L’accès à la procédure de rétablissement personnel est réservé aux débiteurs dont la situation est irrémédiablement compromise. Cette situation se caractérise par l’impossibilité manifeste de mettre en œuvre les autres mesures de traitement du surendettement (plan conventionnel, mesures imposées ou recommandées). En d’autres termes, la situation du débiteur est trop dégradée pour que l’application de mesures ordinaires permette de redresser sa situation financière.
Le débiteur peut être orienté vers le rétablissement personnel à deux stades de la procédure.
A. L’ORIENTATION LORS DE L’INSTRUCTION DU DOSSIER
[Code de la consommation, article L. 330-1 ; circulaire du 19 décembre 2011, NOR : JUSC1133274C]
Le caractère irrémédiablement compromis de la situation du débiteur peut être constaté par la commission lors de l’instruction du dossier. Dans ce cas, et selon la gravité de la situation d’endettement, la commission est face à une alternative.
Elle peut soit recommander un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, soit saisir, avec l’accord du débiteur, le juge d’instance en vue de l’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire. A cet égard, la circulaire du 19 décembre 2011 précise que le choix de procéder à un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ou à un rétablissement personnel avec liquidation judiciaire ne constitue pas, au sens de la loi, une décision d’orientation.
B. LA RÉORIENTATION DU DOSSIER EN COURS D’EXÉCUTION DES MESURES DE TRAITEMENT
[Code de la consommation, articles L. 331-7-3 et R. 333-3 ; circulaire du 19 décembre 2011, NOR : JUSC1133274C]
Il peut arriver que la situation du débiteur se dégrade en cours d’exécution d’un plan conventionnel ou de mesures de traitement ordinaires. Si elle devient « irrémédiablement compromise » au sens du troisième alinéa de l’article L. 330-1, le débiteur peut saisir la commission afin de bénéficier d’une procédure de rétablissement personnel.
I. La saisine de la commission
La commission est saisie par lettre simple signée du débiteur et adressée ou remise à son secrétariat. Cette lettre précise les nom, prénoms et adresse du débiteur ainsi que sa situation familiale. Elle détaille ses revenus, son patrimoine et expose les circonstances dans lesquelles sa situation s’est dégradée au point de devenir irrémédiablement compromise.
II. La décision de la commission
a. En cas de situation irrémédiablement compromise du débiteur
La commission se prononce par une décision motivée qui indique si le débiteur est de bonne foi (1) et en situation irrémédiablement compromise.
Cette décision est notifiée aux parties par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La lettre précise qu’un recours motivé (2) peut être formé dans les 15 jours de la notification de la décision d’orientation vers une procédure de rétablissement personnel. Selon l’état patrimonial du débiteur, la commission peut recommander un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ou saisir le juge d’instance d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire (C. consom., art. L. 331-7-3).
b. En l’absence de situation irrémédiablement compromise du débiteur
Si la commission ne fait pas droit à la demande de réorientation, elle en informe le débiteur et lui précise que le plan conventionnel ou les mesures ordinaires en cours d’exécution se poursuivent (C. consom., art. R. 333-3, in fine) (3).
III. Les conséquences de la décision de la commission
[Circulaire du 19 décembre 2011, NOR : JUSC1133274C]
Quelle que soit l’orientation choisie (rétablissement personnel avec ou sans liquidation judiciaire), la décision de la commission a pour effet de suspendre et d’interdire les procédures d’exécution à l’encontre des biens du débiteur et les cessions de rémunération consenties pour des dettes non alimentaires.
La commission peut aussi demander au juge de suspendre les mesures d’expulsion du logement qui seraient diligentées contre le débiteur.
Ces mesures de protection (suspension et interdiction) durent jusqu’à l’homologation par le juge de la recommandation de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ou jusqu’au jugement prononçant l’ouverture de la procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire. La durée de ces mesures de protection ne peut cependant dépasser deux ans.
