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La procédure applicable

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Si quelques dispositions du code civil apportent des précisions d’ordre procédural, c’est dans les articles 1136-3 et suivants du code de procédure civile que se trouve le cœur des règles applicables à l’ordonnance de protection.


A. LA SAISINE DU JUGE

[Code civil, articles 515-9 et 515-10 ; code de procédure civile, articles 1136-13 et 1136-14]


I. Le juge compétent

[Code civil, article 515-9 ; code de procédure civile, articles 1136-13 et 1136-14]
Le juge aux affaires familiales est, en principe, compétent pour délivrer l’ordonnance de protection.
Toutefois, à compter de l’introduction d’une procédure de divorce ou de séparation de corps ou d’une procédure relative à l’exercice de l’autorité parentale, la demande de mesures de protection ainsi que les demandes modificatives doivent être présentées devant le juge saisi de cette procédure. La demande est formée, instruite et jugée selon les règles applicables à l’ordonnance de protection. Le juge statue par décision séparée.


II. Les personnes habilitées à le saisir

[Code civil, article 515-10]
Le juge peut être saisi :
  • par la personne en danger, le cas échéant assistée par son avocat ;
  • par le ministère public, mais avec l’accord de la victime.
Le rapport parlementaire de la loi du 9 juillet 2010 ayant mis en place l’ordonnance relevait, à l’époque, que « la demande d’ordonnance de protection est indépendante de tout dépôt de plainte préalable ou de toute action civile ou pénale au fond ». « L’une peut être engagée sans les autres, et toutes, ou seulement certaines, peuvent être engagées ensemble (1)»


B. LE DÉPÔT DE LA REQUÊTE OU DU RÉFÉRÉ

Le juge peut être saisi : soit par une requête classique remise ou adressée au greffe, soit par une assignation en référé.


I. Le contenu de la requête

[Code de procédure civile, articles 58 et 1136-3]
Sous peine de nullité, la requête doit être datée et signée et comporter :
  • l’indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur, à savoir la victime ;
  • l’indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée, c’est-à-dire le conjoint violent ou menaçant ;
  • un exposé sommaire des motifs de la demande ;
  • en annexe, les pièces sur lesquelles celle-ci est fondée.
A moins qu’il ne soit l’auteur de la requête, le ministère public est aussitôt avisé par le greffier du dépôt de cette requête.


II. Le contenu de l’assignation en référé

[Code de procédure civile, articles 56, 485 et 1136-4]
Lorsque le juge est saisi par une assignation en référé, qui constitue un acte d’huissier, cette dernière doit comporter, sous peine de nullité :
  • l’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
  • l’objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit ;
  • l’indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s’expose à ce qu’un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire ;
  • l’indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée. Ces pièces sont énumérées sur un bordereau qui lui est annexé ;
  • l’indication de la date d’audience correspondant aux jours et heures habituels des référés.
Cette assignation vaut conclusions.


III. Les spécificités en cas de dissimulation du domicile

[Code de procédure civile, articles 1136-5 et 1136-8]
Par exception aux règles générales, la victime qui sollicite l’autorisation de dissimuler son domicile ou sa résidence est dispensée d’indiquer son adresse dans son acte introductif d’instance, sous réserve de porter cette information à la connaissance de l’avocat qui l’assiste ou la représente ou du procureur de la République du tribunal de grande instance, auprès duquel elle élit domicile. Son acte introductif d’instance doit toutefois mentionner cette élection de domicile.
L’avocat ou le procureur de la République auprès duquel la victime a élu domicile doit communiquer sans délai l’adresse de l’intéressée au juge. Le greffe ainsi que la personne à laquelle l’adresse est communiquée pour les besoins de la procédure ne peuvent la porter à la connaissance du conjoint violent ou menaçant ou de son représentant.
Le cas échéant, les mêmes règles de protection s’appliquent au cours des instances civiles ultérieures.


C. LA CONVOCATION DES PARTIES

[Code civil, article 515-10 ; code de procédure civile, article 1136-3]
Dès la réception de la demande d’ordonnance de protection, le juge convoque :
  • par tous moyens adaptés, pour une audition, la victime et le conjoint violent ou menaçant ainsi que, le cas échéant, leur avocat ;
  • le ministère public. « La présence de ce dernier peut lui permettre d’engager des poursuites contre l’auteur des faits de violence allégués et permet d’assurer une coordination, par une information réciproque, entre la chaîne pénale et la chaîne civile (2)»
En pratique, c’est le greffier qui convoque chaque partie à l’audience. Il peut le faire :
  • par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou bien par la voie administrative (remise en mains propres), en cas de danger grave et imminent pour la sécurité de la personne demandant l’ordonnance de protection ou lorsqu’il n’existe pas d’autre moyen de notification ;
  • verbalement contre émargement s’agissant uniquement de la victime.
En ce qui concerne le ministère public, il est avisé de la date de l’audience par le greffier.
La convocation adressée au conjoint violent ou menaçant vaut citation à comparaître. Elle comprend en annexe une copie de la requête et des pièces qui y sont annexées.


