Si tous les salariés de l’entreprise doivent, en principe, être couverts par le régime « frais de santé », certaines catégories d’entre eux peuvent se dispenser, à leur initiative, de l’obligation d’adhésion, sans que le caractère obligatoire du régime soit remis en cause. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 et le décret du 30 décembre 2015 ont instauré de nouveaux cas de dispenses d’affiliation de plein droit. D’autres dispenses demeurent facultatives. Dans tous les cas, l’employeur doit être en mesure de produire la demande de dispense des salariés concernés.
En pratique, les partenaires sociaux du secteur ont tous inscrit les dispenses d’adhésion dans des accords et avenants relatifs à la complémentaire santé obligatoire.
A. LES DISPENSES D’ORDRE PUBLIC
Ces dispenses sont de plein droit pour les salariés. Autrement dit, elles s’appliquent même si l’acte juridique mettant en place le régime « frais de santé » (accord de branche, d’entreprise, décision unilatérale de l’employeur) ne le prévoit pas.
(A noter)
La dispense de plein droit prévue au profit des salariés présents dans l’entreprise au moment de la mise en place de la couverture complémentaire santé par DUE demeure en vigueur, dès lors que le salarié participe pour partie à son financement (loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989, art. 11).
I. A qui s’adressent-elles ?
[Code de la sécurité sociale, articles L. 911-7, III, D. 911-2, D. 911-3 et D. 911-6 ; questions/réponses de la direction de la sécurité sociale du 29 décembre 2015]
a. Les salariés en CDD et contrat de mission
Les salariés précaires titulaires de contrats très courts peuvent renoncer à la couverture collective obligatoire de leur entreprise.
L’article L. 911-7, III du code de la sécurité sociale prévoit en effet que les salariés en contrat à durée déterminée (CDD) ou en contrat de mission peuvent se dispenser, à leur initiative, de l’obligation d’affiliation :
- si la durée d’adhésion au régime obligatoire « frais de santé » est inférieure à trois mois. Par exemple, explique la direction de la sécurité sociale, si le salarié a un CDD de deux mois et que l’accord de branche mettant en place la couverture collective obligatoire de frais de santé prévoit qu’il bénéficiera de cette couverture pendant quatre mois, il n’est pas concerné par ce cas de dispense (Questions/réponses du 29 décembre 2015, QR 2) ;
- et s’ils justifient bénéficier d’une couverture santé respectant les conditions des contrats responsables (C. séc. soc., art. L. 871-1) (cf. infra, section 2, § 2).
La durée de trois mois s’apprécie à compter de la date de prise d’effet du contrat de travail.
Exemple
Un salarié ayant conclu un CDD de deux mois peut se dispenser d’adhérer à la couverture « frais de santé » (CDD inférieur à trois mois). Si son contrat est renouvelé de deux mois, le contrat aura une durée totale de quatre mois et le salarié entrera alors obligatoirement dans le dispositif.
La durée de trois mois ne prend pas en compte celle de la portabilité des droits en cas de cessation du contrat de travail ouvrant droit à l’assurance chômage (cf. encadré, p. 114).
(A noter)
La loi a instauré un chèque santé au profit de ses salariés (cf. infra, § 3).
