L’examen du recours devant la CNDA commence par une phase d’instruction. Ensuite, le dossier est examiné par la cour en audience publique ou en huis clos. Une procédure de traitement par ordonnance est également prévue dans certaines hypothèses.
A. LES DÉLAIS D’EXAMEN DES RECOURS
[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, article L. 731-2]
Lorsque la CNDA statue en formation collégiale, elle dispose d’un délai de cinq mois à compter de sa saisine pour examiner le recours.
Lorsque la décision de l’OFPRA a été prise en procédure accélérée ou en cas de décision d’irrecevabilité (cf. supra, section 1, § 2 et § 5), la cour statue à juge unique. Le président de la cour (ou le président de la formation de jugement qu’il désigne) statue alors dans un délai de cinq semaines à compter de sa saisine. De sa propre initiative ou à la demande du requérant, le président de la cour ou le président de la formation de jugement peut, à tout moment de la procédure, renvoyer la demande à la formation collégiale, s’il estime que celle-ci ne relève pas de la procédure accélérée ou n’est pas irrecevable ou qu’elle soulève une difficulté sérieuse. La cour statue alors dans le délai de cinq mois.
B. L’INSTRUCTION
I. Les pouvoirs de la cour
[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, articles R. 733-15 et R. 733-16]
La cour peut prescrire toute mesure d’instruction qu’elle juge utile. Si une expertise est ordonnée, le rapport déposé par l’expert désigné par le président de la cour est communiqué aux parties.
La cour ne peut se fonder sur des éléments d’information extérieurs au dossier et portant sur des circonstances de fait propres au demandeur d’asile ou spécifiques à son récit, sans en avoir préalablement informé les parties. Celles-ci sont également préalablement informées lorsque la cour est susceptible de fonder sa décision sur un moyen soulevé d’office, notamment une clause d’exclusion (cf. infra, chapitre 6).
Un délai doit être laissé aux parties afin qu’elles déposent leurs observations, sans que la clôture de l’instruction écrite y fasse obstacle.
II. La communication avec le requérant et son avocat
[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, articles R. 733-10, R. 733-11 et R. 733-12]
Le recours formé par le demandeur d’asile devant la CNDA est communiqué à l’OFPRA, qui transmet sans délai le dossier du requérant à la cour. Celle-ci le tient à disposition du demandeur afin qu’il puisse le consulter. Les autres mémoires et pièces produits par le requérant sont communiqués à l’office s’ils contiennent des éléments nouveaux.
Les communications avec les requérants sont effectuées par lettres simples, à l’exception de l’avis de réception du recours, de l’ordonnance de clôture de l’instruction, de l’information relative à la prise en compte d’un moyen soulevé d’office (c’est-à-dire extérieur au dossier), de l’avis d’audience et de la décision elle-même, qui sont notifiés par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
Les communications avec les avocats sont également effectuées par lettres simples, à l’exception de l’ordonnance de clôture de l’instruction et de l’avis d’audience notifiés par lettre recommandée avec demande d’avis de réception (1).
Lorsque le requérant est représenté par un avocat, les actes de procédure sont accomplis à l’égard de ce mandataire. Toutefois, la notification de l’avis de réception du recours, l’avis d’audience et la décision elle-même sont adressés personnellement au requérant.
Les communications avec l’OFPRA sont faites par voie électronique, dans des conditions garantissant la fiabilité, l’intégrité, la sécurité et la confidentialité des échanges. L’office est réputé avoir reçu notification des documents qui lui ont été ainsi adressés à la date apparaissant dans les rapports de transmission générés par l’application informatique.
III. La clôture de l’instruction écrite
[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, articles R. 733-13 et R. 733-13-1]
Les mémoires et diverses pièces doivent être communiqués à la cour avant la fin du délai de clôture de l’instruction. Plusieurs situations sont à distinguer :
- Le président de la formation de jugement ou de la cour peut fixer la date de clôture de l’instruction écrite par une ordonnance notifiée aux parties 15 jours au moins avant cette date. L’ordonnance n’est pas motivée et ne peut faire l’objet d’aucun recours. L’instruction écrite peut être rouverte dans les mêmes formes.
- Lorsque les parties ont été informées de la date de l’audience 2 mois au moins avant celle-ci, le délai de clôture de l’instruction écrite est fixé à 10 jours francs avant la date de l’audience.
- En l’absence d’ordonnance ou d’information des parties dans les 2 mois qui précèdent l’audience (2), l’instruction est close avant la date de l’audience.
- Enfin, si la demande est examinée en procédure accélérée ou si la décision de l’OFPRA était une décision d’irrecevabilité, le juge unique qui va statuer peut, dès l’enregistrement du recours, par une décision qui tient lieu d’avis d’audience, fixer la date d’audience. Dans ce cas, l’instruction écrite est close 3 jours avant la date de l’audience. Cette décision est adressée aux parties par tout moyen 15 jours au moins avant le jour de la date d’audience. Elle informe les parties de la clôture de l’instruction.