Afin d’assurer la pleine effectivité de la suspension des poursuites, la recommandation en vue d’un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ou la saisine du juge du tribunal d’instance aux fins d’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire est notifiée aux agents chargés de l’exécution et au greffier en chef du tribunal d’instance chargé de la procédure de saisie des rémunérations ou de la cession des rémunérations (4).
La décision de la commission peut faire l’objet d’un recours formé par le débiteur ou les créanciers, dans un délai de 15 jours à compter de sa notification, par déclaration remise ou adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au secrétariat de la commission. En cas de recours, le greffe convoque le débiteur et les créanciers à l’audience ou leur demande de produire leurs observations, en joignant une copie du recours (C. consom., art. R. 331-9-2).
Le juge statue par jugement immédiatement exécutoire et en dernier ressort. Il peut soit estimer que le débiteur ne se trouve pas en situation irrémédiablement compromise, soit qu’il s’y trouve et en ce cas renvoyer le dossier à la commission pour poursuite de la procédure. Dans ce dernier cas, le jugement n’est pas susceptible de pourvoi en cassation, puisqu’il ne met pas fin à l’instance.
(A noter)
Pour les trois départements d’Alsace-Moselle, il existe une procédure de faillite civile dérivée des procédures commerciales dont les effets sont semblables à ceux de la procédure de rétablissement personnel (cf. annexe 2, p. 67).
L’orientation en cours de procédure
Dès lors que la situation du débiteur est susceptible d’évoluer durant la procédure et que des éléments nouveaux justifiant un réexamen de sa situation peuvent apparaître, l’orientation qui est donnée au dossier au début de la procédure peut être ultérieurement modifiée. Il en est de même dans le cadre d’une procédure de rétablissement personnel, si le juge estime que l’orientation donnée par la commission n’est pas adaptée.
EN COURS D’EXÉCUTION DES MESURES ORDINAIRES
Il se peut que, la situation du débiteur s’aggravant en cours d’exécution des mesures de redressement (plan conventionnel, mesures imposées ou recommandées), elle devienne irrémédiablement compromise. Dans ce cas, le débiteur peut saisir la commission d’une procédure de rétablissement personnel afin de mettre en place une procédure allégée (C. consom., art. L. 331-7-3).
Ainsi, la commission constate la bonne foi du demandeur et déclenche une procédure judiciaire de rétablissement personnel, soit par recommandation d’un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, soit par saisine du juge aux fins d’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire.
DANS LE CADRE D’UNE PROCÉDURE DE RÉTABLISSEMENT PERSONNEL
A titre exceptionnel, s’il estime que la liquidation judiciaire dont il est saisi peut être évitée, le juge établit, le cas échéant sur proposition du mandataire, un plan qui comporte les mesures ordinaires de traitement (mesures imposées ou recommandées (C. consom., art. L. 332-10).
De même, s’il estime que la situation du débiteur n’est pas irrémédiablement compromise, le juge peut, à tout instant de la procédure de rétablissement personnel, renvoyer le dossier à la commission (C. consom., art. L. 332-12).
(1)
Le débiteur est présumé de bonne foi. « Ni le non-respect du protocole d’accord d’apurement de la dette locative, ni l’échec du plan conventionnel de redressement ne traduisent la volonté délibérée de la débitrice de se soustraire à ses obligations » : Versailles, 3 février 2011, n° 10/06742, CCC 2011, n° 179.
(2)
Ce recours prend la forme d’une déclaration remise ou adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au secrétariat de la commission.
(3)
Le plan ou les recommandations dont l’exécution a été interrompue ne sont donc plus caducs, contrairement à ce que prévoyait l’ancien article L. 331-7-2 en partie repris par l’actuel article L. 331-7-3 du code de la consommation.
(4)
Le greffier en chef informera ensuite le tiers saisi ou le cessionnaire de la suspension des mesures d’exécution (C. consom., art. R. 333-3).