Recevoir la newsletter

La délivrance et le renouvellement du titre de séjour

Article réservé aux abonnés

Le droit au séjour est facilité en cas de délivrance ou de renouvellement du titre de séjour.


A. DANS LE CADRE GÉNÉRAL



I. Délivrance du premier titre de séjour « vie privée et familiale »

[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, articles L. 313-12 et L. 431-2 ; instruction du 9 septembre 2011, NOR : IOCL1124524C]
En cas de violences commises après l’arrivée en France du conjoint étranger d’un Français mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale ».
Ceci vaut pour les conjoints de Français mais également pour les personnes étrangères arrivées en France dans le cadre d’un regroupement familial.
Dans cette circonstance, le préfet est tenu de délivrer le titre de séjour.


II. Le renouvellement et le retrait du titre de séjour « vie privée et familiale »

[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, articles L. 313-11, L. 313-12 et L. 431-2 ; instruction du 9 septembre 2011, NOR : IOCL1124524C]
Selon l’article L. 313-11, 1° et 4°, les ressortissants étrangers mariés séjournant régulièrement en France et dont le droit au séjour est lié au statut de leur conjoint, que ce soit en tant que conjoint de Français ou en tant que bénéficiaire du regroupement familial, bénéficient d’une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale ».
A l’échéance de ce titre, les intéressés peuvent obtenir son renouvellement lorsqu’ils ont subi des violences conjugales de la part de leur conjoint et que la communauté de vie a été rompue. L’autorité administrative peut accorder le renouvellement du titre de séjour, sans que cela ne soit une obligation.
Depuis la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, peu importe que la rupture de la vie commune soit le fait de la victime ou de l’auteur des violences. La rédaction de l’article L. 313-12, antérieure à la loi du 4 août 2014, avait fait l’objet d’une interprétation restrictive de la cour administrative d’appel de Versailles dans une décision du 23 novembre 2010 (1), qui avait jugé que cette disposition ne s’appliquait que lorsque la rupture de la vie commune était le fait de la victime, et non l’inverse.
Néanmoins, le préfet conserve un pouvoir d’appréciation. Ainsi, selon l’instruction du 9 septembre 2011, il doit « examiner l’ensemble de la situation personnelle de l’étranger concerné et les éléments justificatifs des violences invoquées (dépôt de plainte, jugement de divorce, condamnation du conjoint pour ce motif, ou la justification par tous moyens, témoignages, attestations médicales...). Un arrêt du Conseil d’Etat du 26 septembre 2014 souligne que le préfet doit également apprécier « si la situation de l’intéressé justifie le renouvellement du titre à la date où il se prononce, en tenant compte, notamment, du délai qui s’est écoulé depuis la cessation de la vie commune et des conséquences qui peuvent encore résulter, à cette date, des violences subies » (2). Ainsi, « la fin de ces violences par le terme mis à la communauté de vie ne fait pas disparaître le droit au séjour, mais celui-ci dépend néanmoins de la persistance des séquelles de ces exactions » (3). En outre, cette décision rappelle que « la possibilité de renouvellement n’est pas limitée au premier renouvellement » (4).
Une décision du Défenseur des droits réclame le renouvellement de droit du titre de séjour, même en l’absence d’ordonnance de protection, « pour éviter que des personnes victimes de violences hésitent à se séparer, de peur de perdre leur droit au séjour » (5).
En revanche, l’autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l’étranger dans ce contexte.


(A noter)

Selon le Conseil constitutionnel, interrogé dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), le fait que l’article L. 313-12 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ne s’applique qu’aux conjoints mariés – et non aux personnes liées par un pacte civil de solidarité (PACS) ou vivant en concubinage – est conforme à la Constitution (6).


III. L’octroi de la carte de résident

[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, article L. 316-4 ; code pénal, article 132-80]
Une carte de résident peut être octroyée à la personne de nationalité étrangère victime de violences conjugales de la part de son conjoint, concubin ou partenaire, sous réserve qu’elle ait porté plainte contre lui ou témoigné dans le cadre de la procédure pénale engagée à son encontre.
En cas de condamnation définitive de cet agresseur, le refus de délivrer la carte ne peut être motivé par la rupture de la vie commune.


IV. Un visa de retour

[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, article L. 211-2-2]
Depuis la loi du 9 juillet 2010, les autorités consulaires françaises doivent délivrer un visa de retour aux personnes de nationalité étrangère bénéficiant d’un titre de séjour en France et dont le conjoint a, lors d’un séjour à l’étranger, dérobé les documents d’identité et le titre de séjour. Il s’agit de contrer les situations dans lesquelles la victime serait dans l’impossibilité de rentrer en France et où son conjoint en profiterait pour engager une procédure de divorce dans son pays d’origine, car les dispositions réglant le divorce y sont moins favorables aux femmes qu’en France.


B. DANS LE CADRE D’UNE ORDONNANCE DE PROTECTION

Depuis la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de celles-ci sur les enfants, qui a introduit la procédure de l’ordonnance de protection prononcée par le juge aux affaires familiales, le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile a été modifié pour protéger les victimes étrangères, qu’elles soient en situation régulière ou irrégulière, mariées, liées par un pacte civil de solidarité ou vivant en concubinage.


