La plupart des pays sont aujourd’hui dotés de services permettant d’attester des événements liés à l’état civil des personnes, que ces événements soient référencés dans le cadre des actes de l’état civil dressés à l’étranger ou par les autorités consulaires étrangères en France.
A. LES ACTES DRESSÉS À L’ÉTRANGER PAR LES AUTORITÉS COMPÉTENTES
[Code civil, article 47]
Des ressortissants étrangers résidant en France peuvent entendre se prévaloir des actes de l’état civil établis dans leur pays d’origine ou auprès de leur autorité consulaire. L’usager de nationalité étrangère (jeune étranger mineur, par exemple), qui bénéficie d’une prise en charge au titre de l’aide sociale à l’enfance, peut être amené à utiliser son acte de naissance d’origine, dans le cadre d’une démarche procédurale visant à obtenir la nationalité française. L’article 47 du code civil prévoit que « tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans des formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ». Il s’agit de préciser quels sont les actes qui relèvent du dispositif légal visé par l’article 47 du code civil et d’apprécier les conditions de leur validité.
I. Les actes visés par l’article 47 du code civil
Cette disposition légale s’applique aux actes qui ne sont pas établis en France. Elle ne concerne que l’acte instrumentaire de l’état civil, c’est-à-dire le support matériel, abstraction faite de sa validité et de ses effets juridiques au regard de la loi applicable. L’article 47 ne vise par ailleurs que les actes d’état civil stricto sensu et non les décisions judiciaires qui pourraient avoir une influence sur l’état civil, comme un jugement d’adoption ou de divorce. Il en est de même pour une décision rectificative ou modifiant un acte de l’état civil.
C’est au regard de la loi française, et dans le respect de la loi étrangère, que l’on appréciera, en cas de doute soulevé par exemple par un service social ou une autorité judiciaire sur la qualification d’acte de l’état civil ou sa validité, si l’acte fourni est une copie de l’acte original ou une copie falsifiée.
Pour la Cour de cassation (1), « l’acte d’état civil est un écrit dans lequel l’autorité publique constate d’une manière authentique un événement dont dépend l’état d’une ou plusieurs personnes ». Il n’existe pas cependant dans le code civil de liste exhaustive des actes de l’état civil, bien que, en réalité, on puisse en recenser cinq : acte de naissance, de reconnaissance, de mariage, de décès et acte d’enfant sans vie. Dans le système français, le pacte civil de solidarité est exclu de la liste des actes de l’état civil, alors même que certaines législations étrangères prévoient que le partenariat étranger puisse constituer un acte de l’état civil. Très concrètement, cela sous-entend que, au visa de l’article 47 du code civil et tout en respectant le droit étranger, l’acte établi à l’étranger (au Danemark, par exemple) qui constate un partenariat enregistré ne pourra être qualifié d’acte d’état civil.
Au-delà de sa qualification, chaque fois qu’un usager se réfère à un acte de l’état civil établi par une autorité étrangère, les questions de la validité de l’acte, de sa force probante, des conditions de son utilisation en France sont posées.
II. Les conditions de validité de ces actes
S’agissant de la validité de l’acte, la loi française renvoie à la loi étrangère pour déterminer d’une part, quelles sont les autorités compétentes pour dresser les actes de l’état civil et, d’autre part, pour déterminer les formes dans lesquelles ils doivent être rédigés.
Le risque principal est qu’une personne entende se prévaloir d’un acte présenté comme un acte de l’état civil étranger (un acte de mariage, par exemple), pour faire valoir les droits qui sont les siens (en qualité d’époux, pour une demande de pension alimentaire), alors même que l’autorité étrangère référencée sera qualifiée d’incompétente au sens de la loi étrangère (par exemple, au regard de la loi fédérale canadienne, les autorités religieuses ne sont pas compétentes pour célébrer un mariage). L’acte de l’état civil considéré comme non valable par le droit français ne peut être invoqué au soutien d’une demande d’aide ou d’action sociales, d’une demande adressée à l’autorité administrative ou judiciaire.
A l’inverse, et dans certains droits étrangers, les autorités religieuses peuvent exercer, conformément à la loi locale, les fonctions publiques d’officier d’état civil. Ainsi en est-il des actes de baptême qui peuvent tenir lieu d’actes de naissance, des actes de naissance enregistrés auprès d’un tribunal rabbinique ou de la célébration religieuse du mariage dans certains pays (sur la force probante de ces actes, cf. infra, chapitre 3, section 2).
(A noter)
Il est donc nécessaire pour chaque usager qui se réfère à un acte établi par une autorité religieuse de vérifier si selon la loi qui est la sienne (loi de sa nationalité) et le respect de l’ordre public français cet acte peut produire des effets juridiques, ce qui, à l’inverse, pourrait ne pas être le cas pour un acte de répudiation mettant fin à une union matrimoniale.
B. LES ACTES DRESSÉS PAR UN CONSULAT OU UNE AMBASSADE EN FRANCE
[Code civil, articles 55 et 78]
Les résidants étrangers sur le territoire français peuvent solliciter leur consulat ou leur ambassade en vue de faire établir et de dresser un acte de l’état civil les concernant. On peut toutefois se demander, au regard du droit français, si des faits comme une naissance ou un décès ne concernent pas également l’ordre public interne et ne doivent pas, à ce titre, être déclarés aux seuls officiers d’état civil français.
En effet, la loi prévoit que toute naissance et tout décès survenus sur le territoire national doivent leur être déclarés. Pour autant, les consuls étrangers sont autorisés à recueillir de telles déclarations sous réserve qu’elles soient effectuées dans les délais légaux. On peut aussi imaginer qu’un ressortissant étranger déclare une naissance par exemple, à son consulat, avant de la déclarer à l’officier d’état civil français. S’agissant de la déclaration faite au consul, prise isolément, elle ne serait pas considérée comme ayant une valeur d’acte d’état civil instrumentaire parce que toute naissance intervenant sur le sol français doit être déclarée aux officiers de l’état civil français. Une telle déclaration pourrait toutefois valoir commencement de preuve par écrit, dans l’hypothèse où serait mise en œuvre une action en recherche de maternité. S’agissant des actes de reconnaissance qui concerneraient ses nationaux, le consul étranger est habilité à les recevoir (cf. infra, chapitre 4, section 2).
(1)
Cass. civ. 1re, 14 juin 1983, n° 82-13247 Bull. civ., I, n° 174.