b. Les salariés déjà couverts
En outre, d’autres catégories de salariés peuvent se dispenser, à leur initiative, de l’obligation de couverture, « eu égard à la nature ou aux caractéristiques de leur contrat de travail ou au fait qu’ils disposent par ailleurs d’une couverture complémentaire » (C. séc. soc., art. L. 911-7, III). Il s’agit (C. séc. soc., art. D. 911-2 et D. 911-3) :
- des salariés bénéficiaires de la protection complémentaire en matière de santé (cf. supra, chapitre 2) ou de l’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS) (cf. supra, chapitre 3). La dispense ne peut plus jouer lorsque ces salariés cessent de bénéficier de cette couverture ou de cette aide ;
- des salariés couverts par une assurance individuelle de frais de santé au moment de la mise en place des garanties ou de l’embauche si elle est postérieure. La dispense ne peut jouer que jusqu’à l’échéance du contrat individuel ;
- les salariés qui bénéficient, pour les mêmes risques, y compris en tant qu’ayants droit, de prestations servies au titre d’un autre emploi en tant que bénéficiaire notamment :
- d’une couverture complémentaire collective et obligatoire (C. séc. soc., art. L. 242-1),
- d’une mutuelle « fonction publique » (agents de l’Etat ou des collectivités territoriales) (décret n° 2007-1373 du 19 septembre 2007 et décret n° 2011-1474 du 8 novembre 2011),
- d’un contrat d’assurance de groupe dit « Madelin » (loi n° 94-126 du 11 février 1994),
- du régime local d’Alsace-Moselle (C. séc. soc., art. D. 325-6 et D. 325-7) ;
- les ayants droit des salariés dans les régimes isolé/famille obligatoires (C. séc. soc., art. D. 911-3).
II. Quel formalisme ?
[Code de la sécurité sociale, article D. 911-5 ; questions/réponses de la direction de la sécurité sociale du 29 décembre 2015]
Les dispenses d’adhésion sont de droit. Elles n’ont donc pas à figurer dans l’acte fondateur du régime « frais de santé » (accord collectif, DUE).
Elles doivent toujours relever du libre choix du salarié, qui peut préférer adhérer à la complémentaire santé de l’entreprise s’il l’estime plus avantageuse pour lui. La demande de dispense intervient donc à son initiative. Elle doit être formulée :
- au moment de l’embauche ;
- ou, si elle est postérieure, à la date de mise en place des garanties ou à la date de prise d’effet de la couverture responsable (sauf couverture individuelle).
Selon la direction de la sécurité sociale, le salarié doit déclarer :
- le cadre dans lequel cette dispense est formulée. Par exemple, il demande à être dispensé parce qu’il bénéficie de l’ACS ;
- la dénomination de l’organisme assureur portant le contrat souscrit lui permettant de solliciter cette dispense (nom de la mutuelle de fonctionnaire qui le couvre en tant qu’ayant droit s’il est dans ce cas de figure) ;
- ou, le cas échéant, la date de fin du contrat individuel, s’il a un terme, qu’il avait souscrit antérieurement à la mise en place du régime collectif dans l’entreprise.
La direction de la sécurité sociale ajoute qu’il n’y a pas lieu de prévoir la production d’autres pièces ou justificatifs. Elle précise qu’une déclaration sur l’honneur suffit (Questions/réponses du 29 décembre 2015, QR 3).
B. LES DISPENSES FACULTATIVES
[Code de la sécurité sociale, articles R. 242-1-6, 2°, et D. 911-4]
Les cas de dispense facultative visent :
- les salariés et apprentis en CDD ou en contrat de mission d’une durée supérieure ou égale à douze mois. Ils doivent justifier annuellement, par écrit en produisant tous documents, qu’ils bénéficient d’une couverture individuelle souscrite par ailleurs pour le même type de garanties ;
- les salariés et apprentis en CDD ou en contrat de mission d’une durée inférieure à douze mois. Ils ne sont pas tenus d’avoir souscrit une couverture individuelle par ailleurs ;
- les salariés à temps partiel et les apprentis lorsque l’adhésion au système de garanties les conduit à cotiser à hauteur de 10 % de leur rémunération brute ;
- les salariés présents à la mise en place de la couverture complémentaire santé par décision unilatérale de l’employeur financée intégralement par ce dernier.
La demande de dispense émane du salarié ; elle doit être écrite. Dans les trois premiers cas, elle peut intervenir à tout moment, sauf disposition contraire dans l’acte juridique mettant en place le régime « frais de santé ». Dans le dernier cas, la dispense intervient à la date de mise en place des garanties dans l’entreprise.
Contrairement aux dispenses de plein droit (cf. supra, A, II), les dispenses facultatives doivent être insérées dans l’acte juridique pour pouvoir être invoquées par le salarié.