La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a prévu, à compter du 1er janvier 2016, pour les salariés précaires qui font valoir leur faculté d’être dispensés de l’obligation d’adhésion au contrat collectif « frais de santé », le versement, par leur employeur, d’une somme représentative de ce que ce dernier aurait consacré à la complémentaire santé des salariés et à sa portabilité pendant un an (1). Ce versement, qui prend la forme d’un chèque santé, permet aux intéressés de financer en partie la complémentaire santé dont ils disposent par ailleurs.
A. LES SALARIÉS CONCERNÉS
[Code de la sécurité sociale, articles L. 911-7-1 et D. 911-7]
Le chèque santé est réservé aux salariés en contrats courts ou à temps très partiel.
I. Les dispensés de droit
Le chèque santé par l’employeur est de droit pour les « dispensés » au titre de l’article L. 911-7, III, du code de la sécurité sociale, à savoir les salariés en CDD ou en contrat de mission dont la durée est inférieure ou égale à trois mois sous réserve de justifier d’une couverture santé responsable et « non aidée » par ailleurs (C. séc. soc., art. L. 911-7-1, IV) (cf. supra, § 2, A, I, a).
II. Les destinataires exclusifs du chèque santé
Un accord de branche ou, à défaut, un accord d’entreprise peut prévoir que l’obligation d’assurer une couverture complémentaire santé aux salariés en contrats précaires se fasse uniquement par le biais du chèque santé (C. séc. soc., art. L. 911-7-1, III). Sont concernés (C. séc. soc., art. D. 911-7) :
- les salariés dont la durée du contrat de travail ou du contrat de mission est inférieure ou égale à trois mois ;
- les salariés dont la durée effective du travail prévue au contrat est inférieure ou égale à quinze heures par semaine.
Jusqu’au 31 décembre 2016 (2), dans l’attente du déroulement des négociations, l’employeur peut mettre en place ce chèque santé par décision unilatérale, sauf pour les salariés qui sont déjà couverts à titre collectif et obligatoire par un contrat de santé au sein de leur entreprise (loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015, art. 34, V, B).
(A noter)
L’avenant 338 du 3 juin 2016 à la CCN du 15 mars 1966, en attente d’agrément, met en place le versement santé pour les CDD ou contrats de mission dont la durée est inférieure ou égale à trois mois et les temps partiels dont la durée de travail est inférieure à quinze heures par semaine. Le salarié, ayant l’initiative de la dispense d’affiliation, devra apporter la preuve d’une couverture responsable et faire la demande de dispense et du versement santé.
B. LE MONTANT DU CHÈQUE SANTÉ
[Code de la sécurité sociale, articles L. 911-7-1, II et D. 911-8 ; questions/réponses de la direction de la sécurité sociale du 29 décembre 2015]
Le montant du chèque santé est calculé mensuellement sur la base d’un montant de référence auquel est appliqué un coefficient de majoration pour tenir compte de la portabilité.
I. Le montant de référence
Le montant de référence correspond, pour la période concernée, à la contribution de l’employeur au financement de la couverture collective pour la catégorie à laquelle appartient le salarié. Contribution qui tient compte, le cas échéant, de la rémunération de ce dernier.
S’il n’est pas possible de déterminer le montant de référence pour la catégorie de salariés, un montant forfaitaire de 15 € (5 € en Alsace-Moselle) est retenu.
Lorsque le montant de la contribution de l’employeur est en tout ou partie forfaitaire, il est appliqué le coefficient suivant sur la part forfaitaire :
En tout état de cause, le montant de la contribution ne peut pas être inférieur à 15 € ou 5 € en Alsace-Moselle, ces deux montants étant également proratisés en fonction de la durée du travail du salarié.
(A noter)
Pour les salariés mis à disposition par une association intermédiaire, le calcul du versement s’effectue sur le fondement du nombre d’heures faisant l’objet de cette mise à disposition.
II. Le coefficient
Le coefficient appliqué au montant de référence est égal à :
- 105 % pour les salariés titulaires d’un contrat à durée indéterminée ;
- 125 % pour les salariés en CDD ou en contrat de mission.
III. Quelques cas pratiques
Dans son Questions/réponses du 29 décembre 2015, la direction de la sécurité sociale donne quelques exemples de calcul du chèque santé (QR 10).
Exemple 1
La contribution de l’employeur est égale à 1 % du salaire. Le salaire est de 1 500 €. Dans ce cas, le montant de référence sera de 15 € (1 % × 1 500). pour un salarié en CDD, le coefficient de majoration sera de 125 % : le montant mensuel versé aux salariés sera donc de 18,75 € (15 € × 125 %).
Exemple 2
La contribution de l’employeur est forfaitaire et égale à 20 €. Le salarié travaille 35 heures par semaine à temps plein dans le cadre d’un CDD de moins de trois mois, pour lequel le contrat collectif obligatoire ne lui garantit pas une couverture complémentaire santé d’au moins trois mois. Dans ce cas, le montant de référence est égal à 20 €. Le coefficient de majoration sera de 125 % : le montant mensuel versé aux salariés sera donc de 25 € (20 × 125 %).
Exemple 3
La contribution de l’employeur est forfaitaire et égale à 20 €. Le salarié a un contrat de travail de 15 jours travaillés à temps plein (journée de 7 heures). Dans ce cas, le montant de référence est égal à 13,84 € (20 × 7 × 15/151,67). Le coefficient de majoration sera de 125 % : le montant mensuel versé aux salariés sera donc de 17,30 € (13,84 × 125 %).
C. LES RÈGLES DE NON-CUMUL
[Code de la sécurité sociale, article L. 911-7-1, II]
L’employeur n’a pas à verser le chèque santé si le salarié bénéficie :
- de la protection complémentaire en matière de santé (cf. supra, chapitre 2) ;
- de l’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS) (cf. supra, chapitre 3) ;
- d’une couverture collective et obligatoire, y compris en tant qu’ayant droit ;
- d’une couverture complémentaire donnant lieu à la participation financière d’une collectivité publique.
D. LE RÉGIME SOCIAL
[Questions/réponses de la direction de la sécurité sociale du 29 décembre 2015, QR 9]
Le chèque santé versé est exonéré de cotisations sociales dans les conditions et limites prévues par l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, mais soumis à la CSG et à la CRDS et, le cas échéant, au forfait social au taux de 8 % si la structure emploie au moins onze salariés.
(1)
La portabilité correspond au maintien des garanties du contrat au profit des anciens salariés demandeurs d’emploi, qui en bénéficiaient en tant qu’actifs (cf. encadré, p. 114).
(2)
La loi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels du 8 août 2016 avait prévu la pérennisation au-delà du 31 décembre 2016 de la mise en place du chèque santé par DUE. Une disposition censurée par le Conseil constitutionnel qui a jugé qu’elle ne présentait pas de lien, même indirect, avec les autres mesures inscrites dans le projet de loi (loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, art. 62 censuré ; décision n° 2016-736 DC du 4 août 2016, JO du 9-08-16). Elle pourrait figurer dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 qui devrait être présenté début octobre en conseil des ministres.