initial.
Les personnes concernées par les données transmises sont informées de la mise en œuvre des traitements autorisés ainsi que des modalités d’exercice de leurs droits d’accès et de rectification des données les concernant par la diffusion d’une information sur les sites Internet respectifs des organismes chargés de la gestion d’un régime obligatoire de sécurité sociale (10).
Les délais de conservation des données sont réglementés strictement (11). Elles sont conservées par l’observatoire régional des situations de fragilité le temps nécessaire pour répondre à l’organisme demandeur. Et, dans tous les cas, jamais au-delà de trente jours. Ces traitements servent également des finalités de statistiques et de mesure de l’efficacité des actions de prévention mis en œuvre. Le délai de conservation des données à cette seule fin par l’observatoire des situations de fragilités est alors, au maximum, de cinq ans.
L’organisme de sécurité sociale demandeur ne peut, quant à lui, conserver les informations sollicitées au-delà de vingt-quatre mois.
II. Transmission obligatoire de données relatives à l’allocation personnalisée d’autonomie et aide sociale à l’hébergement
Conformément à la loi du 28 décembre 2015 d’adaptation de la société au vieillissement, un décret du 16 mars 2017 (12) précise les données relatives à l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et à l’aide sociale à l’hébergement (ASH) que doivent transmettre les départements à l’État ainsi que les modalités pratiques de cette transmission.
Tout d’abord, un arrêté des ministres chargés des personnes âgées et des collectivités territoriales (13) à paraître doit fixer la liste des données statistiques agrégées relatives aux décisions d’APA (demandes, instructions, décisions, recours). Des informations individuelles relatives aux bénéficiaires sont également transmises (montant de l’APA notifiée et versée, nature, volume et montant des aides financées par l’allocation, modalités de versement de l’allocation...).
Ensuite, les conseils départementaux transmettent au ministre chargé des personnes âgées des données individuelles relatives à l’instruction des demandes d’APA et d’ASH. Les transmissions portent notamment sur les caractéristiques du bénéficiaire et de l’établissement qui l’héberge, le cas échéant. Des informations relatives à la première demande du bénéficiaire, à la décision d’attribution afférente, aux demandes ultérieures d’allocation ou de révision, ainsi qu’à la cessation des droits doivent être communiquées. Il en est de même pour les informations concernant l’évaluation effectuée dans le cadre de l’APA. Pour l’aide sociale à l’hébergement, les éléments pris en compte pour le calcul et les montants attribués, ainsi que le montant de la participation du bénéficiaire et de ses obligés alimentaires aux frais d’hébergement en établissement doivent être transmis.
Les données relatives à l’APA comme à l’aide sociale à l’hébergement doivent être transmises pour le 30 juin 2018 (article 3, II du décret précité). Ultérieurement, ces données seront transmises selon une périodicité prévue par arrêté du ministre chargé des personnes âgées et qui ne pourra pas être inférieure à deux ans. Dans tous les cas, la transmission devra être effectuée au plus tard au 30 juin de l’année considérée.
Enfin, un décret du 9 mai 2017 (14) autorise les départements à créer un traitement de données à caractère personnel pour la mise en œuvre de ces deux prestations. Les informations ainsi collectées peuvent également être transmises à des destinataires limitativement énumérés. Sont notamment visés : les agents des MDPH, les personnels des administrations et organismes intervenant dans l’attribution, la gestion et le contrôle de l’APA, les agents des conseils départementaux ou encore les agents des caisses gestionnaires d’un régime d’assurance retraite. Encore faut-il que ces informations soient strictement nécessaires à l’exercice de leurs missions et limitées à leurs seules attributions. À noter qu’un droit d’accès et de rectification est reconnu aux bénéficiaires de l’APA et de l’aide sociale à l’hébergement.
(1)
Articles L. 113-1 et L. 231-4 du CASF.
(2)
Articles L. 441-1 à L. 444-9 du CASF.
(3)
Article L. 231-4, in fine.
(4)
L’APA a été créée par la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001. Elle remplace la prestation sociale dépendance créée par la loi 97-60 du 24 janvier 1997.
(5)
CASF, art. L. 232-1.
(6)
CASF, Annexe 2-1.
(7)
Aide-ménagère, garde à domicile, téléalarme, travaux d’adaptation du logement, lit médicalisé, potence, déambulateur...
(8)
CSS, art. L. 115-2-1.
(9)
Décret n° 2017-334 du 14 mars 2017 relatif aux traitements de données à caractère personnel pour la mise en œuvre des échanges d’informations entre organismes de sécurité sociale en vue de prévenir la perte d’autonomie, JORF n° 0064 du 16 mars 2017.
(10)
Article 6 du décret n° 2017-344 du 16 mars 2017 relatif aux transmissions de données sur l’allocation personnalisée d’autonomie et l’aide sociale à l’hébergement pour la mise en œuvre des échanges d’informations entre organismes de sécurité sociale en vue de prévenir la perte d’autonomie, p. 403.
(11)
Article 5 du décret n° 2017-344 du 16 mars 2017, ibid.
(12)
Décret n° 2017-344 du 16 mars 2017, ibid.
(13)
Arrêté non publié à ce jour.
(14)
Décret n° 2017-880 du 9 mai 2017 autorisant les traitements de données à caractère personnel destinés à la mise en œuvre de l’allocation personnalisée d’autonomie et de l’aide sociale à l’hébergement, JORF n° 0109 du 10 mai 2017. Voir également la délibération de la Commission nationale de l’informatique et des libertés n° 2017-142 du 27 avril 2017 portant avis sur le projet de décret du 9 mai 2017 précité.