Pour réfléchir à la place de la médiation familiale dans le cadre de situations de violences, il convient d’abord de la définir et de rappeler son cadre d’intervention.
A. SA DÉFINITION
Il n’existe pas de définition juridique de la médiation familiale. Mais le Conseil national consultatif de la médiation familiale (CNCMF), aujourd’hui disparu, a élaboré en 2004 une définition qui demeure la référence et a énoncé les grands principes qui doivent guider toute médiation de ce type (1).
Ainsi, la médiation familiale constitue « un processus de construction ou de reconstruction du lien familial axé sur l’autonomie et la responsabilité des personnes concernées par des situations de rupture ou de séparation dans lequel un tiers impartial, indépendant, qualifié et sans pouvoir de décision, le médiateur familial, favorise, à travers l’organisation d’entretiens confidentiels, leur communication, la gestion de leur conflit dans le domaine familial entendu dans sa diversité et dans son évolution ».
De cette définition, il découle plusieurs éléments :
- la médiation familiale est une démarche volontaire ;
- elle implique :
- des adultes responsables et autonomes concernés par des situations de rupture ou de séparations,
- un tiers impartial, indépendant et qualifié, sans pouvoir de décision, le médiateur familial, tenu à la confidentialité ;
- l’objectif est de construire ou reconstruire le lien familial.
Le Conseil national consultatif de la médiation familiale explique également que ce processus vise à :
- restaurer la communication ;
- préserver, reconstruire les liens entre les membres de la famille et prévenir les conséquences d’une éventuelle dissociation du groupe familial ;
- donner les moyens aux personnes de chercher par elles-mêmes, dans le respect de leurs droits et obligations respectifs, des issues à leur situation, qu’elle relève ou non du champ judiciaire.
Dès lors, le médiateur ne tranche pas ; il laisse les personnes élaborer elles-mêmes leurs solutions et leurs accords. Il doit toutefois s’assurer que l’accord éventuellement conclu reflète réellement la volonté des personnes dans le respect des règles d’ordre public.
B. LES PRINCIPES GUIDANT LA MÉDIATION FAMILIALE
La médiation familiale repose sur un certain nombre de principes – un cadre déontologique – défini par l’ex-Conseil national consultatif de la médiation familiale. Selon lui, « afin d’assurer le respect du droit des personnes, le processus de médiation doit impérativement présenter un caractère volontaire, confidentiel et librement consenti » (2).
Et le médiateur familial se doit de contribuer à créer un espace relationnel d’écoute et de dialogue à l’abri de toute forme de contrainte physique ou morale.
I. La garantie du consentement
La médiation familiale ne peut s’organiser qu’avec le consentement personnel et direct des intéressés afin de favoriser leur responsabilisation. Ce consentement doit être libre et éclairé.
Pour ce faire, le médiateur familial doit, selon le CNCMF :
- donner une information claire et complète sur les principes déontologiques et les modalités de la médiation familiale ;
- s’assurer que les informations données ont été bien comprises ;
- informer les personnes de la possibilité qu’elles ont de consulter à tout moment tout professionnel ou service de leur choix pour connaître leurs droits ;
- recueillir de manière individuelle le consentement des personnes sur le principe et les modalités de la médiation familiale ;
- être particulièrement attentif aux situations d’emprise et de violences conjugales ou familiales susceptibles d’altérer le consentement de l’une ou de l’autre partie.
Si ces différentes conditions ne sont pas réunies, le médiateur familial doit refuser la médiation, explique le CNCMF.
II. La confidentialité
Seconde condition d’ordre déontologique : la confidentialité des entretiens. Ainsi, sous réserve des éventuelles dispositions de la loi, le médiateur familial ne peut ni divulguer ni transmettre à quiconque le contenu des entretiens ou toute information recueillie dans le cadre de la médiation.
Ceci vaut également à l’égard des juges qui pourraient être à l’origine de la médiation familiale, sauf éventuel accord des parties. En effet, selon l’article 131-14 du code de procédure civile, « les constatations du médiateur et les déclarations qu’il recueille ne peuvent être ni produites ni invoquées dans la suite de la procédure sans l’accord des parties, ni en tout état de cause dans le cadre d’une autre instance ».
Au terme de la médiation, les accords conclus par les personnes peuvent faire l’objet d’un document écrit et signé par elles seules. Ce document, éventuellement rédigé par le médiateur familial, est à l’usage exclusif des personnes. Il peut être homologué par le juge afin d’avoir force exécutoire (C. proc. civ., art. 131-12).
C. LA MÉDIATION FAMILIALE JUDICIAIRE
Le champ classique de la médiation familiale judiciaire est fixé dans le code civil. Elle peut ainsi être un outil dans le cadre des conflits parentaux et conjugaux.
Actuellement, le code civil prévoit le recours à la médiation familiale dans le cadre des procédures portant sur l’autorité parentale mais également dans celui des dispositions sur le divorce.
I. La médiation familiale parentale
[Code civil, article 373-2-10]
Introduit dans le cadre de la loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale, l’article 373-2-10 du code civil énonce qu’afin « de faciliter la recherche par les parents d’un exercice consensuel de l’autorité parentale, le juge peut leur proposer une mesure de médiation, et après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder ».
Cette mesure concerne uniquement les aspects du contentieux familial touchant aux modalités d’exercice de l’autorité parentale. L’idée est de restaurer le dialogue dans le couple et d’aboutir à un accord qui, négocié et accepté par les deux parents, sera mieux appliqué qu’une décision imposée par le juge.
Afin de respecter la nature même de la médiation, qui suppose l’accord des parties, le juge dispose d’un simple pouvoir de proposition.
Par ailleurs, il peut, toujours selon cette même disposition, enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l’objet et le déroulement de cette mesure.
Ainsi, cette disposition a deux volets :
proposer une mesure de médiation ;
enjoindre de rencontrer un médiateur pour une séance d’information.
II. La médiation familiale conjugale
[Code civil, article 255, 1° et 2°]
Dans le cadre des procédures de divorce, le juge peut notamment :
- « proposer aux époux une mesure de médiation et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial pour y procéder » ;
- ou « enjoindre aux époux de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l’objet et le déroulement de la médiation ».
Ce dispositif prend place en tête dans la liste des mesures provisoires que le juge peut prononcer au cours de la procédure de divorce.
(1)
Conseil national consultatif de la médiation familiale, « Travaux et recommandations », décembre 2004.
(2)
Conseil national consultatif de la médiation familiale, « Travaux et recommandations », décembre 2004, p. 9.