C. L’AUDIENCE
I. L’avis d’audience
[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, article R. 733-19]
L’avis d’audience est adressé aux parties 30 jours au moins avant le jour où l’affaire sera appelée. Il informe les parties de la clôture de l’instruction écrite. Le conseil du requérant est informé du jour de l’audience par tout moyen (3). En cas d’urgence, le délai de convocation peut être réduit, sans être inférieur à 7 jours. Dans ce cas, l’instruction écrite est close 5 jours francs avant l’audience.
II. L’assistance par un interprète
[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, articles L. 733-1 et R. 733-17]
Les intéressés peuvent présenter leurs explications à la Cour nationale du droit d’asile et s’y faire assister d’un conseil et d’un interprète.
La cour met gratuitement à disposition du requérant, pour l’assister à l’audience, un interprète désigné dans la langue indiquée dans son recours ou, à défaut de cette indication ou si la cour ne peut désigner un interprète dans la langue demandée, dans la langue dans laquelle il a été entendu à l’OFPRA ou dans une langue dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend. En cas de difficulté pour obtenir le concours d’un interprète qualifié présent physiquement auprès du requérant, l’audience ne se tient qu’après que la cour s’est assurée de la présence, dans la salle où elle siège, d’un tel interprète, tout au long de son déroulement.
III. La vidéo-audience
[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, articles L. 733-1, alinéa 2, R. 733-20, R. 733-22 et R. 733-23]
« Afin d’assurer une bonne administration de la justice et de faciliter la possibilité ouverte aux intéressés de présenter leurs explications à la cour », le président de cette juridiction peut prévoir que la salle d’audience de la cour soit reliée, en direct, par un moyen de communication audiovisuelle qui garantit la confidentialité de la transmission, avec une salle d’audience spécialement aménagée à cet effet, ouverte au public et située « dans des locaux relevant du ministère de la Justice plus aisément accessibles par le demandeur, dans des conditions respectant les droits de l’intéressé ». Le requérant en est préalablement avisé. S’il réside sur le territoire métropolitain, cet avis, adressé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par tout autre moyen permettant de faire la preuve de sa réception, mentionne qu’il a le droit de s’opposer à la mise en œuvre de cette faculté dans un délai de 15 jours à compter de la réception de l’avis.
Une copie de l’intégralité du dossier est mise à la disposition de l’intéressé dans la salle d’audience. S’il est assisté d’un conseil, ce dernier est physiquement présent auprès de lui. Un interprète est mis à sa disposition.
Ces opérations donnent lieu à l’établissement d’un procès-verbal dans chacune des salles d’audience ou à un enregistrement audiovisuel ou sonore. Le requérant qui, séjournant en France métropolitaine, refuse d’être entendu par un moyen de communication audiovisuelle est convoqué, à sa demande, dans les locaux de la cour.
Sauf dans le cas où il est procédé à un enregistrement audiovisuel ou sonore de l’audience, un procès-verbal est rédigé par l’agent chargé du greffe dans chacune des deux salles d’audience (4).
IV. Le déroulement des audiences
[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, articles L. 733-1-1, R. 733-24 et R. 733-25]
Les débats devant la CNDA ont lieu en audience publique, après lecture du rapport par le rapporteur. Toutefois, le huis clos est de droit si le requérant le demande. Le président de la formation de jugement peut également décider que l’audience aura lieu ou se poursuivra hors la présence du public, si les circonstances de l’affaire l’exigent. Il peut également interdire l’accès de la salle d’audience aux mineurs ou à certains d’entre eux.
Le président de la formation de jugement statue sur les demandes de renvoi à une audience ultérieure présentées par les parties. Ces décisions ne sont pas motivées et ne sont pas susceptibles de recours. A noter que l’absence d’une des parties ou de son avocat à l’audience n’oblige pas le président de la formation de jugement à renvoyer l’affaire à une audience ultérieure.
Le rapporteur donne lecture du rapport, « qui analyse, en toute indépendance, l’objet de la demande et les éléments de fait et de droit exposés par les parties, et fait mention des éléments propres à éclairer le débat, sans prendre parti sur le sens de la décision ». Les principaux éléments du rapport sont traduits au requérant, lorsqu’il a besoin de l’assistance d’un interprète.
Après la lecture du rapport, et sauf si le conseil du requérant demande à présenter ses observations, la formation de jugement peut poser aux parties toute question propre à l’éclairer. Le président de la formation de jugement donne la parole au requérant et au représentant de l’office. Les parties peuvent présenter oralement toute observation utile propre à éclairer leurs écritures. La partie qui, moins de sept jours francs avant la clôture de l’instruction écrite, a reçu communication d’un mémoire ou de pièces, ou d’une information extérieure au dossier, peut présenter à l’audience toute observation orale qu’elle estime utile pour répondre à ce mémoire ou à cette information.
