[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, article L. 711-1]
Selon l’article L. 711-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, la qualité de réfugié peut être reconnue sur trois fondements. Les personnes concernées sont régies par les dispositions applicables aux réfugiés en vertu de la Convention de Genève.
A. LA CONVENTION DE GENÈVE
La qualité de réfugié est reconnue à toute personne entrant dans la définition de l’article 1er de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, complétée par le Protocole de New York du 31 janvier 1967. La France est signataire de la convention, et a déposé les instruments de ratification au secrétariat général des Nations unies le 23 juin 1954 (1). Elle a adhéré au Protocole de New York le 3 février 1971 (2).
Selon l’article 1er A 2 de la convention, le terme « réfugié » s’applique à toute personne « qui, [...] craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner » (3).
Si une personne a plus d’une nationalité, il est précisé que l’expression « du pays dont elle a la nationalité » vise chacun des pays dont cette personne a la nationalité. Ne sera pas considérée comme privée de la protection du pays dont elle a la nationalité toute personne qui, sans raison valable fondée sur une crainte justifiée, ne s’est pas réclamée de la protection de l’un des pays dont elle a la nationalité.
Plusieurs conditions doivent ainsi être réunies pour que la qualité de réfugié soit octroyée :
- des craintes de persécution doivent exister. Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), les mots « craignant avec raison d’être persécutée » sont les mots clés de la définition. « La notion de crainte étant subjective, la définition implique la présence d’un élément subjectif chez la personne qui demande à être considérée comme réfugiée. La détermination de la qualité de réfugié consistera donc plus en une évaluation des déclarations de l’intéressé qu’en un jugement porté sur la situation existant dans son pays d’origine ». Lorsque les circonstances de fait n’éclairent pas suffisamment la situation, il faut tenir compte, « afin d’établir la crédibilité des déclarations faites », des antécédents personnels et familiaux du demandeur, de son appartenance à tel ou tel groupe racial, religieux, national, social ou politique, de sa propre interprétation de sa situation et de son expérience personnelle, « en d’autres termes de tout ce qui peut indiquer que le motif essentiel de sa demande est la crainte [...]. En général, la crainte exprimée doit être considérée comme fondée si le demandeur peut établir, dans une mesure raisonnable, que la vie est devenue intolérable pour lui dans son pays d’origine pour les raisons indiquées dans la définition ou qu’elle le serait, pour les mêmes raisons, s’il y retournait ». Il n’est pas nécessaire que les arguments invoqués se fondent sur l’expérience personnelle du demandeur. La personne qui réclame le statut de réfugié doit établir elle-même qu’elle craint avec raison d’être persécutée (4) ;
- les motifs de ces craintes de persécution doivent être liés à la race, la religion, la nationalité, l’appartenance à un certain groupe social ou les opinions politiques ; les motifs notamment d’ordre personnel ne peuvent être pris en compte ;
- en raison de ces craintes :
- la personne se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et elle ne peut ou ne veut se réclamer de la protection des autorités de ce pays,
- ou la personne se trouve hors du pays dans lequel elle a sa résidence habituelle (cas des personnes apatrides, cf. infra, section 4) et elle ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner. « Tous les apatrides ne sont pas des réfugiés. Pour être réfugiés, ils doivent se trouver hors du pays dans lequel ils avaient leur résidence habituelle, pour les raisons indiquées dans la définition. Lorsque ces raisons n’existent pas, l’apatride n’est pas un réfugié » (guide du HCR, préc.).
B. LE MANDAT DU HCR
La qualité de réfugié est reconnue « à toute personne sur laquelle le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) exerce son mandat aux termes des articles 6 et 7 de son statut tel qu’adopté par l’Assemblée générale des Nations unies le 14 décembre 1950 » (Ceseda, art. L. 711-1). Ce cas de figure vise celui de pays n’ayant pas d’organe de reconnaissance du statut de réfugié, soit parce que le pays n’a pas ratifié la Convention de Genève, soit parce qu’il n’a pas mis en place de procédure. Les situations visées par les articles 6 et 7 sont calquées sur celles prévues par la Convention de Genève (cf. supra, A).
La personne sous mandat du HCR obtient le statut de réfugié en France après que l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a vérifié auprès du HCR le mandat présenté. Selon la Commission des recours des réfugiés (aujourd’hui Cour nationale du droit d’asile), « les dispositions [...] de l’article 2 de la loi du 25 juillet 1952 [codifiées à l’article L. 711-1] relatives aux personnes sur lesquelles le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés exerce son mandat imposent que la qualité de réfugié [...] soit reconnue » (5).
Si la personne sous mandat du HCR s’est vu reconnaître la qualité de réfugié dans un autre Etat, et demande l’asile en France parce que sa protection n’est plus effectivement assurée sur le territoire de l’Etat qui lui a reconnu le statut de réfugié, elle doit être regardée comme sollicitant pour la première fois la reconnaissance du statut de réfugié (6).
C. L’ACTION EN FAVEUR DE LA LIBERTÉ
[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, article L. 711-1]
La qualité de réfugié est reconnue à toute personne persécutée en raison de son action en faveur de la liberté. Ce motif d’octroi de la protection internationale, encore appelé « asile constitutionnel », a été introduit par la loi du 11 mai 1998 relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d’asile (7). Il reprend l’alinéa 4 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 selon lequel « tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d’asile sur les territoires de la République ».
La personne doit établir les persécutions subies. Celles-ci doivent être liées à une « action » en faveur de la liberté (défense des libertés au sein d’un mouvement associatif, participation à des manifestations suivies d’arrestations et/ou de menaces, dénonciation d’actes par un journaliste...) (8).
(1)
Décret n° 54-1055 du 14 octobre 1954, JO du 29-10-54.
(2)
Décret n° 71-289 du 9 avril 1971, JO du 18-4-71.
(3)
L’article 1er A 1 de la convention vise le cas de personnes considérées comme réfugiées en application de conventions antérieures à la Convention de Genève, et qui ne sont plus appliquées aujourd’hui.
(4)
« Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié au regard de la convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés », HCR, janvier 1992, disponible sur le site www.unhcr.fr
(5)
CRR, 5 juin 2000, n° 345064.
(6)
Conseil d’Etat, Assemblée, 13 novembre 2013, n° 349735, consultable sur www.legifrance.gouv.fr
(7)
Loi n° 98-349 du 11 mai 1998, JO du 12-5-98. Si la loi de 1998 a reconnu ce motif d’octroi de la protection internationale au niveau législatif, le Conseil constitutionnel avait consacré ce droit dès 1993. « Considérant que le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 auquel renvoie le préambule de la Constitution de 1958 dispose par son quatrième alinéa : “Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d’asile sur les territoires de la République” ; que si certaines garanties attachées à ce droit ont été prévues par des conventions internationales introduites en droit interne, il incombe au législateur d’assurer en toutes circonstances l’ensemble des garanties légales que comporte cette exigence constitutionnelle » (Cons. const., n° 93-325 DC du 13 août 1993, JO du 18-08-93).
(8)
« Trente ans de jurisprudence de la Cour nationale du droit d’asile et du Conseil d’Etat sur l’asile », mars 2012, p. 46 et s., www.cnda.fr