Recevoir la newsletter

Les aides alimentaires

Article réservé aux abonnés

L’aide alimentaire connaît une forte croissance en France. Quelque 3,9 millions de personnes ont eu recours à l’aide alimentaire de façon ponctuelle, régulière ou permanente en 2013(1). Selon une enquête publiée en 2015, près de un quart des personnes sans domicile ont reçu le mois précédant l’enquête un bon alimentaire ou un ticket restaurant (19 %) ou encore un colis alimentaire (23 %)(2). En 2014, ce sont près de 66 000 tonnes de denrées qui ont été distribuées par les associations grâce aux crédits européens et au cofinancement national et 3 124 tonnes grâce aux crédits nationaux épiceries sociales(3).
Selon la situation d’hébergement, la manière de recourir aux aides alimentaires varie. Ainsi les personnes dormant dans des endroits non prévus pour l’habitation (et donc inadaptés pour cuisiner par exemple) sont moins nombreuses à recourir aux bons ou aux colis alimentaires ; en revanche, elles se déplacent plus dans des lieux de distribution de nourriture gratuite (36 %)(4).
Par ailleurs, les personnes résidant à l’hôtel ont le plus fréquemment recours à ces aides (71 %), en particulier sous la forme de colis ou de prise de nourriture dans le cadre d’une distribution gratuite. A l’opposé, les personnes vivant en hébergement collectif sont celles qui recourent le moins aux aides alimentaires.
Toutes situations confondues, 47 % des personnes enquêtées avaient effectué au moins une démarche pour obtenir cette aide alimentaire (67 % chez celles n’ayant aucune ressource).
Une autre étude identifie quatre catégories de ménages qui correspondent à différents modes de gestion de la contrainte alimentaire(5) :
  • les autogestionnaires qui ne font pas appel aux dispositifs d’aide alimentaire par ignorance de leur existence ou en raison des représentations négatives qu’ils en ont ;
  • les gestionnaires indirects correspondant à des travailleurs pauvres aux ressources instables qui mobilisent l’aide alimentaire de façon discontinue, comme variable d’ajustement budgétaire ;
  • les multiactivateurs ancrés durablement dans la précarité qui font appel à l’aide alimentaire dans la durée ;
  • les monogestionnaires dont les ressources sont très faibles voire inexistantes et pour lesquels l’alimentation dépend presque exclusivement des mécanismes d’aide alimentaire.
La problématique de l’aide alimentaire est prise en compte tant au plan national qu’au plan européen au travers du Fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD).


A. AU PLAN NATIONAL

[Code général des impôts, article 238 bis ; code rural et de la pêche maritime, articles L. 230-6 et R. 230-9 à R. 230-24 ; code de l’environnement, articles L. 541-15-5, II et III, et L. 541-15-6 ; instruction DGAL/SDPAL n° 2015-920 du 2 novembre 2015, NOR : AGRG1526087C]
La loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche a donné un statut à l’aide alimentaire et a été complétée par divers textes réglementaires(6). Ces textes prévoient notamment que pour recevoir des contributions publiques destinées à la mise en œuvre de l’aide alimentaire, les associations doivent être habilitées. En outre, le gouvernement a élaboré un programme national pour l’alimentation.
Par ailleurs, une loi du 11 février 2016 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire a conféré un cadre législatif pour éviter cette pratique(7).


