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L’organisation du recours contre l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’Etat

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[Loi n° 2013-673 du 26 juillet 2013, JO du 27-07-13 ; code de l’action sociale et des familles, articles L. 224-5 et L. 224-8]
Lorsque les parents d’un enfant s’en désintéressent (1), ou renoncent volontairement à exercer leurs prérogatives d’autorité parentale à son égard (2), décèdent ou n’établissent pas leur filiation envers lui, le statut de l’enfant s’en trouve modifié. Le mineur recueilli ou confié dans de telles situations au service de l’aide sociale à l’enfance est alors admis comme pupille de l’Etat, dès lors que les conditions légales ont été respectées, et un arrêté d’admission est pris en ce sens. La conséquence immédiate est que le mineur devient adoptable. On se souvient que la Cour de cassation avait renvoyé au Conseil constitutionnel le 6 juin 2012 (3) une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions de l’article L. 224-8 du code de l’action sociale et des familles relatif au recours contre l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’Etat. Dans sa décision du 27 juillet 2012 (4), le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution le premier alinéa de l’article L. 224-8 du code de l’action sociale et des familles relatif aux conditions dans lesquelles cet arrêté pouvait être contesté (5) et reportait au 1er janvier 2014 la date de cette abrogation, compte tenu des risques d’insécurité juridique que présentait pour tous les conseils généraux une abrogation immédiate des dispositions censurées. La loi du 26 juillet 2013 relative à l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’Etat (art. 1 et 2) modifie donc les articles L. 224-8 et L. 224-5 du code de l’action sociale et des familles. Les nouvelles dispositions sont entrées en vigueur le 1er janvier 2014 et portent, d’une part, sur le délai à partir duquel l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’Etat peut être établi et, d’autre part, sur les personnes autorisées à former un recours contre cet arrêté ; elles précisent enfin les modalités de notification de cet arrêté.


A. L’ÉTABLISSEMENT DE L’ARRÊTÉ D’ADMISSION EN QUALITÉ DE PUPILLE DE L’ÉTAT

Les cas d’enfants pouvant être admis en qualité de pupille de l’Etat n’ont pas été remis en cause par la loi du 26 juillet 2013. En revanche, le délai à partir duquel l’arrêté d’admission peut être établi fait l’objet de dispositions nouvelles. Dès lors, il convient de distinguer les situations suivantes. Lorsque l’enfant a été recueilli par un service de l’aide sociale à l’enfance, dans les conditions prévues à l’article L. 224-4 du code de l’action sociale et des familles, et confié en vue de son adoption, l’arrêté d’admission ne peut être établi qu’à l’expiration d’un délai de deux ou de six mois.
Le délai de deux mois concerne la situation de l’enfant dont la filiation n’a pu être établie ou est inconnue (par exemple s’il est né d’un accouchement sous X), celle de l’enfant orphelin de père et de mère pour lequel la tutelle de droit commun n’a pu être organisée et qui a été recueilli dans le service depuis plus de deux mois, et celle de l’enfant remis et confié par le ou les parents à l’aide sociale à l’enfance en vue de son adoption (CASF, L. 224-4, 1°, 2°, 4°).
Le délai de six mois vise la situation de l’enfant confié par l’un de ses parents au service concerné, qui a une filiation établie à l’égard d’un deuxième parent dont on est sans nouvelles, et pour lequel l’aide sociale à l’enfance doit tout mettre en œuvre pour connaître ses intentions à l’égard de son enfant avant de l’admettre comme pupille de l’Etat (CASF, art. L. 224-4, 3°).
Dans l’hypothèse où le mineur admis comme pupille de l’Etat a fait l’objet d’une déclaration judiciaire d’abandon, ou lorsque les détenteurs de l’autorité parentale ont été privés de leurs droits parentaux (retrait de l’autorité parentale), il est alors nécessaire d’attendre que la décision judiciaire soit passée en force de chose jugée avant d’établir l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’Etat, autrement dit qu’elle ne puisse plus être remise en cause par une juridiction supérieure. La disparité des pratiques des conseils généraux telles qu’elles sont connues à ce jour et sources d’instabilité juridique ne devrait donc plus être d’actualité. La date certaine de l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’Etat permet de rendre effectifs les recours légaux prévus à cet effet.


B. LES PERSONNES AUTORISÉES À FORMER UN RECOURS

[Code de l’action sociale et des familles, article L. 224-8]
La loi du 26 juillet 2013 procède à la fois à une clarification des concepts et à un accroissement du nombre de personnes autorisées à agir. Les principaux intéressés, les parents de l’enfant, ont toujours la possibilité de former un recours contre l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’Etat si la cause principale de cette admission ne résulte pas d’une décision judiciaire (déclaration judiciaire d’abandon ou retrait de l’autorité parentale). En outre, ce sont aujourd’hui l’ensemble des membres de la famille de l’enfant qui peuvent prendre une telle initiative, et pas seulement les « alliés » de l’enfant, la preuve d’un lien de parenté devant cependant être apportée (6).
Le cas de l’enfant né sous X a fait l’objet de dispositions particulières. En effet, la loi nouvelle ouvre le droit de contester l’arrêté au père biologique de l’enfant et aux membres de la famille de la mère ou du père de naissance. Il va de soi que, là encore, la preuve préalable d’un lien de parenté possible entre l’enfant né sous X et l’auteur du recours doit être rapportée, ce qui suppose aussi que l’on démontre au préalable que l’enfant né sous X, tel jour, dans tel lieu, est bien celui qui est visé par l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’Etat. L’intérêt d’un tel recours pour le père biologique est de faire échec à un éventuel placement de l’enfant. Il peut donc demander qu’il puisse lui être confié, avant qu’il ne soit statué sur l’action en recherche de paternité qu’il aura pu introduire parallèlement devant le tribunal (7).
Au-delà du lien de parenté ou d’alliance qui peut fonder le droit d’agir devant le tribunal de grande instance, la loi ouvre cette possibilité à toute personne ayant assuré la garde de droit ou de fait de l’enfant, et qui demande à en assumer la prise en charge (condition nécessaire pour tout auteur de recours en contestation de l’arrêté). Cette disposition prend tout son intérêt dès lors que le tribunal saisi est amené à se prononcer, non seulement sur le terrain de la légalité, mais aussi en opportunité, dans l’intérêt de l’enfant. En effet, l’annulation de l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’Etat peut conduire le tribunal à confier l’enfant à l’auteur du recours.


