Le mécanisme régissant le secret professionnel a toujours été soumis à un principe et à des exceptions. Les professionnels sont astreints à une obligation de silence (C. pén., art. 226-13) (cf. supra, chapitre 1, section 2), mais dans certaines circonstances, ils peuvent être déliés de cette obligation. Ils peuvent alors parler sans risquer de voir leur responsabilité pénale engagée (C. pén., art. 226-14).
En 1994, lors de l’élaboration du nouveau code pénal, le législateur a éprouvé la nécessité de distinguer en deux articles le principe et les exceptions. Et d’édicter à côté de l’article 226-13 un nouvel article, l’article 226-14. Depuis sa création, celui-ci a été modifié à six reprises (1). Ces modifications successives peuvent être analysées comme la volonté du législateur de remettre en cause le secret professionnel. Mais ses différentes tentatives ayant échoué, il a alors cherché à en limiter la portée en instaurant des exceptions, dans le but d’induire ou de dicter le comportement des professionnels.
L’introduction de la notion de « secret partagé » dans d’autres codes, notamment le code de la santé publique et le code de l’action sociale et des familles, a créé également de nouvelles exceptions qui auraient mérité d’être inscrites dans cet article 226-14 du code pénal (sur le partage d’informations, cf. infra, chapitre 5).
Par ailleurs, toute personne qui omet de signaler des infractions particulièrement graves et par nature susceptibles d’intéresser la police empêche la justice de mener à bien son action et peut, par conséquent, voir sa responsabilité pénale engagée. Il en est ainsi en cas de non-dénonciation de crimes (C. pén., art. 434-1), de non-dénonciation de crimes constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou un acte de terrorisme (C. pén., art. 434-2) et de la non-dénonciation de mauvais traitements infligés à un mineur de 15 ans ou à une personne particulièrement vulnérable (C. pén., art. 434-3). Cependant, le code pénal prend en compte la spécificité de certaines professions en posant comme principe que les personnes soumises au secret professionnel peuvent ne pas être tenues à ces obligations légales.
En outre, bien que les informations qu’ils détiennent soient protégées par le secret, les professionnels ne peuvent pas s’opposer aux actions menées par l’autorité judiciaire en refusant une saisie de documents ou en refusant de comparaître. Ces dispositions ont tout de même fait l’objet d’aménagements pour que le secret professionnel soit respecté dans la mesure du possible.
(1)
En 1998 par la loi n° 98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu’à la protection des mineurs, article 15, JO du 18-06-98. Puis en 2002 avec la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, JO du 18-01-02. En 2003 avec la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, JO du 19-03-03 ; en 2004 avec la loi n° 2004-1 du 2 janvier 2004 relative à l’accueil et à la protection de l’enfance, article 11, JO du 3-01-04 ; en 2006 avec la loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs, article 14, II, JO du 5-04-06. Et enfin, en 2007, avec la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, article 34, I, JO du 7-03-07.