La loi s’applique aux particuliers domiciliés dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, lorsqu’ils sont de bonne foi et en état d’insolvabilité notoire. Trois conditions de fond doivent donc être remplies.
A. ÊTRE DOMICILIÉ EN ALSACE-MOSELLE
[Code de commerce, article L. 670-1]
Le débiteur doit être domicilié dans l’un des départements de la Moselle, du Bas-Rhin ou du Haut-Rhin. Il doit cependant s’agir de son domicile véritable (1), soit du lieu où « il a son principal établissement » (C. civ., art. 102). En vertu du préambule du règlement CE n° 1346/2000 du 29 mai 2000 relatif aux procédures d’insolvabilité, le domicile est considéré comme le lieu où le débiteur gère habituellement ses intérêts (2).
La cour d’appel de Colmar a jugé que « pour une personne physique, ce lieu se trouve normalement être le domicile où la personne manifeste une intention réelle de s’établir et fixe de façon ouverte le centre de ses intérêts » (3). Les tribunaux s’attachent à vérifier la réalité de ce domicile en exigeant la production de justificatifs tels que factures et avis d’imposition.
Dans la mesure où un débiteur, domicilié en Alsace-Moselle, posséderait des biens meubles ou immeubles localisés hors de ces trois départements, ceux-ci pourraient être vendus en cas de liquidation judiciaire, en exécution de la règle de l’unicité du patrimoine.
B. ÊTRE DE BONNE FOI
[Code de commerce, article L. 670-1]
Afin de moraliser la procédure, de la rapprocher du traitement du surendettement organisé par le code de la consommation et de légaliser les pratiques judiciaires, la loi du 1er août 2003 a ajouté la bonne foi aux conditions d’ouverture de la procédure (4). Ainsi, un débiteur en état d’insolvabilité notoire qui aurait organisé son insolvabilité pourrait voir sa demande d’ouverture d’une procédure de faillite civile rejetée.
La bonne foi est présumée (C. civ., art. 2274). Il n’appartient donc pas au débiteur d’en apporter la preuve (5).
C. ÊTRE EN SITUATION D’INSOLVABILITÉ NOTOIRE
L’article L. 670-1 du code de commerce dispose que, pour être éligible à la procédure, le demandeur doit être en « état d’insolvabilité notoire ». Aucune définition légale de l’insolvabilité notoire n’existe.
Cette notion est distincte de l’état de « cessation des paiements » applicable en matière commerciale. Si la cessation des paiements peut être définie comme l’impossibilité pour un débiteur commerçant d’apurer le passif exigible avec l’actif disponible, l’insolvabilité notoire est, quant à elle, caractérisée par une situation financière durablement compromise (6).
Il y a insolvabilité notoire « lorsque des faits et des circonstances extérieurs, notamment des mesures d’exécution demeurées infructueuses, sont de nature à accréditer l’opinion que cette insolvabilité existe et révèle non seulement un arrêt matériel des paiements et une insuffisance d’actif, mais une situation durablement compromise résultant de l’absence de ressources ou de biens permettant d’apurer tout ou partie du passif, et ne pouvant trouver une autre issue [...] » (7).
(1)
Les tribunaux de grande instance et les deux cours d’appel de Metz et de Colmar constatent l’irrecevabilité de la procédure dans l’hypothèse d’une domiciliation fictive : Colmar, 2 octobre 2001 et 15 juin 2005.
(2)
JOCE L160/1 du 30-06-00. Aux termes de son article 3, seules « les juridictions de l’Etat membre sur lequel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir une procédure d’insolvabilité ».
(3)
Colmar, ch. civ. 1re, 20 juin 2006.
(4)
Code de commerce, ancien article L. 628-1 devenu l’article L. 670-1.
(5)
Cass. civ. 2e, 2 juillet 2009, n° 08-17355. La mauvaise foi ne peut être soulevée d’office par le juge.
(6)
Cass. com., 26 novembre 1990, n° 89-13709.
(7)
Colmar, 1re ch. civ., 2 novembre 1999, RG 1A 99-02547. Ici, contrairement aux procédures de surendettement (cf. supra, chapitre 1, section 1), la nature des dettes à l’origine de l’insolvabilité est indifférente (dettes professionnelles ou non, civiles, commerciales, fiscales, amendes pénales...).