C. LES MODALITÉS DE NOTIFICATION DE L’ARRÊTÉ D’ADMISSION EN QUALITÉ DE PUPILLE DE L’ÉTAT

[Code de l’action sociale et des familles, article L. 224-8, III]
Pour rendre opposable la décision d’admission en qualité de pupille de l’Etat et limiter les risques liés à une remise en cause du placement en vue de l’adoption, il faut que l’arrêté ne puisse plus être lui-même contesté à l’issue d’un certain délai. Pour atteindre cet objectif, la loi nouvelle prévoit un point de départ et un délai maximal pour agir en contestation de l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’Etat devant le tribunal de grande instance (TGI) et détermine la liste des personnes auxquelles les conseils généraux doivent notifier le cas échéant, l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’Etat. La notification est obligatoire et relève de formes diverses.


I. Le caractère obligatoire de la notification

La notification est obligatoire à l’égard des parents de l’enfant, dès lors qu’ils ne sont pas concernés par une décision de déclaration judiciaire d’abandon ou de retrait de l’autorité parentale. La notification de l’arrêté est également prévue pour toutes les personnes que la loi autorise à agir devant le tribunal de grande instance. Pour être toutefois en mesure de répondre à cet impératif légal, le législateur a posé comme condition que les personnes visées aient, avant la date de l’arrêté, manifesté un intérêt pour l’enfant auprès du service de l’aide sociale à l’enfance. La mise en œuvre de cette dernière condition risque de susciter quelques difficultés lorsque les liens au sein d’une famille sont quelque peu distendus, au point que des membres de la famille plus éloignés peuvent ignorer ce qui se passe dans la vie de l’enfant. Reste à savoir dans quelle mesure les tribunaux imposeront aux services de l’aide sociale à l’enfance d’informer les familles d’une prise en charge de l’enfant par leurs services, dans le cadre, par exemple, de la protection de l’enfance.


II. Les formes de la notification

La notification peut être faite par tout moyen permettant d’établir une date certaine de réception, et notamment par le procédé le moins coûteux, la lettre recommandée avec accusé de réception. Le recours exercé devant le TGI doit l’être dans un délai de 30 jours à compter de la date de réception de la notification, et à peine de forclusion.
Or, il est possible qu’une incertitude subsiste sur la notification faite aux destinataires concernés, par exemple, parce qu’ils ne sont pas venus retirer la lettre recommandée à la poste. Il n’est pas concevable d’envisager un placement de l’enfant dans un tel cas, si un recours contre l’arrêté d’admission est encore possible. Il est alors opportun de réitérer la notification par voie postale ou de modifier le procédé utilisé (en recourant à la signification de l’arrêté d’admission, par acte d’huissier de justice) pour avoir une certitude sur l’effectivité de cette notification (8). En effet, le recours au-delà du délai de 30 jours reste possible pour les personnes qui n’auraient pas été destinataires de cette notification (CASF, art. L. 224-8 a contrario). L’ensemble de ces dispositions devront être communiquées par les services de l’aide sociale à l’enfance aux parents de l’enfant recueilli qui seront notamment appelés à consentir à son adoption (CASF, art. L. 224-5).


(1)
L’enfant peut alors être déclaré judiciairement abandonné (C. civ., art. 350).


(2)
En confiant leur enfant à l’aide sociale à l’enfance, notamment en vue de son adoption (CASF, art. L. 224-4, 2° et 3°).


(3)
Cass. civ. 1re, 6 juin 2012, n° 11-27071.


(4)
Décision n° 2012-268 QPC du 27 juillet 2012, JO du 28-07-12.


(5)
En effet, l’absence de notification de l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’Etat d’un enfant, avant la réforme de 2013, a conduit le Conseil constitutionnel a considéré que l’alinéa 1er de l’ancien article L. 224-8 du code de l’action sociale et des familles était non conforme à la Constitution, puisque les parents de l’enfant ou les membres de sa famille étaient privés du droit d‘exercer un recours juridictionnel effectif. Le dispositif légal antérieur ne définissait pas les cas et conditions dans lesquels des personnes qui présentaient un lien plus étroit avec l’enfant étaient effectivement mises à même d’exercer un tel recours.


(6)
Conformément à l’article 1315 du code civil et à l’article 31 du code de procédure civile sur le droit de la preuve et l’action en justice.


(7)
L’action en recherche de paternité n’a pas lieu d’être si l’enfant a été reconnu et que cette reconnaissance n’a pas été contestée.


(8)
Il s’agit là d’un procédé juridique courant en matière de procédure, et notamment de procédure civile. L’article 651 du code de procédure civile prévoit en effet que les actes sont portés à la connaissance des intéressés par la notification qui leur en est faite, et notamment par acte d’huissier de justice.

SECTION 1 - LES ENFANTS ADMIS EN QUALITÉ DE PUPILLE DE L’ÉTAT

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