I. La délivrance d’un titre de séjour

[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, article L. 316-3, alinéa 1 ; instruction du 9 septembre 2011, NOR : IOCL1124524C]
Lorsque la victime étrangère bénéficie d’une ordonnance de protection en raison des violences commises par son conjoint, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin, l’autorité administrative doit lui délivrer « dans les plus brefs délais » une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale ». Il s’agit donc d’une obligation. Une limite toutefois : la présence de la victime étrangère ne doit pas constituer une « menace à l’ordre public ».
Ceci vaut tant pour les étrangers en situation régulière que pour ceux en situation irrégulière. En effet, la condition prévue à l’article L. 311-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile n’est pas exigée. Ils n’ont donc pas à prouver qu’ils sont entrés régulièrement sur le territoire français par la production d’un visa d’une durée supérieure à trois mois.
L’instruction du 9 septembre 2011 explique cette délivrance de plein droit sans marge d’appréciation du préfet par l’existence d’un acte formel de l’autorité judiciaire (l’ordonnance de protection).


II. Le renouvellement du titre de séjour

[Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, article L. 316-3, alinéa 2]
De la même façon, le titre de séjour arrivé à expiration de l’étranger qui bénéficie d’une ordonnance de protection en vertu de l’article 515-9 du code civil, en raison des violences commises par son conjoint, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin, est renouvelé de plein droit, sauf menace à l’ordre public.


III. L’accès à l’aide juridictionnelle

[Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, article 3]
En principe, sont admises au bénéfice de l’aide juridictionnelle :
  • les personnes physiques de nationalité française et les ressortissants des Etats membres de l’Union européenne ;
  • les personnes de nationalité étrangère résidant habituellement et régulièrement en France.
Par exception, l’article 3 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique prévoit que les étrangers peuvent en bénéficier sans condition de résidence dans certaines situations. C’est le cas notamment des étrangers bénéficiant d’une ordonnance de protection.
En pratique, cette disposition ne concerne que les étrangers en situation irrégulière qui ne sont pas couverts par le principe général d’octroi de l’aide juridictionnelle.


C. L’ARTICULATION DE CES DEUX DISPOSITIFS

[Instruction du 9 septembre 2011, NOR : IOCL1124524C]
Le régime applicable aux personnes bénéficiant d’une ordonnance de protection ne se substitue pas au régime général applicable aux personnes étrangères victimes de violences conjugales.
L’administration souligne donc que les autorités préfectorales ne peuvent exiger systématiquement la production d’une ordonnance de protection pour instruire une demande de renouvellement ou de délivrance d’une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » déposée dans le contexte d’une rupture de la communauté de vie en raison de violences conjugales.
Au moment du dépôt d’une demande de délivrance ou de renouvellement d’une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » faite dans le contexte d’une rupture de la communauté de vie pour violences conjugales, les autorités compétentes doivent donc vérifier, auprès de la personne considérée, si elle est ou non bénéficiaire d’une ordonnance de protection, afin de déterminer la nature du régime qui lui est applicable :
  • l’existence d’une ordonnance de protection impose la délivrance ou le renouvellement, dans les plus brefs délais, de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » ;
  • l’absence d’une ordonnance de protection conduit à instruire la demande en appréciant l’ensemble des éléments produits à l’appui du dossier qui sont de nature à justifier la revendication d’un droit au séjour autonome.
« Il s’agit, d’une part, de lutter contre tout recours abusif à ce dispositif, mais aussi, d’autre part, de faire pleinement bénéficier les ressortissants étrangers victimes de violences conjugales des droits auxquels ils peuvent prétendre. »


D. LA SITUATION DES RESSORTISSANTS ALGÉRIENS

[Instruction du 9 septembre 2011, NOR : IOCL1124524C]
Le droit au séjour des ressortissants algériens est régi par l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l’emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles. Ils ne bénéficient donc pas des dispositifs précédents.
Toutefois, selon l’instruction du 9 septembre 2011 et conformément à une jurisprudence du Conseil d’Etat (7), les préfets peuvent « dans l’exercice de [leur] pouvoir discrétionnaire, tenir compte, parmi d’autres éléments, de la circonstance de violences conjugales, attestée par tout moyen, en particulier par ordonnance de protection, pour décider du droit au séjour d’un ressortissant algérien ».


(1)
Cour administrative d’appel de Versailles, 23 novembre 2010, requête n° 09VE01399.


(2)
Conseil d’Etat, 26 septembre 2014, n° 366041.


(3)
Erstein L., « Le droit au séjour de la victime de violences conjugales », La semaine juridique, Edition générale, n° 42 du 13-10-14, p. 1846.


(4)
Marti G., « Titre de séjour de la victime de violences conjugales : le renouvellement est une simple faculté, non un droit », La Semaine juridique, Administrations et collectivités territoriales, n° 23 du 8-06-15, p. 34.


(5)
Décision n° 2014-071 du 9 avril 2014, disponible sur www.defenseurdesdroits.fr


(6)
Décision n° 2013-358 QPC du 29 novembre 2013, JO du 1-12-13.


(7)
Avis du Conseil d’Etat du 22 mars 2010 n° 333679, NOR : CETX1009168V, JO du 9-04-10.

SECTION 4 - LA SITUATION PARTICULIÈRE DES FEMMES ÉTRANGÈRES

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur