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La délégation d’autorité parentale forcée

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Dans certains cas, les parents ne souhaitent pas ou ne peuvent pas saisir la justice, alors même qu’ils n’exercent pas l’autorité parentale dont ils restent pourtant titulaires. Selon l’article 377 du code civil, « en cas de désintérêt manifeste ou si les parents sont dans l’impossibilité d’exercer tout ou partie de l’autorité parentale, le particulier, l’établissement ou le service départemental de l’aide sociale à l’enfance qui a recueilli l’enfant ou un membre de la famille peut également saisir le juge aux fins de se faire déléguer totalement ou partiellement l’exercice de l’autorité parentale ».
Ainsi, les proches de l’enfant comme les services qui l’accompagnent peuvent demander au juge aux affaires familiales de se voir déléguer tout ou partie de l’autorité parentale. Dans cette hypothèse, les parents sont appelés à l’instance ; s’ils s’y présentent, leur avis est entendu, mais il n’est pas indispensable à la mise en place de la délégation d’autorité parentale qui sera in fine ordonnée par le juge aux affaires familiales.
Cette procédure permet notamment au service de l’aide sociale à l’enfance de faire constater par le juge aux affaires familiales le désintérêt manifeste ou encore l’impossibilité d’un ou des parents d’exercer l’autorité parentale. Le service obtient alors la délégation d’autorité parentale, et peut amorcer un travail éducatif et psychologique avec l’enfant pour l’aider à accepter sa situation familiale.
Il en est ainsi pour Kévin. Ce jeune garçon est confié depuis l’âge de 4 ans au service de l’aide sociale à l’enfance ; progressivement ses parents n’honorent plus les droits de visite et d’hébergement qui leur sont attribués par la décision de justice et se désintéressent du parcours de leur enfant. Ce constat conduit le service de l’aide sociale à l’enfance à saisir le juge aux affaires familiales pour se voir déléguer l’autorité parentale et ainsi garantir la continuité du parcours de l’enfant.
Aurore a 14 ans lorsque sa mère, seule titulaire de l’autorité parentale, est hospitalisée et tombe dans un coma prolongé. Aurore est alors accueillie en urgence sur décision du juge des enfants. En parallèle, les services de l’aide sociale à l’enfance saisissent le juge aux affaires familiales pour se voir déléguer l’autorité parentale. La mère de l’enfant est en effet dans l’impossibilité d’exercer l’autorité parentale pour des raisons de santé et indépendamment de sa volonté.
Dans ces différents cas, l’article 377 du code civil prévoit (depuis la réforme du 14 mars 2016) que « le juge peut également être saisi par le ministère public, avec l’accord du tiers candidat à la délégation totale ou partielle de l’exercice de l’autorité parentale, à l’effet de statuer sur ladite délégation ». Le procureur de la République peut ainsi saisir le juge aux affaires familiales à la place du tiers, afin de faciliter la mise en œuvre de la délégation d’autorité parentale. Cette disposition pourrait permettre de favoriser l’utilisation de cette procédure lorsque le tiers se trouve dans un conflit de loyauté à l’égard du parent titulaire de l’autorité parentale. Il en est ainsi de l’oncle qui s’inquiète pour son neveu mais qui ne veut pas blesser son frère ou encore de la mère victime de violences conjugales qui craint la réaction de son mari violent si elle saisit le juge aux affaires familiales. Dans ces situations, le procureur de la République peut prendre l’initiative d’ouvrir la procédure en saisissant lui-même le juge aux affaires familiales.

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