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Les personnels éducatifs

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Contrairement aux assistantes sociales, les éducateurs ne sont pas tenus ès qualités au secret professionnel et ne sont pas non plus soumis à un code de déontologie (1). De ce fait, ils ne sont pas astreints au secret professionnel à raison de leur profession. Le sont-ils au titre de leur mission ?


A. LE CAS GÉNÉRAL

L’éducateur participe à une mission qui serait de nature à le considérer comme un « confident nécessaire » (cf. supra, section 1, § 1, D). Or, la jurisprudence lui a toujours refusé cette qualité, qu’il travaille dans la prévention spécialisée ou l’enfance inadaptée. « Attendu que toute personne recevant une confidence qui lui est faite dans l’exercice de sa profession n’est pas, par là même, tenue au secret professionnel ; qu’il résulte des termes de l’article 378 du code pénal [NDLR : aujourd’hui, art. 226-13] que le secret professionnel ne peut être opposé à la justice que par ceux qui sont, en raison de leur profession ou de leur état, des confidents nécessaires ; que tel n’est pas le cas de la profession d’éducateurs de jeunes délinquants ou inadaptés, ou d’éducateurs de prévention, [lesquels, s’ils] sont incontestablement tenus à une grande discrétion, [...] n’en sont pas moins, comme tout citoyen, soumis à la loi et obligés de répondre aux questions que leur pose régulièrement le juge ; que cette obligation l’emporte sur le souci de ne pas perdre la confiance des jeunes gens dont ils ont la charge ; que cette confiance ne saurait être acquise et conservée au prix de la méconnaissance des droits supérieurs de la société (2). » Entre les deux intérêts contradictoires que sont l’acquisition de la confiance des jeunes et le bon fonctionnement de la justice, les juges ont choisi de faire primer le second.
En revanche, si un éducateur participe aux missions d’un service au sein duquel les informations détenues sont confidentielles, il est, de par la fonction qu’il occupe, tenu à l’interdiction de révéler, même si cette profession n’est pas considérée comme étant soumise au secret professionnel.


(A noter)

La logique de cette situation est a priori difficile à cerner. On ne voit pas bien en quoi les psychologues, par exemple, sont moins des confidents nécessaires que les assistantes sociales, les éducateurs fonctionnaires que les éducateurs du secteur privé, etc.


B. LES ÉDUCATEURS DE RUE OU DE PRÉVENTION SPÉCIALISÉE

S’agissant des éducateurs travaillant dans le cadre des équipes et clubs de prévention, l’ordonnance du 21 décembre 2000, qui a procédé à la nouvelle codification du code de la famille et de l’aide sociale, avait supprimé la prévention des missions légales et des prestations de l’aide sociale à l’enfance pour la renvoyer à la compétence des départements (CASF, art. L. 121-2). De sorte que les éducateurs des clubs et équipes de prévention, encore appelés « éducateurs de rue » n’étaient plus astreints au secret professionnel et étaient tenus à une obligation de signalement. La profession a réagi vivement, le secret étant la base de leur travail. Aussi, la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale a-t-elle réintroduit la prévention spécialisée dans les missions de l’ASE (CASF, art. L. 221-1, 2°).
Les éducateurs de rue ou de prévention spécialisée sont donc, depuis lors, à nouveau astreints au secret professionnel. Ils ont la possibilité de dénoncer mais non l’obligation de le faire. En revanche, ils ont l’obligation :
  • d’agir pour empêcher les crimes et de porter secours à toute personne en péril ;
  • d’informer leur hiérarchie.
Nous l’avons vu (cf. supra, chapitre 1), le Conseil d’Etat a justifié le licenciement pour faute grave d’un moniteur éducateur qui travaillait dans une institution pour enfants pour avoir dénoncé à la police des jeunes de l’établissement qui avaient commis des délits, sans en avoir averti au préalable sa hiérarchie (3).


Secret professionnel et fonctionnaires

« Les fonctionnaires sont tenus au secret professionnel dans le cadre des règles instituées dans le code pénal » (loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée, article 26, al. 1), sauf nécessité du service ou obligation légale. Ils sont dépositaires de renseignements concernant ou intéressant des particuliers mais, dans certains cas, ils peuvent divulguer des informations dont ils ont eu connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions.
Ils ont même l’obligation, selon l’article 40 du code de procédure pénale qui n’est cependant pas assorti de sanctions pénales, de :
  • « donner avis » sans délai au procureur de la République des crimes et délits dont ils ont eu connaissance dans l’exercice de leurs fonctions ;
  • transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.
Cependant, cette généralisation du secret professionnel à l’ensemble des fonctionnaires pose des questions, notamment sur la possibilité de ne pas parler et aussi de ne pas participer au bon fonctionnement de la justice.
C’est pourquoi, selon nous, le secret professionnel des fonctionnaires est relatif et non absolu. Ils peuvent être condamnés pour avoir parlé et violé ainsi le secret professionnel attaché à leur fonction (4), mais ils ne peuvent arguer de ce statut pour refuser de faire un signalement ou de témoigner en justice.


(1)
Soulignons toutefois que l’ONES vient de publier une charte d’éthique professionnelle des éducateurs spécialisés (cf. supra, chapitre 1, section 1, § 3, B).


(2)
Cass. crim., 4 novembre 1971, n° 70-91953 ; Hennion-Moreau S., « Du secret dans l’exercice de la profession de travailleurs sociaux », RDSS, 1991, p. 183 ; Hennion-Moreau S., « Le licenciement d’un éducateur pour non-dénonciation de faits délictueux », Droit social, n° 2, février 1996, p. 150 ; Raymond G., « Le secret professionnel des éducateurs », RDSS, 1972, p. 244 ; Levasseur G., Rev. sc. crim., 1974, p. 106 ; Robert P., Rev. sc. crim., 1872, p. 628 ; Guiho P., « La situation des travailleurs sociaux au regard du secret professionnel », Sauvegarde, 1979, p. 219.


(3)
Conseil d’Etat, 12 avril 1995, Heniau B. c/ Fondation Les orphelins d’Auteuil, req. n° 133800, obs. Hennion-Moreau, Droit social 1996, p. 156.


(4)
Cass. Crim., 16 janvier 2001 n° 00-81277 : condamnation d’un gendarme pour avoir révélé à des agents de l’administration pénitentiaire l’existence d’une procédure d’écoutes téléphoniques.

SECTION 3 - LES PERSONNES NON TENUES AU SECRET PROFESSIONNEL PAR UN TEXTE

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