C’est une question ancienne qui a déjà donné lieu à des débats juridiques célèbres (1). Plusieurs théories s’opposent : la théorie du service public social, la théorie du service public et la théorie dite « de mission d’intérêt général et d’utilité sociale ». Le débat a naturellement été relancé lors du vote de la loi du 2 janvier 2002 qui mentionne à tout moment le terme d’usager, faisant référence ainsi aux usagers du service public, mais refuse la notion de service public, puis de la loi du 21 juillet 2009 dite loi « HPST » qui évoque la notion d’intérêt collectif.
Les enjeux ne concernent pas uniquement les libertés vestimentaires des salariés. Ils portent – outre les questions d’autorisation, de fermeture, de financement – sur la compétence juridictionnelle, l’application de toutes les règles de service public aux établissements et services sociaux privés, par exemple la loi du 17 juillet 1978 sur la communication des documents administratifs, la réglementation du droit de grève, la législation sur les incriminations relevant des personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public (trafic d’influence, prise illégale d’intérêt, atteintes à l’égalité d’accès des candidats aux marchés publics, détournement de biens...). Il s’agit de défendre les grands principes du service public : la non-discrimination, la continuité du service public, l’adaptation aux besoins, la transparence...
Pour que des services privés exerçant des activités administratives aient la qualité de services publics, ceux-ci doivent exercer une activité d’intérêt général, sous le contrôle de l’administration.
En ce qui concerne les établissements sociaux gérés par des associations privées, les deux conditions pourraient être admises. La prise en charge d’enfants sans famille, ou de personnes handicapées peut être considérée comme une activité d’intérêt général. La deuxième condition pourrait être acceptée du fait de l’importance du rôle joué par l’Etat dans certains secteurs qu’il finance et contrôle entièrement (CHRS, ESAT). Récemment, un juriste tenta de démontrer que l’action sociale et médico-sociale était, à partir du moment où l’on acceptait la qualification de service public, non pas un service public administratif (SPA), mais un service public industriel et commercial (SPIC) (2), et un autre admettait que ces services publics sociaux n’étaient « qu’une variété de service public administratif dont la spécificité réside dans leur objet social » (3).
(1)
Lhuillier J.-M., « De quoi les établissements et les services sociaux et médico-sociaux sont-ils le nom ? » RDSS, n° 1/2010, p. 123.
(2)
Poinsot O., « L’action sociale et médico-sociale, un service public industriel et commercial ? », JCP éd. A, n° 45, 7 novembre 2005, p. 1358.
(3)
Brenet F., « Le droit des marchés publics et les services publics sociaux », RDSS n° 5/2006, p. 811,