I. L’habilitation des associations

Selon l’article L. 230-6 du code rural et de la pêche maritime, « l’aide alimentaire a pour objet la fourniture de denrées alimentaires aux personnes les plus démunies. Cette aide est apportée tant par l’Union européenne que par l’Etat ou toute autre personne morale ».
Ces denrées peuvent notamment provenir d’achats réalisés au moyen de crédits du programme national d’aide alimentaire, d’achats réalisés par une personne morale au moyen d’autres fonds publics, de la collecte, du tri et de la transformation de denrées invendues répondant aux exigences en vigueur en matière d’hygiène des denrées alimentaires.
A cet égard, les personnes morales de droit privé constituées sous forme d’associations relevant de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association qui œuvrent dans le secteur caritatif peuvent mettre en place un dispositif de stockage privé consistant à acheter des produits alimentaires en période de surproduction agricole pour les entreposer et les redistribuer ensuite aux personnes les plus démunies.
Par ailleurs, pour recevoir des contributions publiques destinées à la mise en œuvre de l’aide alimentaire, les personnes morales de droit public ou privé doivent faire l’objet d’une habilitation soit par le ministre chargé de l’alimentation (associations ayant une vocation nationale), soit par le préfet de région. Pour cela, elles doivent remplir un certain nombre de conditions. L’habilitation est accordée, la première fois, pour trois ans puis pour dix ans (C. rural et pêche maritime, art. R. 230-18). Une circulaire du 2 novembre 2015 indique qu’« au niveau national, 20 têtes de réseau représentant plus de 2 000 associations sont habilitées ».
Les associations habilitées peuvent se porter candidates pour bénéficier des denrées obtenues dans le cadre du programme national d’aide alimentaire ou des aides européennes. A cet effet, des appels à candidatures sont organisés au moins tous les cinq ans. La liste des associations retenues dans ce cadre vaut alors pour cinq ans (trois ans après un premier appel à candidatures).
En outre, les personnes morales de droit privé habilitées sont tenues de fournir à l’autorité administrative les données chiffrées portant sur les denrées distribuées, sur les bénéficiaires de l’aide alimentaire et sur les personnes morales de droit privé ou public fournies en denrées alimentaires (C. rural et pêche maritime, art. R. 230-23).
La loi du 11 février 2016 prévoit, par ailleurs, que le don de denrées alimentaires par un commerce de détail dont la surface de vente est supérieure à un seuil de 400 m2 à une association caritative habilitée doit faire l’objet d’une convention qui en précise les modalités. Par ailleurs, d’ici au 12 février 2017 ou au plus tard un an à compter de la date de leur ouverture ou de la date à laquelle leur surface de vente dépasse 400 m2, les enseignes devront signer au moins une convention de don alimentaire avec une ou plusieurs associations habilitées. Les enseignes qui en ont déjà conclu une avant le 12 février 2016 sont réputées avoir satisfait à cette obligation.
Enfin, à compter du 12 février 2017, aucune stipulation contractuelle ne pourra empêcher un opérateur du secteur alimentaire de faire don de denrées alimentaires vendues sous marque de distributeur à une association caritative habilitée.


II. Le programme national pour l’alimentation

Le développement de l’aide alimentaire est pris en compte par le programme national pour l’alimentation adopté en octobre 2014 et par le plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale de 2013.
Ainsi, le programme national pour l’alimentation relève notamment que la solidarité est l’un des enjeux majeurs de la politique publique de l’alimentation. L’objectif est de permettre l’accès, pour tous, à « une alimentation de qualité, sur les plans à la fois sanitaire et nutritionnel » et d’adapter les aides alimentaires aux attentes et besoins des personnes les plus démunies(8). « Le moment du don est aussi une occasion de soutien plus large. L’accent doit ainsi être mis sur les projets de réinsertion, en faisant des métiers de l’alimentation ou de la création d’activité économique autour des dons alimentaires un facteur de réinsertion », énonce l’administration dans une instruction du 2 novembre 2015.
Pour ce faire, des aides publiques sont accordées aux associations capables de gérer l’aide alimentaire.
En 2015, 12 millions d’euros ont complété les fonds européens en faveur de l’aide alimentaire. En outre, un financement national de 7,9 millions d’euros a été spécifiquement dédié aux épiceries sociales et solidaires. En effet ces épiceries qui demandent une petite participation financière aux bénéficiaires ne peuvent de ce fait pas bénéficier des fonds européens.
La feuille de route 2015-2017 du plan « pauvreté » du 3 mars 2015 a conforté l’aide alimentaire en tant que levier d’insertion et d’accès aux droits(9).
Dans ce cadre, le gouvernement a lancé, en septembre 2015, plusieurs appels à projets autour de deux axes : développer l’« aller-vers » en faveur des publics en très grande précarité, et en particulier les familles hébergées à l’hôtel, mieux intégrer l’aide alimentaire dans la fluidité des parcours sociaux des personnes en développant des partenariats innovants.
Par ailleurs, des avantages fiscaux sont accordés aux entreprises afin de faciliter les dons de produits agricoles en nature par les agriculteurs et le gouvernement a annoncé, en novembre 2015, son intention d’étendre le champ des réductions d’impôts afin de permettre aux producteurs de donner des fruits, légumes et pommes de terre transformés et conditionnés, ce qui est déjà possible pour les dons de produits bruts, le lait et les œufs. Cette réduction est égale à 60 % du montant des versements effectués pris dans la limite de 5 ‰ du chiffre d’affaires.
Par ailleurs, le gouvernement a mis en place une cartographie des associations d’aide alimentaire permettant la mise en relation de ces dernières avec des entreprises souhaitant procéder à un don alimentaire ainsi qu’avec les services sociaux en charge de l’accompagnement des personnes démunies(10).