D. LES ORDONNANCES
[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, articles L. 733-2 et R. 733-4]
Afin d’accélérer le traitement de certains dossiers, le président de la CNDA et les présidents de section, de chambre ou de formation de jugement peuvent, par ordonnance et après instruction, régler certaines affaires dont la nature ne justifie pas l’intervention d’une formation collégiale. Les ordonnances ne sont pas prononcées en audience publique. Le recours à cette procédure est possible pour :
- donner acte des désistements ;
- rejeter les recours ne relevant pas de la compétence de la cour ;
- constater qu’il n’y a pas lieu de statuer sur un recours ;
- rejeter les recours entachés d’une irrecevabilité manifeste non susceptible d’être couverte en cours d’instance ou qui n’ont pas été régularisés à l’expiration du délai laissé au demandeur pour le faire ;
- rejeter les recours qui ne présentent aucun élément sérieux susceptible de remettre en cause la décision de l’OFPRA. Dans ce cas, l’ordonnance ne peut être prise qu’après que le requérant a été mis en mesure de prendre connaissance des pièces du dossier et après examen de l’affaire par un rapporteur.
L’ordonnance mentionne le nom des parties, l’analyse des conclusions ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. Si elle est prise au motif d’un recours ne présentant aucun élément sérieux, elle vise également les formalités accomplies par le requérant afin de prendre connaissance des pièces du dossier ainsi que l’examen de celui-ci par le rapporteur. L’ordonnance indique la date à laquelle elle a été signée par le magistrat qui l’a rendue.
Si le magistrat fonde sa décision sur un moyen d’office, notamment une clause d’exclusion, il n’a pas à en informer préalablement les parties.
La rectification d’une erreur matérielle
La correction d’une erreur
Lorsque le président de la Cour nationale du droit d’asile constate qu’une décision comporte une erreur ou une omission matérielle qui n’est pas susceptible d’avoir exercé une influence sur le jugement de l’affaire, il peut y apporter « les corrections que la raison commande » par ordonnance rendue dans le délai de un mois à compter de la notification aux parties. La notification de l’ordonnance rectificative rouvre, le cas échéant, le délai de recours en cassation contre la décision corrigée.
Lorsqu’une partie signale au président de la cour l’existence d’une telle erreur ou omission matérielle et lui demande de la corriger, cette demande est sans influence sur le cours du délai de recours en cassation ouvert contre cette décision, sauf si le magistrat prend une ordonnance rectificative (Ceseda, art. R. 733-33).
Le recours en rectification
Lorsqu’une décision de la cour comporte une erreur matérielle susceptible d’avoir exercé une influence sur le jugement de l’affaire, la partie intéressée peut saisir la cour d’un recours en rectification, dans un délai de un mois à compter du jour de la notification de la décision concernée, délai augmenté de un mois pour les requérants qui demeurent outre-mer (Ceseda, art. R. 733-37).
L’avis de la CNDA
Les réfugiés faisant l’objet d’une sanction pénale pour entrée ou séjour irréguliers, d’une décision d’expulsion ou de refoulement, sanctions prévues aux articles 31, 32 et 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, peuvent former un recours pour avis devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). Ces recours sont suspensifs. L’avis rendu par la cour est transmis aux ministres concernés.
Le recours est exercé dans le délai de une semaine, selon les mêmes modalités que le recours contre une décision de l’OFPRA (arrêté du 18 février 2016). La demande mentionne les nom, prénoms, date et lieu de naissance, nationalité et domicile du réfugié. Ce dernier expose les circonstances de fait et de droit qui s’opposent, selon lui, à l’exécution de la mesure dont il fait l’objet. Est jointe une copie de la mesure contestée et une copie de la décision par laquelle l’OFPRA l’a placé sous sa protection.
Cette demande est immédiatement communiquée au ministre de l’Intérieur et au ministre chargé de l’asile, qui ont une semaine pour produire leurs observations. Dès leur réception, elles sont communiquées, par tout moyen, à l’intéressé. Celui-ci est convoqué devant une formation collégiale, dans le délai maximal de 20 jours à compter de la réception de sa demande. La formation collégiale formule un avis motivé sur le maintien ou l’annulation de la mesure. Cet avis est transmis sans délai au ministre de l’intérieur et au ministre chargé de l’asile.
Le président de la cour et les présidents qu’il désigne peuvent rejeter une demande manifestement insusceptible d’être examinée.
[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, articles L. 731-3 et R. 733-38 à R. 733-41 ; arrêté du 18 février 2016, NOR : JUSE1600694A, JO du 24-02-16]
(1)
Des dispositions spécifiques sont prévues lorsque les avocats sont inscrits dans un dispositif permettant la communication par voie électronique des actes de procédure (Ceseda, article R. 733-12). Il s’agit de l’application « CNDém@t ». Les modalités de son fonctionnement sont précisées par l’arrêté du 18 février 2016 (arrêté du 18 février 2016, NOR : JUSE1600694A, JO du 24-02-16).
(2)
Par exemple parce que le dossier a déjà été renvoyé à l’issue d’une précédente audience ou parce qu’il s’agit d’un dossier urgent (Source : www.cnda.fr/demarches-et-procedures).
(3)
Cette information de l’avocat a lieu sans délai lorsqu’il a été désigné après la convocation adressée au requérant.
(4)
Son contenu est fixé à l’article R. 733-23 du Ceseda.