D. LE DÉROULEMENT DE L’AUDIENCE

[Code civil, article 515-10 ; code de procédure civile, article 1136-6]
Au cours de l’audience, les parties ont le droit de se défendre elles-mêmes mais elles peuvent aussi se faire assister ou représenter par un avocat. Le juge s’assure qu’il s’est écoulé un temps suffisant entre la convocation et l’audience pour que le défendeur ait pu préparer sa défense. La procédure est orale et en principe contradictoire.
Le juge peut, à tout moment, par simple mention au dossier, ordonner la comparution personnelle d’une partie, pour l’entendre séparément ou en présence de l’autre partie.
Par souci de discrétion et pour des raisons de sécurité, les auditions peuvent avoir lieu séparément et peuvent également se tenir en chambre du conseil, c’est-à-dire hors la présence du public.


E. LA DÉCISION DU JUGE ET LES VOIES DE RECOURS



I. La délivrance et la notification de l’ordonnance

[Code civil, article 515-11 ; code de procédure civile, articles 1136-8 à 1136-10]
Le juge aux affaires familiales délivre une ordonnance de protection, s’il estime, au vu des éléments produits devant lui et contradictoirement débattus, « qu’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger » auquel la victime ou un ou plusieurs de ses enfants sont exposés.
« Cette vraisemblance se matérialise par la production de certificats médicaux ordinaires ou, de préférence, en provenance d’une unité médico-judiciaire, et de préférence, là encore, à des dates rapprochées. Cette vraisemblance peut également ressortir d’une ou plusieurs plaintes ou mains courantes, mais également de la production d’attestations circonstanciées ou toutes autres pièces probantes (3)»
A titre d’exemples, le magistrat a retenu comme vraisemblables la commission de violences et le danger dans le cas :
  • où plusieurs certificats médicaux ont été produits et où la police est intervenue au domicile des époux à la suite d’une dispute et où les enfants du couple ont évoqué des coups de bâton et de ceinture de la part du père (4) ;
  • où des appels téléphoniques malveillants et réitérés ont été commis, des gifles ont été données par l’auteur qui a reconnu les faits, et des attestations circonstanciées des témoins, corroborées par des pièces médicales et des courriels échangés entre les proches et la victime, ont démontré les nombreuses menaces proférées (5).
En revanche, les faits de violences ont bien été reconnus dans le cas d’une violente dispute dans un couple à la suite d’une infidélité de la concubine, mais la vraisemblance du danger n’a pas été retenue dans la mesure où il s’agissait d’un cas isolé (6).
Parmi les mesures sur lesquelles le juge statue figure la demande de dissimulation du domicile ou de la résidence de la victime. Dans le cas où le magistrat ne fait pas droit à cette demande ou bien si l’exécution d’une décision de justice le nécessite, l’avocat ou le procureur de la République auprès duquel la victime a sollicité ou obtenu l’élection de domicile doit communiquer sans délai l’adresse de cette dernière au défendeur (ou à son avocat) ou, selon le cas, à l’huissier de justice, dès lors qu’ils en font la demande, cette dernière n’ayant pas à être formulée dans des formes particulières.
L’ordonnance est en principe notifiée par voie de signification, c’est-à-dire par huissier de justice. Le juge peut aussi, soit d’office soit à la demande d’une partie, décider qu’elle sera notifiée par le greffe par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou par la voie administrative (remise en mains propres contre récépissé), en cas de danger grave et imminent pour la sécurité de la victime, ou lorsqu’il n’existe pas d’autre moyen de notification (7).
La notification au ministère public est faite, quant à elle, par remise avec émargement ou envoi contre récépissé.
La notification de l’ordonnance prononçant une mesure de protection reproduit les sanctions pénales encourues par le conjoint violent ou menaçant (cf. infra, § 3) et, lorsqu’elle est faite à une personne mariée, rappelle les dispositions relatives à l’introduction en parallèle d’une procédure de divorce ou de séparation figurant à l’article 1136-13 du code de procédure civile.


II. Les voies de recours

[Code de procédure civile, article 1136-11]
Un recours contre l’ordonnance de protection devant la cour d’appel est possible dans les 15 jours suivant sa notification.


III. Les modifications de l’ordonnance

[Code de procédure civile, article 1136-12]
Toute demande de mainlevée ou de modification de l’ordonnance de protection ou de dispense temporaire de certaines de ses obligations ainsi que celle tendant à priver l’ordonnance de ses effets ou à prononcer de nouvelles mesures sont formées, instruites et jugées dans les mêmes conditions que la requête initiale, telles que présentées ci-dessus. Par exception, lorsqu’un appel a été formé à l’encontre de l’ordonnance de protection, la demande est effectuée par requête remise ou adressée au greffe de la cour d’appel. Le premier président de la cour d’appel, le conseiller de la mise en état ou la formation de jugement, selon le cas, statue alors sur celle-ci.


(1)
Rap. Sén. n° 564, Pillet, juin 2010, p. 31.


(2)
Rap. Sén. n° 564, Pillet, juin 2010, p. 31.


(3)
Sannier A., « L’ordonnance de protection : un dispositif d’urgence désormais renforcé », Gazette du Palais, n° 322 du 18-11-14, p. 4.


(4)
Limoges, 14 mars 2011, n° 10/01718.


(5)
Rennes, 27 janvier 2015, n° 14/07369.


(6)
Limoges, 3 février 2014, n° 13/01425.


(7)
L’autorité administrative, requise par le greffier pour notifier par la voie administrative les convocation et ordonnance, y procède par remise contre récépissé. Elle informe, dans les meilleurs délais, le greffier des diligences faites et lui adresse le récépissé.

SECTION 1 - L’ORDONNANCE DE PROTECTION

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