B. AU PLAN EUROPÉEN

[Règlement (UE) n° 223/2014 du 11 mars 2014, JOUE L. 72/1 du 12-03-14]
Le Fonds européen d’aide aux plus démunis a pris le relais du programme européen d’aide aux plus démunis qui avait été mis en place en 1987. Il apporte « son appui à des dispositifs nationaux d’aide alimentaire et/ou d’assistance matérielle de base aux personnes les plus démunies, par l’intermédiaire d’organisations partenaires choisies par les Etats membres » (art. 4).
Le règlement (UE) du 11 mars 2014 relatif à ce fonds rappelle l’objectif fixé au niveau européen : « Réduire d’au moins 20 millions le nombre de personnes menacées de pauvreté et d’exclusion sociale d’ici 2020. » Il prévoit, dans ce cadre, l’élaboration par chaque Etat membre d’un programme opérationnel pour la période 2014-2020. Celui de la France a ainsi été approuvé par la commission européenne le 31 juillet 2014.
En 2015, 69 millions d’euros de crédits européens permettent l’achat et la distribution de denrées aux personnes les plus démunies au travers des quatre têtes de réseaux émargeant au FEAD (Croix-Rouge française, Restos du cœur, Fédération française des banques alimentaires et Secours populaire français)(11). Sur la période 2014-2020, la France va bénéficier d’une enveloppe totale de 499,20 millions d’euros(12).


(1)
Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et de la Forêt, « Le nouveau programme national pour l’alimentation », novembre 2014, p. 3.


(2)
Legal A., « Le recours aux prestations et services de protection sociale des personnes sans domicile », DREES, Minima sociaux et prestations sociales, édition 2015, p. 31.


(3)
« Tous concernés par le don de denrées alimentaires », accessible sur www.agriculture.gouv.fr


(4)
Legal A., « Le recours aux prestations et services de protection sociale des personnes sans domicile », préc.


(5)
Rapport « Inégalités sociales et alimentation. Quels sont les besoins et les attentes en termes d’alimentation des personnes en situation d’insécurité alimentaire et comment les dispositifs d’aide alimentaire peuvent y répondre au mieux ? », décembre 2014, accessible sur www.cnle.gouv.fr, rubrique « Travaux du CNLE », dossier de la réunion plénière du 16 avril 2015.


(6)
Loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010, JO du 28-07-10.


(7)
Loi n° 2016-138 du 11 février 2016, JO du 12-02-16.


(8)
« Le nouveau programme national pour l’alimentation. Notre modèle a de l’avenir », novembre 2014, accessible sur www.agriculture.gouv.fr


(9)
« Plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale », Bilan 2013-2014 et feuille de route 2015-2017, 3 mars 2015, accessible sur www.social.gouv.fr




(11)
« Tous concernés par le don de denrées alimentaires », accessible sur www.agriculture.gouv.fr


(12)
Cette enveloppe est répartie comme suit : 67, 2 millions en 2014 ; 68,5 millions d’euros en 2015 ; 69,9 millions en 2016 ; 71,7 millions en 2017 ; 72,7 millions en 2018 ; 74,1 millions en 2019 et 75,6 millions en 2020.

SECTION 3 - LES AIDES ALIMENTAIRES ET VESTIMENTAIRES

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur